C.N.R.S.
 
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     FRAPPER     
FEW III frap-
FRAPPER, verbe
[T-L : fraper ; GD : fraper ; GDC : fraper ; AND : fraper ; FEW III, 762b : frap- ; TLF : VIII, 1225a : frapper]

A. -

"Atteindre qqn ou qqc. d'un ou plusieurs coups d'une arme ou de n'importe quelle autre chose"

 

1.

Frapper qqn/sur qqn

 

a)

Frapper qqn (d'une arme, d'un instrument quelconque...) . "Atteindre qqn d'un coup (avec une arme ou n'importe quelle chose)" : ...en buvant, parolle se meurent entre aucuns de la compaignie, tant que ledit Thomas le frappa, en lieu d'un autre, d'un gros baton sur le braz, pour laquelle cause il frappa icellui Thomas d'um coustel sur la teste, dont il ala, deux ou troys jours après, de vie à trespassement (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 242). Lors tira le roy Uriien le coustel qui lui pendoit a dextre et frappa le roy Sarrazin dessoubz la gorgiere et le mist mort. (ARRAS, c.1392-1393, 138). Et le jayant avoit trois marteaulx de fer en son sain, et en prent l'un et le giette a Gieffroy par grant ayr ; et le frappa sur le manche de la mace, auprez des poings, si qu'il lui fist voler des mains, et sault et la lieve de terre. (ARRAS, c.1392-1393, 247). ...et dit que yceulx maufaiteurs batirent, fraperent et navrerent pluseurs escoliers qui très doucement et devotement et simplement aloient en procession (BAYE, I, 1400-1410, 100). L'ensaigne de Mahom fut contremont levee, Qui estoit de fin or, l'immaige figuree ; Ung crestien tenoit qu'il frappoit d'une espee. (Galien D.B., c.1400-1500, 52). Et, en lui disant ces choses, vint ledit Regnault Goris, qui frappa ledit Petit jehan d'une pierre par la teste, dont il chancella (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 59). Las, bon Jhesus, j'ay trabuché, Car je t'ay frappé de ma lance. Pardonne moy ce grant peché ! (Pass. Auv., 1477, 231).

 

-

[Dans un cont. métaph.] : "...Et se vous estes frapee du dart d'Amours et a moy vous en descouvrez, ce vous fera au cuer un grant bien. Car creature amoureuse passe legierement son mal quant elle treuve a qui deviser se puist." (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 199).

 

-

[Sentence évangélique] Celui qui frappe par l'espee sera tué par l'espee : Reboute t'espée en ta gaine, Pierre, pour moy plus ne le sacque, Car cellui qui d'espée frappe Si sera d'espée feru. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 138).

 

-

Empl. pronom.

 

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Se frapper. "Se donner un coup (ici involontairement, accidentellement)" : Et quant le dit Andry fu dedens son hostel, pour vouloir sauver sa vie à son povoir, cloy appertement son huys à l'encontre du dit Perrotin, et le dit Perrotin en reculant ou pour le branle de l'uys, ou autrement, le dit Andri ne scet comment, ycellui Perrotin se frappa lui meismes ou hurta de sa dicte dague parmi l'ueil (Doc. Poitou G., t.5, 1386, 294).

 

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Se frapper (pour mettre fin à sa vie) : Nous avons Cathon, qui estoit vray serviteur de Pompee, annemy mortel de Jullius Cesar, lequel quant il ouyt dire la mort de Pompee se frappa d'un cousteau, ayma mieulx morir que d'estre en la subgection de Jullius (JUV. URS., Exort., 1458, 414).

 

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Se frapper à une partie du corps : Et pour ce que ledit homme se disoit estre au conte de Savoie, ledit de Cessieres ly demanda se il en vouloit avoir le double, lequel ne respondi rien et se frappa de sa paume ou front, et à tant se parti hastivement. (BAYE, I, 1400-1410, 5). Adonc les barons s'enclinerent devotement, soy frappant a la poytrine par contriction de cuer. (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 156).

 

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Empl. abs. : D'un baston, d'une dimy lance, Fraperons pour rompre leur os. (Pass. Auv., 1477, 229). BEAUCOP. Et le paillart se raille Et tire son espee, aprés Il vous fourroit en ceste paille [où est caché Beaucop] Comme ce c'estoit beurre fraiz. JOYEULX. Où frappa il ? BEAUCOP. Icy emprès, De ce coup là ce fust merveille, De ma teste il alla si près Qu'i m'alla larder une oreille. (B. veoir, p.1480, 20). MERCURE en frappant de sa verge... (Cene dieux, c.1492, 113).

 

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[Avec une nuance intensive] "Donner des coups (avec une arme) de tous les côtés" : Et Aigres, qui la mort doubtoit, se mist a deffense et frapa entour soy de Pleuresanc son espee, qui trenchoit moult bien, et tout ce qu'il en ataingnoit, il en abatoit. (Bérinus, I, c.1350-1370, 306). Et lors que Orchas fut remonté, il vendi chierement aux gens du conte le despit et la villenie qu'ilz lui avoient fait, car il y fery tant et frapa que il les abatoit l'un sur l'autre, ne ilz ne pouoient ses coups soustenir. (Bérinus, II, c.1350-1370, 120). La peussiez veoir grant douleur et hideuse occision. Gieffroy tient l'espee empoignie, et fiert et frappe par telle maniere que tout quanqu'il encontre va par terre. (ARRAS, c.1392-1393, 287). ...nous eussions sans nulle faille, Frappé au travers la bataille Des Bretons ; mais nous apaisames Noz couraiges et recullames... (Fr. arch. B., c.1468-1480, 34). LE SAVETIER. (...) Et ung ! LA LAITIERE. Et deux ! LE SAVETIER. Et trois ! LA LAITIERE. Et quatre ! Frappe fort Gaultier, tu te fains. LE SERGENT. Helas, je me rens. Hay, les rains ! Je vous cry a tous deux mercy. (Sav. serg. D.L., c.1480-1490, 34). Avant ! avant ! frapez, frapez, Com se vous feriez sur un ours. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 212).

 

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"Sévir, infliger des malheurs" : Courés, riblés, gastés vignes et bledz, Tués, emblés, que rien vivant n'eschappe, Si scaura l'en comme Mars cruel frappe. (Cene dieux, c.1492, 108).

 

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Empl. abs. : [Le payen] ...frappa sur une pierre de marbre, tellement qu'il la fendit par grande merveille. «A Dieu de paradis, dist Regnier, vecy frappé oultrageusement et merveilleusement, je suis tout esbahis de la puissance de ce deable, que nous ne pouvons grever ne conquerir !» (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 146).

 

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Frapper (un animal) : Point il ne frappoit son roussin, Pource qu'il avoit le farcin, Que d'ung baston court et noailleux, Dessus sa teste et cheveulx, De peur de le faire clocher. (Fr. arch. B., c.1468-1480, 36).

 

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Empl. abs. Frapper (un cheval) de l'esperon/à frappant à/de l'esperon : Et si tost que ilz virent la porte ouverte, ilz fraperent tant chevaulx des esperons qu'ilz attaingnirent ceulx qui la proie enmenoient, et Aigres leur escria: "Or ça, beaux seigneurs, or laissiez la proie que faussement avez robee, et sachiez que vous ne la menerez pas plus avant". (Bérinus, II, c.1350-1370, 115). Maiz atant vint la affrapant [l. a frapant] des esporons. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 201). ...evous le signeur de Fauquemont venant et sa route a frapant de l'esporon, son pennon tout devant, et entrant ens ou logeis des François sans sonner mot (FROISS., Chron. D., p.1400, 380). Evous venus ces François en deus batailles, et avoient wuit banieres, et ordonnerent lors arbalestriers tout devant, et s'en vinrent en cel vilage que on dist la Cauchie a frapant a l'esporon. (FROISS., Chron. D., p.1400, 446). Et le payen le frappa des esperons moult asprement, tellement que le cheval fist ung sault bien de trente piés de long (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 128). Et vecy Richard de Normandie, qui a coup vient devant l'empereur, frappant son cheval de l'esperon, le quel cheval fist ung grant et merveilleux sault devant luy, et va saluer l'empereur treshumblemant. (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 140).

 

-

Frapper d'estoc et de taille. "Donner des coups aussi bien du tranchant que de la pointe" : N'y a cil qui loings ne s'en tire, S'il peut, car trop est redoubté, Et les siens plains de grant bonté, Qui lui font ayde et secours, Mais, pour faire li contes cours, Vous di que moult bien s'i porterent Li Grec, ainsi que maint porterent Des Troyens a terre, sans faille, En frappant d'estoc et de taille. (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 78). Mon segnieur, en rien refuser Ne vous veulx mes vous obeÿr En tous lieulx sen deshobeÿr, Car sachés descot [l. d'estoc] et destaillie [l. de taillie] Frapperey sus celle chinaillie. (Myst. st Sébast. M., c.1450-1500, 69). Et se aucuns le approchent de pres, il les reboute coraigeusement en les assaillant et frappant, les ungs d'estoc, les aultres de taille. Et monstre bien qu'il est moult expert et moult apprenné ou mestier des armes. (RASSE BRUNH., Flor. Elvide B.N. C., a.1456, 16). On frappe d'estoc et de taille Mais la cousture sera lourde. (Rapp., c.1480, 69). Gours pïochiers, laboureurs et vachers Et gens frappans tant d'estoc que de taille. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 132).

 

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[Dans un cont. grivois] : Quant je me trouvë en bataille, Je frappe d'estoc et de taille Et secoue bien le pelisson. (Gaud. sot, c.1450, 9).

 

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[D'un animal] "Atteindre qqn (ici avec ses piquants)" : L'yraigne de mer est vng gerre de poisson selon Ysodores qui en ses oreilles a esguillons et piquans aguz et pour ce frape il ceulx qui approchent de lui de ses oreilles comme dit Pliton en son neufiesme liure eu XLIIIe. chapitre et a aucuns de ces piquans enuelimez comme a la raye de mer. (Best. hérald. H.E., c.1435-1450, 496).

 

b)

Frapper à qqn

 

-

[Châtiment judiciaire] Frapper à qqn au cul la pelle. "Donner une fessée à la pelle de bois à qqn"

 

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Au fig. "Traiter qqn rudement, cruellement" : Il [Villon] fut rez, chief, barbe, sourcil, Comme ung navet c'on ret ou pelle. Repoz eternel donne a cil, Sire, et clarté perpetuelle. Rigueur le transmist [Villon] en exil Et lui frappa au cul la pelle, Non obstant qu'il dit : "J'en appelle !" Qui n'est pas terme trop subtil. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 143).

 

c)

Frapper sur qqn : ...[Talbot] dist au François : "Frappez sur ce villain qui vous a retenu sans cause et sans raison (...). Si vous l'espergnez, je frapperay sur vostre teste, par saint George !" (C.N.N., c.1456-1467, 57).

 

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Empl. abs. Frapper (sus/dessus) : Et, quant il qui parle veoit que sondit maistre disoit ce, pour faire le gré de sondit maistre, il prenoit un baston, et frappoit sur tant qu'il rençonnoit plus fort que devant. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 95). Et bon moyne, sans demander qui vive, frappe sus et le navra et affola (C.N.N., c.1456-1467, 487). LE SAVETIER. Frappe(r), frappe(r) tousjours dessus Il se remue par deça. LE SERGENT. Je suis mort, je ne parle plus, Par Dieu, je suis oultre pieça. (Sav. serg. D.L., c.1480-1490, 36).

 

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Part. prés. en empl. subst. "Celui qui frappe" : Mes joes aux frappens offry Comme la prophecie chante. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 1078).

 

2.

Frapper qqc./frapper à/sur qqc.

 

a)

Frapper qqc. (de qqc.) (dans/sur qqc.)

 

-

"Enfoncer qqc. dans qqc., en donnant plusieurs coups" : À lui, pour avoir livré audit molin cent et cinquante gaines de chesne, 4 solz 6 deniers gros ; À lui, pour 600 chevilles de chesne qui furent emploiez à frapper ens lesdictes gainnes es volans et es autres vielles gaines, 1 sol 8 deniers gros (Comptes Etat bourg. M.F., t.3, 1418-1420, 648).

 

-

Frapper la quintaine

 

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[Dans un contexte métaph. (idée d'effort plus ou moins illusoire, où l'on est pénalisé comme l'est au jeu de la quintaine le cavalier maladroit)] : Entre deulx eaus, comme le poisson noue. En grant travail j'ai frapé la quintaine, Jusquez ung temps fault que a repos entende (Anonyme. In : CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 194).

 

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[Dans un cont. grivois] : A ! par le corps bieu, elle est femme Pour recepvoir ung combatant, Et pour ce regardés contant Qui frappera a la quintaine. (P. moyne, a.1500, 46).

 

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Frapper un tapis : Je vous promet qu'oncques tappis Ne feust de moy si bien frappés (...) Que cestuy ci (OUDIN, St Genis M.S., c.1490, 83).

 

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Frapper (une toile). "Donner un coup pour serrer les fils de la trame" : ...se es soyes est trové aulcune malfaçon en tixerie ou façon d'ouvrier et que par la faulte dudit ouvrier ledit ouvrage soyt trouvé de façon différente et moings frappée d'un costé que de l'aultre, l'ouvrier l'amendera de troys sols parisis (Mét. corp. Paris L., t.3, 1481, 24).

 

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Frapper des cordes tendues (pour les faire vibrer et produire un son) : Mais aprés trouva les accors Pitagores, par doulx recors A sons de marteaulx par tapper Et cordes tendues frapper (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 116).

 

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Frapper qqc. de qqc. : ...pour ce que le peuple avoit deffaulte d'eau, Moyse frappa une roche de sa verge dont eaue sailli si qu'il est escript ou XLIJe d'Exode. (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 127).

 

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"Estamper qqc. (un tissu) de qqc." : N'orent pas gonnele a pointes Mais haincellins a grans manches, Estrois, serrez sus les hanches, De velous vert decouppez, Brodez, d'or entour frappez (CHR. PIZ., Dit Pastoure R., 1403, 257).

 

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"Marquer d'une empreinte (un ouvrage de métal)" : Item, du nombre de sept plaz moyens, d'argent dorez, frappez de trois rons sur les bors à trois fleurs de liz (Ch. VI, D., t.2, 1420, 375).

 

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En partic. Frapper une pièce de monnaie dans un coin. "Imprimer l'empreinte d'un coin à une pièce de métal pour obtenir une monnaie" : ...le dit Beraut frappa les dictes pieces ès diz coings, dont les aucunes se marquerent bien et les autres non. (Doc. Poitou G., t.7, 1408, 144).

 

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[Dans un cont. grivois] Frapper en un autre coin. "Aller satisfaire ses besoins sexuels ailleurs" : Et se j'ay prins en ma faveur Ses doulx regars [de celle que j'aimais] et beaux semblans De tres decevante saveur Me tresparsans jusques aux flans, Bien ils ont vers moy les piés blancs Et me faillent au grant besoing : Planter me fault aultres complans Et frapper en ung aultre coing. (VILLON, Lais R.H., c.1456-1457, 12).

 

b)

Frapper à/contre/en qqc. "Taper sur qqc." : Il ne fault qu'au buisson frapper ; Si s'est vune beste d'Aulvernge, Elle foyra et sens esparnhe, S'yra mectre dedans les las ! (Pass. Auv., 1477, 143).

 

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En partic. Frapper à/en une porte. "Donner un ou des coups à une porte (pour se faire ouvrir ou pour la casser)" : ...lors qu'il commencherent a la porte a frapper Pour faire les flayaux par force delivrer, Adont y vient Regnaut (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 224). Et ceulx qui estoient pourveu de haches et de quingines commencierent à ferir et à frapper en celle porte, ce sembloient carpentiers (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 216). Mais au plus tost que tu les apperceuras tu te dois conuertir ailleurs et les laissier passer comme tu feroies vng fol qui frapperoit a ton huys auquel tu ne ouurerois pas. (CIB., p.1451, 213).

 

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[Dans un contexte métaph.] : Aprés elle [Divine Sapience] vient par grace cooperant ou par son aide et frappe a l'uys de son ame, temptant et aysaient se il lui ouvrera l'uys de son cuer par consentement. (Déclar. Hyst. S., a.1449, 174).

 

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[En signe d'impatience] Frapper du pied contre terre : En disant ces parolles, pour cuyder complaire au roy, ledict Loys de Ceville commança à contrefaire le duc de Bourgongne et à frapper du pied contre terre et jurer sainct George et qu'il appelloit le roy d'Angleterre Blayborgne, filz d'un archer qui portoit son nom, et toutes les mocqueries que en ce monde il estoit possible dire d'homme. (COMM., II, 1489-1491, 50).

 

c)

Frapper sur qqc. "Donner des coups sur qqc." : O durs cueurs, Ne frapés plus sur ces gros cloux ! (Pass. Auv., 1477, 197). Fist ou Capitol de Romme les ymages de toutes les provinces, qui se mouvoient et frappoient sur leurs tintinabuz qu'ils avoient au col, si tost que quelque rumeur ou division venoit en la province (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 71 r°).

 

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Empl. abs.

 

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[D'une pers.] "Taper (sur qqc., pour faire du bruit)" : A l'entree de la bataille ilz commencerent a sonner et a frapper et faire sy grant bruyt, tellement que tantost que les chevaulx des crestiens les virent ainssy contreffaitz et ainssy sonner impetueusement, ilz commencerent fuyr et desrengier et espaventer en telle maniere que personne ne les pouvoit tenir, mais force fut d'eux enfuyr et retrayre. (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 198).

 

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[D'une chose] "Résonner, vibrer" : ...il constitua plusieurs ymages de bois en la representacion des provinces, qui tenoient en leurs mains clochetes, qui frappoient quant quelque rebelion se vouloit sourdre (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 70 v°).

 

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En partic. [D'une heure] "Sonner" : Quelle heure av' ous oy frapper ? (LA VIGNE, S.M., 1496, 202).

 

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Frapper dessus. "Heurter (une autre chose)" : ...car aucuns y laissent ung braz de la croyz plus loing que l'aultre, si y actaint ung tenon que on fait en la cloche quant elle chiet en aucune des osches de ladite roue des heures, et par ceste maniere l'arrest entre en son osche par ung ressort qui prise tousjours dessus, et quant la destente frape dessus a l'aultre bout elle le fait yssir de son osche (Traité d'horlogerie Z., c.1380, 278).

 

3.

[Avec un compl. d'objet interne] Frapper (qqn) (à qqn) un coup/un horion : ...eulx trois ensamble (...) trouverent en leur chemin, environ heure de prime, un homme que ilz ne cognoissoient, auquel homme ilz demanderent de l'argent, lequel fu refusant de leur en bailler ; pour lequel reffus ilz lui donnerent et frapperent, c'est assavoir : ledit prisonnier et sondit frere chascun un coup de baston, et ledit cordouennier un coup de coustel (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 216). Ces Escos portent haces par usage, dont il donnent et frapent trop biaus horions (FROISS., Chron. D., p.1400, 781). Et print d'un de ses gens son espée, et ledit Seignet miz à genoulx près du graphier, frapa IIJ grans couz ledit Roy sur le doz dudit Seignet (BAYE, II, 1411-1417, 244). Et lors monseigneur du Maine, monseigneur l'admiral de Montauban, le seigneur de la Barde et autres cappitaines qui bien avoient de VII à VIIIc lances, se retrahirent et s'en alerent et habandonnerent ainsi le roy, et, à ladicte journée, nul des dessusdiz n'y frapa un seul cop ; et, à ces moiens, le champ demoura ausdiz Bourguignons. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 67).

 

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Prov. Celui a grand avantage qui peut frapper les premiers coups : ...et dit on communement que cellui a grant advantage qui peult frapper les premiers coups. (JUV. URS., Verba, 1452, 229).

B. -

P. anal.

 

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[D'une chose] (Se) frapper à/contre qqc. "Heurter qqc." : ...l'estourbillon (...) se vient en la nef frapper (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 48). ...laquelle fleche frapa a un perier, et par fortune esclissa et vola au contraire du lieu où estoit ladicte poule et droit à la femme dudit Leu (Chancell. Henri VI, L., t.1, 1423-1426, 132). Et les glaces firent de grans dommaiges, car ilz rompirent et emporterent grant quantité de basteaulx, dont partie s'en alerent frapper contre les ponts Nostre-Dame, Sainct-Michel, d'icelle ville de Paris ; lesquelz bateaulx sauverent plusieurs grans heurs que eussent fait lesdiz glaçons contre lesdiz ponts, qui furent en bien grant dangier d'estre abatus. (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 104).

 

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[D'un phénomène atmosphérique, climatique]

 

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Frapper qqn. "Donner contre qqn, heurter qqn" : Et monta uns tels vens que à paines pooient il tenir leurs chevauls et si fors, qui les frapoit parmi les visages, qu'il n'y avoit tant joli qui ne fussent si vain de le pleuve et dou vent que merveilles. (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 40). Tantost que Appolo eut finé sa priere, soudainement un grant tourbillon de vent le frapa ou visage et le rendy si esperdu qu'il ne sçavoit qu'il luy estoit advenu. Et estant en ce ravissement, il luy sambla que le dieu Mars luy dist : "Appolo, Appolo, tes prieres sont presentees ou ciel des dieux..." (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 177).

 

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Empl. abs. : ...Compaignie commença a appeller les deux tresdoulces et plaisans marinieres. Si se leverent et varerent en mer leur barque qu'avoient mise en une calle en terre, c'est assavoir en ung lieu coy ou le vent ne peut frapper, comme en ung port (RENÉ D'ANJOU, Cuer am. espris W., 1457, 108).

 

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Frapper dans qqc. "Exercer une action sur qqc." : Premierement, se le vin est pourry, il doit mectre la queue en yver enmy une court sur deulx traicteaulx, afin que la gellee y frappe, et il garira. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 133).

 

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[D'un phénomème acoustique] "Atteindre, toucher (les oreilles de qqn)" : Mais il sembleroit que se me seroit ung deshonneur et reproche se je ne disoie autre chose, veu que j'ay esté serviteur et officier de vos ayeul et pere dont Dieu ait les ames, et de vous, et que en vostre jeune aage de moy aviés congnoissance, vous exposeray et diray une chose qui me est survenue a deux lieuex d'icy en venant vers vous, d'une maniere de vent ou de voix qui me frapa aux oreilles, en disant, Hic est vir quem dixeram tibi ["C'est l'homme dont je t'avais parlé"], qui sont les parolles que Dieu dit a Samuel pour sacrer et enoindre Saul, roy des enffens de Israel (JUV. URS., Prop. II, 1468, 428).

 

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MÉD. [D'un aliment] "Avoir une action violente et soudaine (sur un organe)" : ...il n'est rien qui tant frappe la teste ne tant conduyse les matieres au cerveau comme le vin (PREVOST, Cir. Guill. Salicet, 1492, II, 1).

 

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[D'une maladie] "Atteindre, toucher qqn" : ...car pour seignée ne pour cristoire, ne pour bonne garde, nul ne nulle qui fut frappé de la boce qui pour lors couroit n'en povoit point eschapper, senon par la mort (Journal bourgeois Paris T., 1405-1449, 295).

 

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[D'une chose susceptible de transmettre une maladie] : Pluiseurs du païs, desirans qu'il fust mort, aucunement de loing pour veoir s'il avoit rendu l'ame ; dont il advint que, quant ilz estoient frapez de la fumee du corps, soudainement moroient. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 120).

C. -

"Atteindre qqc./un lieu plus ou moins rapidement"

 

1.

[D'une pers.] Se frapper qq. part. "Se précipiter, s'élancer qq. part" : Se baudement il fuissent venu, ensi qu'il chevauçoient et yaus frapé en ces logeis, li pluiseur supposent que il euissent desconfi le connestable et ses gens. (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 109). "Qui m'aime, si me sieuche, car je m'en irai combatre." Adonc se frappa en l'iauwe qui estoit au plat, mais li flueves revenoit. (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 84). "Sallons hors et nous frapons en la qeue de ces alans. Nous lor porterons damage et ramenrons des prisonniers." (FROISS., Chron. D., p.1400, 470). Et quant il fust a Romme, sans plus attendre, se frappa en l'esglise de saint Pierre. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 101).

 

2.

[Domaine militaire]

 

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Se frapper (par) dedans une armée/une mêlée. "Se lancer violemment dans" : La lanche a abaissie et puis se va fraper Par dedens la bataille (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 230). Et d'ilecques, sans soy rafreschir ou que bien peu, et sans attendre toute sa compaignie, qui estoit pour gens à cheval la plus belle et mieulx en point que onques avoit esté veue par avant pour autant de gens qu'il y avoit, se vint fraper et bouter dedens l'armée desdiz Bourguignons. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 65). Frappez dedans [les Anglais] comme ung sanglier Et que vostre povoir tout passe. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 171).

 

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Se frapper en qqc./qq. part. "Pénétrer en force dans qqc." : Et se partirent, elle et ses gens, et s'en vinrent par derriere bouter et fraper ens es logeis des François, qui n'estoient pour l'eure gardé que de varlés et garçons (FROISS., Chron. D., p.1400, 514). ...il pour emploier sa force comme ung quarreau d'arballestre se frapa ou le tournoiement se faisoit et sur les chevaliers du conte d'Armignac s'espandy par telle facon, qu'il en abatty plus de dix avant qu'il cessast. (Jehan d'Avennes F., c.1465-1468, 86).

 

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Venir se frapper/à frappant/en frappant (qq. part) : "Et si tretost que vous arés assamblé à yaus, nous venrons sus ele en frapant, et les metterons jus." (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 111). Droitement sus le point de celle desconfiture, evous venir à frapant monsigneur Hue de Chastillon et se banière. (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 187). Li archier (...) laissierent passer les gens d'armes, liquel, lances abaisies, s'en vinrent frapant en ces logeis, boutans tentes et trefs par terre, mehagnans et ocians honmes et metans en grans meschiés (FROISS., Chron. D., p.1400, 619).

D. -

Au fig.

 

1.

Frapper un coup sur une chose abstr. "Nuire à qqc., faire du tort, porter atteinte à qqc." : ...pour riens je ne vouldroye souffrir fraper quelque coup sur leurs privileiges (Lettres Louis XI, V., t.4, 1469-1472, 102).

 

2.

[Domaine des sentiments]

 

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Frapper le coeur de qqn. "Toucher, atteindre le coeur de qqn" : Amours, vous venistes frapper Pieça mon cuer, sans menacer (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 152).

 

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Frapper le coeur de qqn en desir de + inf. "Susciter chez qqn le désir de" : Et si bien fut faite a l'aventaige de ses membres, procedans en toute beaulté et pareillemant en toute plaisance amoreuse qu'elle frappa le cuer de pluseurs en desir d'avoir son amour, tant estoit plaisant et belle, et par especial Charles l'empereur, combien qu'il fut cassé et ancien. (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 171).

 

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(Estre) frappé d'une chose abstr. "Être touché, atteint (par tel sentiment)" : Adont Sagece l'atrempee, Sanz de nulle ire estre frapee, Respondi moult rassisement Et dist : Dieux, ma dame, comment Me blasmez vous dont n'ay retrait Le monde du mal ou il trait ? (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 129). Frappé en l'oeil d'une clarté terrible, Attaint au cuer d'eloquence incredible, à humain sens difficile à produire, Tout offusqué de lumiere incendible Oultre perchant de ray presque impossible Sur obscur corps qui jamais ne puet luire, Ravy, abstrait, me treuve en mon deduire En extaxe, corps gisant à la terre, Foible esperit, perplex à voie enquerre Pour trouver lieu et opportune yssue Du pas estroit où je suis mis en serre, Pris à la retz qu'amour vraie a tissue. (ROBERTET, Oeuvres Z., c.1450-1500, 128).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Pierre Cromer

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