A. -

Au propre "Que l'on ne peut saisir, enlever"

Rem. MOND. ds T-L 1366.

B. -

P. anal. "Qui ne s'inscrit pas dans des limites, qui ne peut être circonscrit, appréhendé" : Et premierement, aussi comme nulle chose n'a eternité fors Dieu seulement, si comme il fu dit ou chappitre precedent, semblablement Lui seul a immensité et autre chose non. Et est incomprehensible, c'est a dire que Il ne peut estre compris en quelcunque espace finie ne infinie, car Il est partout comme dit est, et chascune autre chose est en certain lieu ou espace determineement ainsi que non ailleurs et non pas partout. (ORESME, C.M., c.1377, 284). ...mais chacun doit savoir que c'est chose incomprehensible et inestimable que de la puissance de Paris (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 124).

C. -

Au fig. "Qui ne peut être saisi par l'esprit, qui ne peut être compris"

1.

[De Dieu, de ses attributs...] : ...que les jugemens de Dieu nul ne pouoit comprendre et estre incomprehensibles (FOUL., Policrat. B., II, 1372, 177). N'est pas de merveille : car nous scavons que incomprehensible ne puet estre compris, et autrement ne seroit il point tel. (GERS., Trin., 1402, 158). Nul n'est qui comprendre peust la grandeur des choses qui y sont ne entendement le concevoir, comme estre tousjours assistant de nostre conditeur, veoir le visage de Dieu, la benoite Trinité, face à face, regarder la lumiere incomprehensible, estre tousjours present la compaingnie des anges avec les benois esperis, n'avoir jamais paour de la mort et soy esjoïr ou don de perpetuité. (CHR. PIZ., P.V.H., 1416-1418, 52). Les jugemens de Nostre Seigneur sont vrais, justifiez en eulz mesmes : Mes jugemens sont a cremir non pas a discuter, car ilz sont incomprehensibles a humain entendement (Internele consol. P., 1447, 255). O glorieuse Trinité, puissance insuperable, sapience incomprehensible, souveraine majesté et bonté immense, Pere et Filz et Sainct Esperit, ung seul Dieu eternel... (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 32). L'excellence de la dignité divine est tant grande que la pensee et la cogitation humaine deffault en pensant de Dieu, car il est incomprehensible. (Somme abr., c.1477-1481, 148). SAINCT MARTIN. O Redempteur tresprecïeux, O doulceur incomprehensible De qui les biens solacïeux Racompter est trop impossible (LA VIGNE, S.M., 1496, 151).

2.

[D'une chose] "Impossible à comprendre, mystérieux" : ...avec che selonc l'ame singulierement devant toutes creatures a esmerveillier, pour estre a lui conjoint par artifice incomprehensible, par la sapienche du conditeur a nous incongneue (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 335). ...afin que il mecte en l'entendement une chose incomprehensible (FOUL., Policrat. B., II, 1372, 182). Et pour conclure brevement En ces faiz incomprehensibles Qui ne sont pas a moy possibles De retenir et reciter, Vueil vostre memoire inciter... (DESCH., M.M., c.1385-1403, 275). Nembroth, comme cy dessus appert, fut en ce temps, lequel, au moïen de la science de astrologie, se trouva le plus puissant homme de la terre et bastit la grant et incomprehencible euvre de Babillone (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 15 r°).