C.N.R.S.
 
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     MAINTIEN     
FEW VI-1 manu tenere
MAINTIEN, subst. masc.
[T-L : maintien ; GD : maintien ; GDC : maintien ; FEW VI-1, 298b : manu tenere ; TLF : XI, 192b : maintien]

A. -

[Correspond à maintenir I]

 

1.

"Fait de maintenir ou de se maintenir dans tel ou tel état" : Mais quand il [Adrien] fut en la prison Et il eust leur intencion Oye, ilz se fist arrester Comme crestien, et fermer. Il se publia crestien Comme eulx, et, tout en ce maintien Voult qu'il fut prins et arester De tout point, et a detester Vous dieux et leur haulte puissance (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 112).

 

-

Prov. Rien ne demeure en un maintien : Rien ne demeure en ung maintien, Comme j'oy que chascun devise ! (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 322).

 

-

"Ténacité, détermination" : Mes amis, comme je soustien, Chacun de vous le feroit mieux ; En vous est proesse et maintien Et tous estes vaillant et preux. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 524).

 

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"Effort, force" : ...Sa lanche trochonat ly Romans barbarins, Et Tongris s'apoiat de trestous ses maintins (JEAN D'OUTREM., Geste Liège B.B., t.1, a.1400, 595).

 

2.

"Entretien, protection" : Ce nonobstant fault que je soigne Vostre vie en quelque moyen. Il a bien fallu, pouvre yvroigne, Qu'ailleurs j'aye trouvé maintien. (Colin loue dép. Dieu T., c.1485, 166).

 

3.

"Préservation de qqc." : Il met ceste conclusion principalment contre Plato, qui disoit que le monde et les anges eurent commencement et sont anichilables quant est de leur nature, mes il seront touzjours sanz fin par la conservacion et par le maintien de la voulenté de Dieu. (ORESME, C.M., c.1377, 246).

 

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"Façon de gérer qqc." : LE CHRESTIEN. (...) Des biens de Fortune avoye, Gaudissoye, Et maintenant je n'ay plus rien. Mon mauldit maintien De gouvernement Si me fait de bien ["voilà tout le bien que me fait ma maudite façon de gérer les affaires" (Éd., 161)] : Le voy clerement. De maulx largement Auray tous ensemble. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 74).

B. -

[Correspond à maintenir II]

 

1.

"Position, posture" : Dedens la chambre ou Dieus de sommeil couche Avoit un lit trop riche et une couche. La dedens gist, aussi comme une souche, De tel maintien Que ses mentons a sa poitrine touche, N'il ne remuet ne piet ne main ne bouche ; On n'i oit coc ne geline qui glouche N'abay de chien (MACH., F. am., c.1361, 164).

 

2.

"Maintien, port, allure, attitude" : La face avoit clere et moult belle Et la coulour fresche et nouvelle, Et tout le remenant de li Estoit de maintien si joli, Car on ne porroit souhaidier Un aussi bel, a mon cuidier. (MACH., D. verg., a.1340, 19). Et sa maniere asseürée, De tous et de toutes loée, Son biau port, son gentil maintieng Qui pareil n'ont, si com je tieng, Tout aussi com l'enfant le mestre Aprent, m'aprenoient a estre. (MACH., R. Fort., c.1341, 8). Si m'en defri, Qu'onques mais ne vi Maintieng si joli. Or m'a de s'amour bani Pour amer sans decevoir. (MACH., Les lays, 1377, 438). ...il a grant piéce Ne vi (...) si gracieuse pucelle : Biau maintien a en son aler (Mir. Clov., c.1381, 196). Si vous prions, s'il se puet faire, que vous nous en dictes la verité, car a ce que nous povons percevoir de son estat et maintieng d'elle [Mélusine], il convient qu'elle soit yssue de moult noble lieu. (ARRAS, c.1392-1393, 43). Et comment cuidiez vous que ce soit grant hideur de veoir le maintien et la fierté du roy Uriien et du roy Guion, son frere, et de leurs gens ? Saichiez que, au semblant qu'ilz monstrent, il leur semble que vous ne les doiez oser attendre ; et especialment cellui au grant dent n'a paour fors de ce que vous et voz gens ne vous enfuiez avant qu'ilz puissent venir a vous. (ARRAS, c.1392-1393, 224). ...de façon, de corps, de taille, De maintien, de corps et d'arroy Bien sembloit estre filz de roy (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 194). Achillés la belle regarde ; De tous ses maintiens se prent garde (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 115). Si ensuivra de ceste rigle la .IIe. des deux vertus que nous avons dit que elle vouldra singulierement avoir, c'est assavoir chasteté, de laquelle elle sera par ceste maniere de vivre tant reamplie et ramenee a tel purté qu'en fait n'en dit, semblant, attour, contenance, maintien, estat, regart, n'aura riens ou il ait a redire ne reprochier. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 46-47). Ainsy parloit Nature, quant d'autre part, en la partie celestiele, vint une dame qui a son maintieng, attour et contenance moult bien sembloit royne. (GERS., Concept., 1401, 392). Entre autre gorre qui faict a racompter Par excellence plus que chose du monde, Sans en ce cas me vouloir mesconter, Laisser ne veulx de dire et raconter Le beau maintien, la maniere et faconde, La grant beaulté, la costance feconde D'une acouchee si tres bien composee Que brief, Nature sa semblable ou seconde N'a de son temps sur la terre posee. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 167).

 

-

Estre en maintien de telle catégorie de personne. "Avoir l'attitude, la tenue, l'apparence de" : ...à lui vienent de toutes pars, pour sa belle jeunece et esperance de son bienfait, et il les reçoit amiablement et entre eulx est en maintien de prince tout tel qu'il apertient (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., I, 1404, 172).

 

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[À propos d'un animal] : Je ne m'en peüsse tenir, Tant se savoit bel maintenir, Et avec son gay maintieng gent Estoit il biaus a toute gent, Tant de corps comme de plumage. (MACH., D. Aler., a.1349, 320). Elle est vestue de plumage L'aigle par voie d'onnesté, Quant les eles de loiauté Y sont, elle est auques parfaite, Voire, quant la keue est bien faite, C'est assavoir de maintieng gent Au los de toute bonne gent. (MACH., D. Aler., a.1349, 351).

 

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Tenir tel maintien. "Adopter (telle attitude)" : Et lors ses deux filles, (...) prindrent les ensanglantees espees dont elles avoient mis a mort leur pere et s'en ferirent es cuers, tant que mortes et desesperees churent sus le corps de leur doulante mere, qui revint lors de pammoison. O piteux cas ! Sepriane, revenue a soy et voyant meschief sus meschief advenir et redoublement de doeil, autre maintien ne sceut tenir que crier de toute sa poissance si espoantablement que le roy et Jason (...) au son de ces cris vindrent (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 223).

 

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Tenir son maintien. "Contrôler son émotion, se maîtriser" : Moult en y eut d'autres par leans qui se prindrent a plourer et eulz desconforter piteablement. Entre les autres le frere du roy Eson, nommé Pelleus, la estant present, ne sçavoit tenir son maintien. (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 127).

 

-

"Manière de se tenir en société, savoir-vivre" : Il n'est personne si villaine, Qui ne deüst avoir grant honte De faire ce que d'eulx on compte, Quant ilz sont en cellui estat [d'avoir bu], Qui sens et maintien d'eulx rabat (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 32). ...le derrenier venu, avoit bien fait du mauvais cheval et en maintien et en parolles (C.N.N., c.1456-1467, 233). ...il trouva en elle tant de courtoisie en maintien et en parler qu'il n'en sceust plus demander par raison. (C.N.N., c.1456-1467, 316).

 

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De beau/de haut maintien. "Noble" : JUDAS. ...A la dame de beau maintien Qui oncques me fit plus de bien Et me nourry en ma jeunesse, J'euz en mon faulx cuer hardïesse Que de tuer son propre filz. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 149). Et puis, s'il [Jésus] se vouloit monstrer A ces dames de haulx maintiens, Faire le puet, car moult de biens Lui ont fait ou temps qu'il regna. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 395).

 

3.

"Manière, façon d'être, tempérament, contenance, nature d'une personne" : Car elle avoit moult gracieus attrait Et le maintien humble, dous et parfait, Et cheveus blons, Les yeus rians, plus vairs que nuls faucons ; Et ses corps fu gens, joins, gentils, et lons, Et plus apers que nuls esmerillons. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 104). Ceans furent qui contrefaisoient Les amans dont j'ay ci parlé, Qui si po furent emparlé Qu'un mot ne pooient sonner, Ne leurs dames arraisonner, Si faisoient si proprement Tout leur maintieng que vraiement Nuls homs qui soit ne les veïst Qui certeinnement ne deïst : "Cils aimme de loyal cuer fin." (MACH., D. Lyon, 1342, 199). Mon seigneur, conme il a doulz oeil Et gracieux maintien en soy ! (Mir. st J. Cris., c.1344, 267). Car je ne dors ne ne veil Se n'est en pensant a soi, A son maintien sans orgueil, A son gracieus arroy (MACH., Voir, 1364, 512). Amilles est nommez par nom Qui me ressamble, ce dit on, De maintien, de corps et de vis. (Mir. Amis, c.1365, 4). Li roys à la court demoura, Et li papes moult l'onnoura ; Et chascuns honneur li faisoit, Qu'à tous et à toutes plaisoit En fait, en dit et en maniere, En port, en meintieng et en chiere. Et Florimons y est, qui chace En toutes guises et pourchace Qu'il soit quittes de son appel, Où bien porra laissier la pel (MACH., P. Alex., p.1369, 235). Pour ce vous pri, dame, qui estes flour De tous les biens et de toute biauté Et qui avés en grace et en valour Et en plaisant maintieng tout sormonté, Que vous daingniés avoir de moy pité, Que ja vers vous ne penseray laidure, Et me fussiés .C. mille fois plus dure. (MACH., Bal., 1377, 542). Car sa face coulourée Plus que rose en may, De toute biauté parée Et de maintieng gay, M'a pris ; bien le say. (MACH., Bal., 1377, 547). Gens corps, cointe, apert et faitis, Maintieng plein de toute honnesté, Se je vous aim, serf, loe et pris, N'est merveilles, qu'en verité Vous avez si tout seurmonté Que vous estes fleur souvereinne Seur toute creature humeinne. (MACH., Bal., 1377, 559). Vostre dous maintieng simple et coy, Vo bel aroy, Cointe et plaisant, Vo maniere sans effroy (MACH., Ch. bal., 1377, 623). N'onques ma dame au riche meintieng coy Mon dolent cuer, qui ne se part de soy, Ne resjoï, Ne n'ot pitié dou mal que je reçoy. (MACH., Motés, 1377, 509). ...veues lesqueles accusacions, confeissons et denegacions faites par icellui Thomassin Le Valois, prisonnier, et aussi l'estat et maintieng de sa personne (...) ledit mons. le prevost demanda auxdiz presens conseillers leurs advis (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 144). ...[elle] sembloit mieulx estre fole femme, à son maintien et contenance, que autre. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 354).

 

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Prov. Plaisant maintien de visage ne montre pas toujours le cas. "L'apparence n'est pas toujours conforme à la réalité" : L'abit le moyne ne fait pas, L'ouvrier se congnoist a l'ouvrage Et plaisant maintien de visage Ne monstre pas toujours le cas. (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 362).

 

4.

"Conduite, comportement" : Je nel di pas pour faire pires Les biaus, les sages, ne les riches, Car on ne les puet esprisier, Puis que les vueille tant prisier Qu'en mon service les maintieng, Ne nuls n'est de si fol maintieng Que bon nel face devenir, S'avec moy le vueil retenir. (MACH., D. verg., a.1340, 28). Car elle est sage et parcevant De congnoistre un cuer decevant Au maintieng et a la parole ; Ne ja si soutil parabole Ne dira qu'elle ne l'entende (MACH., R. Fort., c.1341, 66). Et la pris je ma soustenance, En regardant la contenance, L'estat, le maintieng et le port De celle ou sont tuit mi deport. (MACH., R. Fort., c.1341, 145). Maintiens doit paroir en maniere, Tant au corps comme a bonne chiere, Et doit estre la chiere lie Le plus qu'on puet adès onnie. (MACH., D. Aler., a.1349, 332). Je cuiday vivre sans esmay Et estre gais, jolis et cointes, Dès lors que de li [le gerfaut] fui acointes, Tous les jours que je viveroie, Tant comme je le garderoie. Mais il fu bien tout autrement : Bien moustra au commencement Un po d'amiable samblant, Et puis se m'ala assamblant Conditions entremeslées De dongiers, estranges ponées, Signes et maintiens orguilleus, Dont j'estoie moult mervilleus. (MACH., D. Aler., a.1349, 378). Dou mantel vous vueil aviser Comme il est biaus a deviser, Et mieudres que biaus qui s'en cuevre Par dit, par maintien et par ouevre. (MACH., J. R. Nav., 1349, 279). ...vaz moy tost savoir A ceulx qui de mon filz sont gardes Conment il le fait, et si gardes Que leur maintien et leur atour Me saches dire a ton retour (Mir. Barl. Josaph., c.1363, 248). A ceste feste et à ceste assamblée fu ordonné (...) que on metteroit en escript tous les fais et les oevres, que li rois qui en prison estoit avoit fait par mauvais conseil, et tous ses usages et ses mauvais maintiens. (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 37). [Ma dame] Tant est parfaite en tout et enterine Que trestuit cil qui sont et ont esté S'onneur, son pris, son scens, sa douceur fine En cent mille ans n'aroient recité. Chascun à bien faire attrait Par son maintieng et par son dous attrait, Humble envers tous et d'orgueil pure et munde ; Mais de son bien, certes, c'est tout le munde. (MACH., L. dames, 1377, 177). Mais les gens de Alixandre, qui a leur maintieng les virent en desroy, sy les assaillirent asprement et promptement, tant que tous les desconffirent. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 52). ...et pour ce onques pour estat ne honneur qu'il eust du roy, onque son cuer n'en orguillist ne ses maintiens n'en furent plus grans, ains a un chascun plus doulz et amiables et plus courtois se monstroit tous les jours. (LA SALE, J.S., 1456, 142). ...du surplus de la vie au jaloux, de ses afferes et manieres et maintiens, ceste histoire se taist. (C.N.N., c.1456-1467, 86).

 

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"Réaction, réflexe ; comportement" : Si vous me voulés adresser Et me conduire ma lance Droit au cuer ung peu sur la pance, Je le poulsarey si tresbien Que cognoistrés en son maintien S'il [Jésus, en croix] a vie ne tant ne quant. (Pass. Auv., 1477, 230).

 

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Souverain maintien. "Perfection" : LE TIERS CHEVALIER. (...) Ne un seul semblant de tristece Il [le marquis] n'y trouvast [Griseldis], maiz que lÿece Et vraye amour continüelle ; Et s'il l'a huy trouvee tele, Encor l'a meilleur l'andemain, Qu'adez amende en souverain Maintieng, et en obeïssance, Comme s'onques n'eust desplaisance Eü puis que fu espousee. (Gris., 1395, 70).

 

5.

"Situation, état" : L'ASNIER. M'amie, je ne vueil cesser (...) tant qu'a li seray Et que tout compté li aray Vostre maintien. LA MÉRE AU PAPE. Hé ! mére Dieu, or say je bien Que sui a ma derraine fin. (Mir. mère pape, c.1355, 395). Ceulz ici considerent et regardent la chançon du monde et son maintien avec celi qui lassus est a fin que sanz cesser il regarde et considere les hommes et touz les fais et volentéz (FOUL., Policrat. B., III, 1372, 226). Or avez du chastel ouy, Ou pou de gent sont esjouy Tout leur vivant, car perilleux Est le lieu, et trop merveilleux Le maintien du lieu et la place. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 79). Et pource que sus laditte riviere il ne veoit pont ne plancque pour aller audit castiel (...) commanda a aucuns de ses chevaliers que il entrassent en l'yawue [l. l'yauwe] et au no allassent sçavoir jusques au castel le maintieng d'iceluy. (WAUQUELIN, Faits conq. Alexandre Hé., a.1440, 361). En honneur me tiens, En riches maintiens : Il ne me fault riens, J'ay tout a desir. (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486,).

 

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De grand maintien. "Important" : ...[il] Trovat dois grans fereis escrins, Qui plains furent de livres escrips en parchemien. L'evesque les regarde qui de cuer fut tant fin, En regardant trovat chouse de grant maintins, Car les rentes trovat, par le corps saint Fremin, Des englises de Tongre dont ly paiis fut sien, Que parmy le paiis gisoient sus jardins, Terres herules, preis, vilhes, maisons hausins Que tenoient barons, chevaliers (JEAN D'OUTREM., Geste Liège B.B., t.2, a.1400, 577).
 

DMF 2020 - Synthèse Pierre Cromer

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