C.N.R.S.
 
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     RUDESSE     
FEW X rudis
RUDESSE, subst. fém.
[T-L : rudece ; GDC : rudece ; FEW X, 541b : rudis ; TLF : XIV, 1342b : rudesse]

A. -

[Dans les choses, dans l'apparence physique...]

 

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"Grossièreté (du milieu)" : Nous dison que le porc est desactrempé en rudesce et ordure plus que le brebis, et le moineau en luxure plus que la tuertre, et le louf en devourer plus que le buef, etc. (ORESME, E.A.C., c.1370, 386).

 

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"Dureté (d'une situation)" : Seullement ung peu d'ewe morte Est entre nous deux, qui l'ennorte Et empesche par sa rudesse Que sa grace ne me conforte, Dont Desespoirs me desconforte Et fera mourir par tristesse. (Narcissus, p.1426, 312). O vielliesse, Estat de rudesse, D'impotence et de grant foiblesse, Tant ay vesqu que je suis en tes laz. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 317). Pour amolir les felons orgueilleux Tirannisans voz pays et voz lieux Et pour oster voz subgectz de rudesse Passer vous fault les grans mons merveilleux Que l'on vous dit estre trop perilleux (LA VIGNE, V.N., p.1495, 154).

B. -

[Dans les pers., dans leur comportement, dans ce qui touche les pers. ...]

 

1.

"Caractère grossier, fruste" : Mais ne lairai que je ne die Que vous avés fait villenie D'ainsi parler et grant simplece ; Car chascuns le tient a rudesce, Comment que tousdis aiés dit : S'il est voirs ce qu'on m'en a dit. (MACH., Voir, 1364, 750). A tout ce que chil Escoçois reqierent et demandent, ne fault pas trop grant consel. Il seront respondu ensi, pour ce que il ont demandé a quel title li rois nostres sires et nous lor faissons gerre : c'est par le mauvesté et rudece de euls. Car ja sevent il et ont sceu leur pere, passé sont li terme de .Vc. ans, que li rois d'Escoce doit tenir et relever et faire honmage au roi d'Engleterre de tout le roiaulme d'Escoce (FROISS., Chron. D., p.1400, 213). O meschant fol, plain de rudesse, Bien petit de chose t'encombre ! Ne vois tu pas que c'est ton umbre, Qui resplendist en la fontaine ? (Narcissus, p.1426, 310).

 

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Rudesse de nature. "Grossièreté d'esprit" : Et ainsi je croy que cuer de noble estrattion qui a la science des nobles vertus des ars dessuz diz ou cuer, qu'il n'en sauroit meserrer si tost que cil qui auroit aprins les ars par avarice de vouloir enrichir, par dissimilitude de complaire aux princes, et non monstrer le vif du droit, car rudesse de nature ne se puet bonnement appliquer a la nature nourrie en noblesse. (ARRAS, c.1392-1393, 17).

 

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"Ignorance" : ...en sa rudesse aouroit les ydoles (JEAN GOLEIN, Rational B.D., c.1370-1372, 332). Si fait bon oÿr exemplaire Et bonnes vertus raconter, Dont on puet par raison monter En l'estat de perfectïon. Et cil qui par derisïon Ou par rudesce n'en a cure, Je doubte que de sa nature Il ne soit de pou de vertu. (Gris., 1395, 2). ...pour ma rudesse et non sçavance (SAINT-GELAIS, Séj. honn. D., c.1490-1495, 337).

 

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"Difficulté à comprendre qqc." : JHESUS. (...) Vo rude engien veul supplier, Et vostre aveuglée rudesse, Dit vous ay que je sui l'adresse Par qui nuls ne peut forvoier (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 126).

 

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P. méton. "Milieu de rustre, rusticité" : Par ma foy, cil qui la passe semble gentil homme, mais il ne le monstre pas, ains monstre qu'il est extraiz de rudesse, quant il passe ainsi escouteement devant dames ou damoiselles sans les saluer. (ARRAS, c.1392-1393, 24). Et a l'estat, maintieng et gouvernement que vous avez veu en elle, vous povez assez appercevoir qu'elle n'a pas esté nourrie en mendicité ne en rudesse, mais en superfluité de bien, d'onnour et de largesse de tous biens. (ARRAS, c.1392-1393, 44).

 

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"Comportement grossier" : Car j'estoie tous arrudis Et d'oÿr leesce assourdis ; Et, perdu mon entendement Et mon amoureus sentement, En ma bouche n'avoit loenges De dames privees n'estranges, Et aussi pas ne les blasmoie, Quar de toutes riens ne disoie. Je me tenoie rudement Et haoie l'esbatement Et fuioie les compagniez Ou on menoit les bonnes viez ; En riens de moy ne me chaloit, Qu'a mon gré autant me valoit A faire une tresgrant rudesce Com de faire une gentillesce. (MACH., Voir, 1364, 104). ...Venus qui est deesse Et souvereinne maistresse D'amours et de tous ses fais, Qui moy de blamer ne cesse Dou pechié de la rudesse Que j'ay fait par ma simplesse Contre Amours ; si m'en confesse, Et Vesta dira la messe En pardon de mes meffais, Qui des nimphes est prestresse. (MACH., Les lays, 1377, 441).

 

2.

"Caractère dur, sévère, dureté, sévérité" : ...se tu d'absolucion Me clos la grace et la largesce Et je peri par ta rudesce, Dieu te vueille (...) Demander la dampnacion De m'ame (Mir. st Guill., c.1347, 32). Tous jours [le marquis] l[Griseldis]'a trouvee sanz blame, Et vertüeuse sanz deffaulte. (...) Car certainement croy que celle Par son bien vendra au dessuz ; Et le marquis, qui est feruz En sa rudesce et obstiné, Ert en pou d'eure ravisé Et de sa durté convertiz (Gris., 1395, 71).

 

3.

"Caractère brutal, violent, brutalité, violence"

 

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"Violence (comme acte)" : Et sur ce ledit Roy -d'armes s'en retourna à Saint Denis devers son maistre le duc de Bourgongne, auquel il racompta les besongnes dessusdictes et la rudesse qu'on lui avoit dit et fait. (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.2, c.1425-1440, 432). ...Sur la foy de gentillesse, De chose que me racontez Par moy n'en souffrerez rudesse. (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 51). RAISON. (...) Mais n'as tu point peur, par ta foy, Que Dieu se cource contre toy De faire au Peuple tel rudesse ? PLUSEURS. Estez vous sa procureresse ? Vous vous en meslés malement. (Pouvre peuple H., c.1450-1492, 208). Et lors, par maistre Jehan Avin, conseiller lay en la court de Parlement, furent fais plusieurs explois en l'ostel dudit d'Estouteville, comme de cercher boistes, coffres et autres lieux pour savoir se on y trouveroit nulles lettres ; et fist plusieurs rudesses oudit hostel à dame Ambroize de Loré, femme dudit d'Estouteville, qui estoit moult sage, noble et honneste dame. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 12).

 

Rem. Myst. process. Lille K., t.2, a.1485, 16/211.

 

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Faire rudesse à qqn. "Rudoyer qqn" : Et par ceste benignité actraioit il ainsi les cuers de tous gentilz hommes, amis ou ennemis, non mie par leur faire rudece les cuidast avoir, ne que de lui mal contens se tenissent (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 140).
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

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