C.N.R.S.
 
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     PROIE     
FEW IX praeda
PROIE, subst. fém.
[T-L : proie ; GD : proie ; GDC : proie ; DÉCT : proie ; FEW IX, 285b : praeda ; TLF : XIII, 1290b : proie]

A. -

"Animal chassé, capturé"

 

1.

"Animal dont un prédateur s'empare pour le dévorer, proie" : De bien ferir pas ne se faint, Il abat tout ce qu'il ataint. Enclos estoit de toutes pars ; Si se deffent comme un liepars, Quant on li vuet tollir sa proie. Mais la force ne fu pas soie, Car tout ensamble et à une heure Plus de C. li coururent seure ; Si que si jours estoient cours, Se briefment n'eüst heu secours. (MACH., P. Alex., p.1369, 69). Quant de son nit se part [le tigre] pour se proie aporter... (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 263).

 

2.

[À la chasse] "Proie" : Aussi qui un esprivier prent, Ou cas qu'il le duit et aprent Au courtois et noble mestier Qui aus gentis cuers a mestier, Li apris et aprivesiez, Il en est plus auctorisiez Que s'il estoit adès chassans, Aus chans sa proie pourchassans. Quoy que la prise fust couverte, Soubs la fueillie estoit ouverte, Mais on n'en vëoit l'ouverture Pour cause de la couverture. (MACH., D. Aler., a.1349, 273). ...Et se proie li est moustrée Qui soit d'un autre oisel levée, Elle la prent moult volentiers De son droit, et c'est ses mestiers. Outre plus se cils vient avant Qui lieve la proie devant, L'aigle par devers lui s'adresse, Se laist de la proie l'adresse Et le prent, s'elle le puet prendre. (MACH., D. Aler., a.1349, 362). En l'eure les descoupleray [ces chiens] D'ensemble, et aler les lairay Suivre leur proie. (Mir. st J. Paulu, c.1372, 101). LE ROY. (...) De chacier ay trop diligens Esté, quant j'ay perdu mes gens. J'ay trop coru après ma proye (Mir. Berthe, c.1373, 232). Garde bien de pardre la proye ! (Pass. Auv., 1477, 140).

 

-

Prendre proie : Et quant il se voloit lancier A sa proie pour lui haper, Elle ne pooit eschaper. Car quant proie prendre voloit, Si asprement après voloit Que jamais ne li eschapast, Qu'a son plaisir ne la hapast. (MACH., D. Aler., a.1349, 334). Plus ne vueil de ces yeus parler, Mais j'adresserai mon parler A un fait qui forment me touche, Se l'ay mis en cuer et en bouche : C'est comment l'aigle proie prent, Qui enseingne, moustre et aprent L'estat de trés grant poësté, De noblesse et de roiauté. (MACH., D. Aler., a.1349, 354).

 

-

Oiseau de proie : Lors muay je ma volenté Des menuz oiselès aus grans, Si fui desirans et engrans Et pensans comment j'aprendroie A garder un oisel de proie, L'esprivier especiaument. (MACH., D. Aler., a.1349, 244). Lors en mon estant me dressay, Se vi, ou mes yeus adressay, Un oisel de proie volant, L'air devers midi acolant, Si haut vers les nues fichiez Qu'il y sambloit estre atachiez. (MACH., D. Aler., a.1349, 395). Ly contes si amoit moult les chiens et les oysiaux, et avoit foison de braques, levriers, chiens courans et liemiers, braconniers, faulconniers, oysiaux de proye et chiens chacerez de toutes manieres. (ARRAS, c.1392-1393, 17).

 

3.

"Le bétail dont on s'empare à la guerre, comme butin" : Quant Sarrasins les appercoivent, si montent communement a cheval, et tournent en fuye après leurs gens, qui en enmenoient leur proye de beufs, de vaches, de moutons et de pors, et moult de troussaige. (ARRAS, c.1392-1393, 102). Et quant a ce, dès cy nous vous quictons, quant de nostre partie, mon frere et moy, vostre prison, par my tant que nous vous tauxons a restituer a ma damoiselle tous ses dommages, tant de larrecins, comme de pillaiges de proies, de bestes et de toutes autres choses, au regart de preudes hommes, dignes de foy, qui seront esleuz pour le dommage tauxer (ARRAS, c.1392-1393, 168). Mais le noble prince ne s'esbahist de riens et rassembla ce qu'il avoit d'Allemans, où il avoit une bonne bande ; lesquelz Allemans il contenta le mieulx qu'il peust, et print une picque sur son col, comme ung pieton, et mena iceulx Allemans au pays de Was, où ilz trouvarent grant proye et grant butin de bestes à corne (LA MARCHE, Mém., III, c.1470, 273).

 

4.

"Bétail, troupeau" : Finablement nous l'acordames Et toutes trois nous en alames Vers Paris, le pastour de Troie, Qui gardoit s'aumaille et sa proie, Bues, vaches, moutons et brebis, Qui vont paissant par ces herbis. (MACH., F. am., c.1361, 209). Et Jourdain est deriere o diestre poing l'espee, Qui waite que no gent ne puist estre grevee Comme li paistrez fait le proie qu'a wardee (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 247). ...que, environ le mois de may dernier passé, eulx estans aux champs gardans la proie des grosses bestes dudit Revigny, on [l. ou] fuaige dudit lieu trouverent plussieurs enffans qui gardoient des chevaulx (Lettres rémission René II P.D.H., 1500, 356).

 

Rem. DESCH., Oeuvres Q., t.6, c.1370-1407, 188 ; WAUQUELIN, Faits conq. Alexandre Hé., a.1440, gloss.

B. -

P. ext.

 

1.

"Toute chose dont on s'empare par la force, butin, prise de guerre" : Mez, de present, nous veons clerement le contraire, quar Sainte Eglise est au jour d'ui tributaire, et plus que n'estoit du temps de Pharaon ; lez biens et lez revenues de Sainte Eglise sont la praie d'antre vous, chevalliers (Songe verg. S., t.1, 1378, 14). Et moult grans proyes y gaignierent, Que toutes a Romme porterent. (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 4). Esquelz pays, iceulx faisoient maulx sans nombre, prenans hommes prisonniers et autres proies, comme on fait de coustume sur ennemis. Desquelles malefaçons et rapines, iceulx et leurs gens estoient grandement remplis. (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.3, c.1425-1440, 150). ...et de la proye qu'ilz gaignoyent sur les larrons ou pillars toute la despartoient aux aultres pastours (LA SALE, Sale D., 1451, 171). Puis apres, je conseilleroye Que ung chacun si prist la voye De retourner droit a Orleans, Et la y emmener sa proye, Soit prisonnier, or, ou monnoye, Que desamparer il est tant. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 562).

 

Rem. Flor. Octav. L., t.2, c.1400, 14589.

 

-

Aller en proie. "Se livrer au pillage" : Or sus ! seigneur, alons en proie, Nostres maistres si nous envoie Moustiers et esglises destruire, Et les clergiez dont il n'a cure. Or suz, seigneur, alarme, alarme, Que cilz faux pappes par son charme Ne s'en fuie hors de noz mains. (Jour Jug. R., c.1380-1400, 235).

 

-

Faillir à proie. "Manquer sa prise, revenir bredouille ; p. ext. échouer dans une entreprise" : Seigneur, j'ai tant esté en queste Que je n'ai pas failli a proie : J'ay trouvé ce que je queroie. En Babiloine ay esté, Ou une amie ay conquesté, Dont j'ai fait trestout mon plaisir. (Jour Jug. R., c.1380-1400, 220).

 

-

Partir sans proie. "S'en retourner bredouille" : Je croy trop bien qu'il ne partit pas sans proye, mais qu'il y eust entré a force, par mon serment, non eust. [Accusé de viol, l'homme affirme que sa partenaire était consentante. "Il" désigne son "furon"] (C.N.N., c.1456-1467, 160).

 

2.

Au fig. "Profit" : ...et n'aient pas leur entencion que le plait et le descort d'aucuns leur doie tourner en proie (FOUL., Policrat. B., V, 1372, 415).

C. -

P. anal.

 

1.

"Personne dont on s'empare, qu'on cherche à posséder" : SATHAN. (...) Je ne sçay [plus] que ymaginer. Autre part m'en voys hutiner Puisque j'ay perdu ceste proye [le chrétien]. Se sur luy je peulx dominer, Je l'auray par une autre voye. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 147).

 

-

[À propos d'une princesse convoitée par un chevalier] : Et quant ly vassaus vit ensy la dame ouvrer, Il s'enhardy adont de se proie happer (Hugues Capet Lab., c.1358, 89). [aussi v.1371]

 

-

[À propos d'une religieuse qu'un chevalier tente de séduire] : LE CHEVALIER. Elas ! bien me doy dementer : J'ay du tout failly a ma proye. A chose que ma bouche proie Ne veult celle que j'ains entendre. (Mir. nonne, 1345, 319).

 

-

[À propos de l'âme d'un damné] : Luccifer, maudit Cerberus, Ouvre moy ; je te porte proye ! (Pass. Auv., 1477, 249). Je ne sçay pas que grant deable ferons, Car lourdement de nous s'est eslongnee La bonne proye qu'avoir esperions. (LA VIGNE, S.M., 1496, 367).

 

2.

"Personne dont s'empare un mal, une maladie" : ...ce desplaisant mal (...) [avoit] touché sa proye en dangereux et dommageable lieu. [Il s'agit des hémorroïdes] (C.N.N., c.1456-1467, 32).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Robert Martin

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