C.N.R.S.
 
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     MORS     
FEW VI-3 morsus
MORS, subst. masc.
[T-L : mors ; GD : mors2 ; GDC : mors2 ; AND : mors ; DÉCT : mors2 ; FEW VI-3, 146 : morsus ; TLF : XI, 1092a : mors]

A. -

"Action de mordre, morsure"

 

1.

Au propre : LE FILZ DE L'EMPEREUR. (...) Des papes, des princes, des roys Mort mort les chars a si grans mors Qu'il m'est avis que soie mors. (Mir. parr., 1356, 4). La royne arrache, a grant mors, Sa char, comme femme enragiee (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 321). ...le morz de un chien (...) t'occist aucune fois. (CHR. PIZ., Avision T., 1405, 185).

 

Rem. Consol. Boèce C., c.1350, gloss.

 

-

[Réf. biblique au fruit défendu] : ...Pour le cruel mors de (la) pomme [par Adam]. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 208). Diex se fist en vous homme, Qui de la mort nous acquitta, Ou Adam touz nous endebta Par le mors de la pomme. (Mir. femme, 1368, 231). On vous doit bien, vierge, loer, Quant pour nous d'enfer desvoier Dieu se fist en vous homme, Pour nous de l'ort lieu desbouer Ou Adam nous fist emboer Par le mors de la pomme (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 77). Pour la transgressiom Faicte ou mors de la pomme Perdi sa mansiom Et obliga tout homme Adam le premier pere, Et Eve, nostre mere, Et cy furent hors mys Du lieu de paradix. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 3). Tant se mesprist le premier homme En prendant le mort de la pomme, Qu'il ne doit avoir nul pardon Ne par volenté ne par don (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 3).

 

-

[Dans un cont. métaph.] : N'a mon las cuer jamais bien ne vendra, N'a nul confort n'a joie n'ateindra, Jusques atant que la mort me prendra, Qui a grant tort Par devers moy, quant elle ne s'amort A moy mordre de son dolereus mort, Quant elle m'a dou tout tollu et mort Mon dous ami Que j'amoie de fin cuer et il mi. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 65). Et s'aus autres [Fortune] est si diverse Et de nature si perverse Comme a moy, qu'elle eüst occi, Se Dieus ne vous eüst tost ci Amenée, pour moy destordre Dou mors dont elle me volt mordre. (MACH., R. Fort., c.1341, 87). ...vous sentés la morsure D'ardant Desir, qui est moult sure, Qui vo cuer a mors de mors tel Qu'onques amans n'ot si mortel (MACH., Voir, 1364, 256). Amours me point si tres forment et mort D'un tres doux mors qu'il d'amer m'atalente ; Mais Faux Dangier me veult livrer à mort, Joie me tolt et ire me presente, Car ne me laisse veïr La tres douce en qui sont mi desir (MACH., App., 1377, 639). A vous parle, compains de galle, Mal des ames et bien du corps : Gardez vous tous de ce mau halle Qui noircist les gens quant sont mors ; Eschevez le, c'est ung mal mors. Passez vous au mieulx que pourrez, Et, pour Dieu, soiez tous recors : Une foyz viendra que mourrez. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 132).

 

-

P. métaph. [À propos de la mort] : LE DEUXIESME SERGENT. Voir, j'ay le cuer, sire, empeschié A merveille, et sui envais De penser et touz esbahiz Qu'Aubin est mors. LE BAILLIF. Touz nous fault passer par ce mors, Vueillons ou non. (Mir. femme, 1368, 197). Tantos ara oultre passé Le cuer de moy se ["ce"] mors obscur, Qui tant est cruel, aspre et dur. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 197).

 

2.

P. anal. MÉD. Mors du coeur. "Brûlure d'estomac" : Es corps ou il n'a point de fleume, qui ont fastide, mors du cueur, tenebres es yeulx, et amertume en la bouche, toutes ces choses signiffient que cel corps a mestier d'estre purgié par haut. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 73).

 

3.

Au fig. "Atteinte" : Du premier nom d'esperance, comme ce soit chose à l' avoir sur toutes neccessaire contre le mors de tribulacion, pensant que tousjours ne durera (ce que ainsi se Dieu plaist à toy aviengne) dist Nostre-Seigneur : Ceulx qui espereront en moy ne decherront de leur desir. (CHR. PIZ., P.V.H., 1416-1418, 28). Sy ne font force de conroy, Ains vont a l'estour a desroy, Comme s'il alaissent chouler, Cuidans Panalois engouler Et tout a ung mors engloutir (Pastor. B., c.1422-1425, 199).

 

-

Donner mors. "Critiquer violemment"

 

Rem. LE FÈVRE, Leesce V.H., c.1380-1387, 1018 (DI STEF. 556).

B. -

P. méton. [Désigne des objets concr.]

 

1.

"Morceau" : Et si prendray un mors de pain Et de char que porte en mon sain. (Mir. Berthe, c.1373, 244). Et si avoit la bonne Berthe ung gros mors de corde en la bouche si qu'elle n'eust pouvoir de parler (Hist. Berthe Pépin T., c.1400-1500, 147).

 

2.

Mors de chape. "Agrafe qui retient la chape sur la poitrine" : ...5 mors de chappe avec les pennonceaux, pesant 5 mars 5 estellins d'argent, baillés audit Pierre Marie pour les chappes de ladicte chapelle (Comptes argent. rois Fr. D.-A., I, 1352, 295). Une bourse vielle de broderie, en laquelle a plusieurs boutons de cuivre de mors de chappe. (Ch. VI, D., t.2, 1418, 290).

 

Rem. Doc.1389 ds GAY II, 146a.

 

3.

"Pièce métallique du harnais qui passe dans la bouche du cheval et qui, par l'intermédiaire des rênes, permet de le diriger" : Item pour avoir refait ung viez mors et y mis une bochure, 2 s. (Comptes argentier Ch. le Téméraire B.F.L., t.3/1, 1470, 502). Item pour une paire d'esperons pour l'un des varletz de sommier de mondit seigneur et ung neuf mors aussi pour luy, ensemble 6 s. (Comptes argentier Ch. le Téméraire B.F.L., t.3/1, 1470, 502).

 

Rem. Doc.1370, cf. TLF.

 

-

Mors de bride : Item, est ordonné que une bonne neuve celle, sans ouvrage de corne, garnie d'estriez et d'estrevieres, ne sera vendue oultre XXXV. s. Item, une bonne bride neuve, garnie de deux longes, oultre XV. s. Item, uns mors de bride tous plains, oultre V. s. (Doc. Poitou G., t.7, 1422, 391). Il y avoit deux autres chambres plaines de mors, de brides a cheval pour coursiers, chevaulx moyens, pour mulles et mulletz, fournies d'estrilles. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 262).

 

-

Demi-mors. "Une des branches du mors" : ...ung demi mors pour la hacquenée blanche (Comptes roi René A., t.2, 1452, 178).

 

-

[Du cheval] Prendre le mors aux dents. "Prendre et serrer les branches du frein avec les incisives (ce qui annule l'effet du mors, et fait que le cheval s'emballe)" : ...un coursier trop merancolieus et mal affrenet (...) s'effrea en chevauçant, et prist son mors as dens. (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 176). ...et incontinant, souldainement commença ledit cheval à rentrer en sa frenesie ou challeur, et se print à ruer, saulter et prandre le mors aux dans, tellement que ledit suppliant ne le pot tenir (Doc. Poitou G., t.11, 1466, 60).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Robert Martin

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