I. -

Empl. trans.

A. -

Au propre

1.

Radresser qqn qq. part/à qqn. "Reconduire, ramener qqn qq. part (ou à qqn)" : Sire, a retour me convient mettre (...) ; Si vous pri que ne me laissiez, Pour Dieu, mais que me radressiez Ou me trouvastes. (Mir. fille roy, c.1379, 55). ...ains vous radresseray la damoyselle que vous avez perdue (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 18). Elle Ysiphile passa illec la nuyt, elle y fist faire du feu et alumer pluseurs fallotz pour radreissier illec Jason et Argos, disant que Jason sans faillir vendroit devers elle. (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 216).

2.

Radresser qqc. "Redresser qqc." : ...les sergens d'armes dessusdis radrechèrent leurs macques, les fleurs de liz desçure, et crièrent tous à une voix : Vive le Roy ! Vive le Roy ! (Chron. anon. Ch. VI, D.-A., c.1431, 327).

B. -

Au fig.

1.

Radresser qqn

a)

"Remettre qqn dans la bonne voie" : De tout sui gouverneresse Et de tous maus (je) sui miresse, J'enlumine les non veans Et donne force aus recreans, Je relieve les trebuchiez Et radrece les fourvoiez. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 11). Quant encliner la volente Verras a fait desordene, Adonc soit devant soit (au) devant croulee Et devant mise l'espee, Par li soit chascun radrecie Et en sa place rachacie ! (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 134). ...et n'a qui le conseille, radroisse ne reconforte. (Hist. Berthe Pépin T., c.1400-1500, 231). Justice la bien ordonnee, De Dieu en la terre transmise, Ne veult estre pour or donnee Ne a ceulx qui plus feront mise, Mais au bon droict el s'est submise, Compas a plomb et regle esquierre, Pour radresser chacun qui erre. (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 60). Pour avoir eu amour au monde faulx, Avoir ravy l'aultruy comme herbe faulx, S'estre orgueilly montans les grans chauffaulx, Ne doibs tu pas D'humanité rompre le droit compas Qui au pecheur penitent tient le pas, Radressant ceulx qui ne vont le droit pas. (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 80). ...et ainsi les ungs radressent les autres (COMM., I, 1489-1491, 103).

-

Radresser son coeur : Ton cuer radresse, Qui encor mains en ta simplesse (DESCH., M.M., c.1385-1403, 196).

b)

Radresser qqn à qqn. "Faire retourner qqn à qqn" : ...nous sommes par cy devant mis en tout devoir pour à nous radrecer et redimer nostre trés chier et trés amé frere le duc de Guyenne (Lettres Louis XI, V., t.4, 1469-1472, 32).

-

Radresser qqn à qqc. : ...il les radreceroit, vosissent ou non, a raison. (FROISS., Chron. D., p.1400, 467). Bien doulcement si s'umilie, Et luy vient de grant courtoysie Quant a joye si me radresse, Qui suis prisonnier en tristesse. (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 89).

c)

Radresser qqn de qqc. "Redresser, relever qqn de qqc." : Et mon mestre, qui est si plains D'onnour, de sens et de noblece, De leurs grans painnes les radrece, Quant il le servent loyaument. (FROISS., Par. am., c.1361-1362, 53).

d)

CHASSE Radresser les chiens

Rem. HENRI FERR., Modus et Ratio T., c.1354-1377, gloss.

2.

Radresser qqc.

a)

"Redresser, relever qqc." : S'ilh estoit alcuns qui tenist fiifs de monsaingnour de Liege et, encontre sa feaulteit et seriment, ilh le relevast d'aultre saingnour, ou en fesist allouz ou masure sens le greit de saingnour, por le fiief denatureir et le saingnour deshireteir, ons le poroit appelleir al Anneal de palais, pour cely forche et deshirtanche ... radrechier (HEMRICOURT, Patron Temp. B., c.1360-1399, 73).

Rem. Guill. Orange T.H.G., p.1450, gloss. (radrecer les besoignes "rétablir les affaires").

b)

"Redresser, corriger qqc." : ...le devision de l'églisse agensie, Qui avoit par errour et par simonnie Estet mout longement au siècle desvoïe, Fu par ces nobles prinches vaillanment radrecie (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 358). Pour radrecer voz courages en mieulx Transmet ce lay d'amour et d'amitié. (CHART., L. Paix, a.1426, 412). Et quiconquez a cler entendement peult congnoistre qu'elle est divinement donnee plus que trouvee humainement, quant par elle sont baloiez toutes ordures, obscurtés enluminees, inniquitez radreciez, et lez aultres introdutions vainez, irriteez et confuses (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 127). La tierce a l'acomplissement de sa droitturiere voulenté, par laquelle comme vraye regle et esquerre noz voulentés obliques sont radrecees (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 163). ...[il] luy compta son cas, c'est assavoir de son asne qu'il avoit perdu, priant pour Dieu qu'il luy ["le lui"] voulsist radresser et bailler chose dont il le peust recouvrer. (C.N.N., c.1456-1467, 468).

-

"Corriger, amender qqc." : Et quant à ses serviteurs [ceux du Dauphin], le Roy eust bien desiré le temps passé, et encores desireroit, que mondit seigneur se servist de gens notables, qui tousjours le conseillassent et induisissent à toutes choses qui feussent pour son bien et honneur ; et, en lui laissant en tour lui gens qui autrement le conseillent, ce ne seroit pas pour radresser ceste matière, ainsi que le Roy le desire, et que, pour le bien et honneur de mondit seigneur, il feust expediant et necessaire. (Doc. 1456. In : ESCOUCHY, Chron. B., t.2, a.1465, 339-340).

-

Radresser qqc. à/en : Dieu en tout, par grace, pourvoye, Et ce qui nicement forvoye, A son plaisir, en bien radresse Es mains de ma Dame Jennesse ! (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 151). Certes, comme en gettant ses rez sur la terre le beau soleil abat et depart les broullas, et rent le jour cler, ainsi le roy droicturier confont et deprime toute iniquité par l'esgart de sa prudence, et radresse toutez choses a honnesteté par l'onneur de ses justes faitz et renommee (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 45).

II. -

Empl. intrans. ou pronom.

A. -

Au propre [D'une pers. ou d'une chose]

1.

"Retourner, revenir" : ...sachiez en voie De retour est et en l'adresce Le roy ; quanqu'il peut se radresce (Mir. ste Bauth., c.1376, 121). Chier sire, a vous nous radressons. Nous venons de vostre tresor Cerchier (Mir. Clov., c.1381, 219). Mercures adresce sa sente Droit au poumon qui ou corps vente ; Par la trachee se radresse (LE FÈVRE, Respit Mort H., 1376-1380, 34). Freres, comme je vous ay dit, De mon pere jadis yssy Et m'en vins en ce monde cy. Maintenant le monde delaisse Et a mon pere me radresse [Réf. à Jean 16, 28]. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 1018).

2.

"Se relever" : ...le chevalier (...) se radrece asprement et jecte au roy (Percef. I, R., t.2, c.1450 [c.1340], 775).

3.

"Se redresser" : Car aussi que Nature mue Le temps, le couvenoit muër Et de sa plume desnuër Pour avoir plumage nouvel, Nouvel temps et nouvel revel. Et quant je m'en fu perceüs, Que je ne fusse deceüs, Je le fis voler un petit, Pour vëoir, s'en son apetit De voler, li radresseroient Les plumes qui se forvëoient. Mais je vi bien apertement Qu'estre ne pooit autrement Que muër ne le couvenist, Quelque grief qu'il m'en avenist. (MACH., D. Aler., a.1349, 282). Lors li oiselès se descouche D'entrepiez ou il a geü En grant paour qu'il a eü. Adont en son estant se dresce Et lez l'esprevier se radresce, Pour dou tout issir de doubtance Et voler en douce plaisence Celi jour ou il est entrez Qui la li est amenistrez. (MACH., D. Aler., a.1349, 288).

-

[Du faucon qui s'est écarté de la voie] "Se remettre dans la voie, dans la direction de la proie lancée" : Quant ses faucons s'en va au change, Il le reclaime, il le lesdange, Il crie, il huche, il huie, il brait Tant que li faucons oit son brait ; Aussi font tuit cil fauconnier Qui sont dou deduit parsonnier ; Et quant li faucons les entend (...), S'il est de tresbonne nature, Qu'i ne reviengne a sa droiture. Si se radresse et se ravoie Et se met a la droite voie ; Et son premier oisel asproie Tant qu'il ha sa chasse et sa proie. (MACH., Voir, 1364, 724).

B. -

Au fig.

1.

"Se remettre dans le bon chemin, dans le droit chemin" : Et te pourras tost radrecer Ou chemin de Joyeux Pencer Par ou trouver pourras Mercy. (RENÉ D'ANJOU, Cuer am. espris W., 1457, 33). ...le roy lui a tousjours fait dire que le greigneur desir qu'il eut en ce monde aprés son salut estoit que mondit seigneur le daulphin se voulsist reduire, raddresser et venir devers luy comme bon et obeÿssant filz (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 191).

-

Se radresser vers. "Se remettre dans la bonne voie en s'orientant vers" : La verdiere qui y remaint, C'est sa trés bonne renommée, De quoy s'amie est enfourmée Qu'il s'est adès bien maintenus, Sans point estre d'onnesté nus. Dont plus volentiers se radresse Vers lui par l'amoureuse adresse Que li alerions gentis Qui est montez par poins soutis. (MACH., D. Aler., a.1349, 400).

-

Se radresser envers qqn. "Se conduire à nouveau comme il convient envers qqn" : Toutes voies, si le duc se vouloit redduyre et radresser envers le roy, ainsi qu'il appartient... (Reg. Poitiers F., t.3, 1468, 61).

-

Se radresser à qqc. "Se remettre dans la bonne voie en s'orientant grâce à" : ...et moy suy en aulcuns pas radrechies auz coronikes delle grande engliese de Liege, et ay eüt l'avantage d'alconnes anchienes escriptures, rolles et cedulles, qui astoient en mains de mes predecesseurs et sont après leurs decès en mes mains parvenuez (HEMRICOURT, Miroir Hesb. B.B., 1353-1398, 2).

2.

Se radresser de qqc. "Se faire justice à propos de qqc." : S'en fut ly sires d'Awans durement malcontens, et envoiiat requere le saingnor de Warous qu'il ly revoyast sa sierve, ou ilh s'en radrechoit. (HEMRICOURT, Guerres Awans B., c.1398, 4).

V. aussi redresser