C.N.R.S.
 
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     HARO     
FEW XVI *hara1
HARO, interj.
[T-L : haro! ; GD : haro ; DEAF, H166 haro ; DEAF, H169 harou ; FEW XVI, 150b : *hara1 ; TLF : IX, 694a : haro]

I. -

[Interj. servant à exciter des chiens de chasse] : Haro, Sigalé ; haro, Grant-gorge ! Filliolé, sa ; sa, ma levriere ! (Pass. Auv., 1477, 139).

II. -

[Interj. marquant la détresse]

A. -

[Interj. marquant la détresse, l'appel au secours, l'appel à l'assistance]

 

1.

[En cas de danger, quel qu'il soit] : Hareu ! hareu ! le feu, le feu, le feu D'ardant desir, qu'ainc si ardant ne fu, Qu'en mon cuer ha espris et soustenu Amours, et s'a la joie retenu D'espoir qui doit atemprer celle ardure. (MACH., Motés, 1377, 501). ...[elle] vit et apperceut que le feu ardoit au long de la couverture de l'ostel dudit Miserele ; et, pour ce, afin de resqueurre, cria de son povoir : Harou le feu ! Auquel cry vindrent plusieurs personnes demourans en icelle ville qui le estaindrent (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 63). Mais quant Passelion se trouva en telle puanteur, il commença a crier harou. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 879). La chance ne sera pas telle, Si je puis avoir dix VIIJ. [aux dés] Haro, le grant diable m'amyt ! (Pass. Auv., 1477, 202). Haro ! bonnes gens, a la mort, Haro, haro, helas je seigne. Fault il que je porte l'enseigne De ce cocquin de saint Eustache ? Encore ay ung noble en ma tasse Pour luy tenir bon pié et fort. Haro, bonnes gens, a la mort ! (Tr. Men., c.1480-1500, 294). Haro haro alarme alarme (OUDIN, St Genis M.S., c.1490, 55).

 

-

[P. plaisant.] : Mieulx m'eust valu avoir esté serchier Ailleurs [chez une autre femme] secours, ç'eust esté mon honneur. Riens ne m'eust sceu hors de ce fait hacher [de l'amour de m'amye] : Trocter m'en fault en fuyte et deshonneur. Haro, haro, le grant et le mineur [p. plaisant. ; le grand haro, soit, mais le petit haro n'existe pas] ! Et qu'esse cy ? Mouray sans coup ferir Ou pictié veult, selon ceste teneur, Sans empirer, ung povre secourir ? (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 83). Tousjours crioit : "Haro, la gorge m'art !" Et si ne sceust onc sa seuf estancher L'ame du bon feu maistre Jehan Cotart. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 103). PLAISANT FOLLIE. Si nous, femmes, eussions coustume De prier les hommes de ce, Piecza prié je vous eusse. Je panse que vostre stature, Vostre façon, vostre figure Tout est si bien a ma plaisance ! (...) CUIDER (...). Haro, quelle estache veez la Pour lyer ung veau de village ! (Pipée R., c.1470-1480, 194). Harou, je doys faire le guet Au jourd'huy avec une pusse, Pour ce qu'elle fait une musse A bouter dedens son tresor, Avec Nabugodenosor Qui vient a tout dix mille mouches... (S. fol, c.1480-1490, 7).

 

2.

En partic. [Interj. proférée par la victime d'une agression (vol, coups, enlèvement...) afin de faire intervenir ceux qui l'entendent et qu'ils s'emparent de l'agresseur pour le livrer à la justice] : ...lui et un sien frere estans logez en rue Neufve Saint-Merry, à l'enseigne de la Heuse, oy crier emmi la rue : Haro le murtre. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 83). ...oy ledit Jehan Eustace l'aisné et Guillemin Le Grant, pelletier, demourant audit Saint-Marcel, et eulx estans en l'ostel dudit Eustace, qui parloient moult hault ensemble, et crioit ycellui Eustace : Haro ! haro ! j'ay esté batu. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 410).

 

-

Crier/juper (le) (grand) haro (sur qqn) : ...Et quant le tenra, ne detries Que le haro sur lui [Berthain] ne cries Et dy qu'elle te veult murtrir (Mir. Berthe, c.1373, 167). Et puis crient a haute vois, Si fort qu'en retentist li bois, Tout ensi c'on jupe au haro (FROISS., Méliad. L., t.1, 1373-1388, 202). Et pour ce que le dit Jobert en fu refusant, le dit chevalier (...) feri le dit Jobert du poing par le visaige (...) et avecques ce sacha son espée et le feri du tranchant (...) et l'eust le dit chevalier mis à mort, si comme il apparu à son semblant, se le dit Jobert n'eust crié harou (Doc. Poitou G., t.5, 1377, 58). Lequel Mallart lui dist par pluseurs fois qu'il se deportast et que s'il y eust des gens il criast haro sur lui. (Chancell. Henri VI, L., t.1, 1423, 16). Triton sonnoit à l'assaut et a l'arme, Echo crioit le harau, chascun s'arme. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 711). ...S'il y a espie ou embusche Qui vienne avant, je scay ung trau Pour monter se je ne tresbuche Et pour crier le grant harau. (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 1).

 

-

Cri de haro. V. cri : ...mais telle inhibiciun ne se doit pas faire ès cas dont la court de l'eglise ne congnoit point, comme d'heritage et de cri de haro. (Echiq. Normandie S., c.1400, 208).

 

-

Clameur de haro. V. clameur : ...laquelle closture iceulx religieux avoient empeschée a clameur de haro (Rouen temps Jeanne d'Arc L., 1430, 182).

 

.

Prendre qqn à clameur de haro. "Enlever qqn qui pousse des cris de haro" : ...laquelle femme ledit Laubeurg print de fait et de force et a clameur de harou et la monta sur un cheval pour icelle fortraire et emmener es parties de Vire (Chancell. Henri VI, L., t.1, 1423, 37).

B. -

P. ext.

 

1.

[Interj. marquant la détresse morale] : Et ou darrein point [les lettres] contenoient Que s'amie estoit mariée Au plus vaillant de la contrée, Et estoit ja grosse d'enfant. "Haro !" dist il, "li cuers me fent. Hé ! Mors, que ne me viens tu prendre ? A po que je ne me vois pendre !" Lors prist ses cheveus a tirer, Et puis sa robe a dessirer. (MACH., J. R. Nav., 1349, 215). Et quant de près le pot vëoir, Seur le corps se laissa chëoir Au pié de sa tour droitement ; Si l'embrassoit estroitement, Forcenée et criant : "Haro !" Einsi fina belle Hero, Qui de dueil fu noïe en mer Avec son ami, pour amer. (MACH., J. R. Nav., 1349, 250). Lors prinst a crier Haro par droit meschief de coeur pour ce qu'il ne le pouoit syevir. (Percef. I, T., c.1450 [c.1340], 374). Haro, je suis personne morte ! Quel doleur, quel poine et torment ! Oncques ne fut paine plus forte ! (Pass. Auv., 1477, 217). Haro, haro, j'enraige, je meurs d'ire (LA VIGNE, S.M., 1496, 143). Haro ! je meurs. Haro ! j'enraige. Dyables je vous fais tel hommage, A vous mon ame recommand. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 276).

 

-

[Marquant une simple contrariété] : Haro, vecy grant desplesir ! Sus, acopt, levés ceste table ! (Pass. Auv., 1477, 106).

 

2.

[Représentant sans plus un cri, une clameur]

 

-

Faire haro. "Pousser de grands cris" : Sanz vous faire oultrage, Sanz crier ne faire haro, Venez a li, je le vous lo ; Il l'esconvient. (Mir. Pierre Changeur, c.1378, 286). Donc commenchièrent cil qui le veirent à crier et faire grant haro (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 181).

 

-

Mener grand haro. "Pousser de grands cris" : ...ains les reprendra voirement quant mesprendront, et menacera de mettre hors se ilz ne s'amendent, mais ce sera sans tonner ne mener grant harou si que on l'oye de loing (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 177).

 

-

Le haro monte / s'eleve

 

Rem. FROISS., Chron. D., p.1400, 352 ; 376.

 

3.

[Exprimant un simple appel, une interpellation] : Haro, les pastéz sont en l'estre ! Gardez le chat pour les souriz. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 165). SATHAN. Harau ! Harau ! Je suis venu Le trot, le pas, le sault menu. (Pac. Job M., c.1448-1478, 224). Harau, ribaulx, vous m'estonnez, Tant menez cris espouentables ! (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 56). LE SAVETIER. Voyla le clocher sainct-Severain, Qui tremble de sanglantes fibres. Et vous allez chasser aux liepvres ! Haro ! haro, hau ! je le voy. (Chaulder. T., c.1500, 222).

 

-

[Exprimant l'étonnement] : ...Voicy le lieu ou dois venir ; Il ne reste mais que tenir Mon vessel dessoulz le tuel Et l'emplir jusques au coupel Rasibus. Harou ! qu'est ce cy ? Oncques mais ne la veis ainsy : El est jaune comme fil d'or, C'est huille ! (Myst. Incarn. Nat. L., t.2, c.1454-1474, 353).

 

4.

[Désignant une rumeur] : ...quant la nouvelle et li haros en vint en Landrechies... (FROISS., Chron. L., II, c.1375-1400, 22).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Robert Martin

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