A. -

MÉD. [et langue cour.] "Délire violent provoqué par des humeurs dont les fumées montent au cerveau, syndrôme fébrile accompagné de troubles mentaux" : Et sicome sovent avient qe luy homme est par fieblesce de naufreure ou de maladie si hors de sens qe nul bien ne siet, mes male ferroit s'il pouoit - et c'est une frenesie de qi homme est mult sovent en peril de mort - et qei ferra donqes luy meistre ? Il prendera une rouge cook et le fendra et deffaira tout et le [tirera] en large, et tout chaude ou tout le sank le doit homme mettre sur la teste au frenetik et ou toutz les plumes, et par celle medicine est luy homme sovent garriz de la frenesie. (HENRI LANC., Seyntz medicines A., 1354, 161). Quant frenasie survient en pleuriplemonie, c'est mauvaiz signe. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 97). ...pour cause d'aucunes herbes ou d'aucunes melodyes, il pourret prendre si grant plaisir et si grant ebastement que il seroit de tous poins gueris et hors de sa frenaysie. (Songe verg. S., t.1, 1378, 391). ...une orrible et perilleuse maladie qui est appellee frenesie en la teste et est engendree de sang habondant et d'une colere ardant dont les fumees montent en la cervele et l'entendement est tourblé (MÉZIÈRES, Vertu sacr. mar. W., c.1384-1389, 236). Il fut dit dessus que frenesie aucunefois est engendree de grant dolour et desplaisance et de grant melencolie et aucunefois de sang habondant et corrumpu mellé avec colere embrasee, dont les fumees montent a la cervelle, et en pert on le sens aucunefois tout et aucunefois en partie. (MÉZIÈRES, Vertu sacr. mar. W., c.1384-1389, 284). Paralisie, qui debrise, C'est gloutonnie, au friant vueil ; Frenasie si est orgueil ; La medecine est penitence (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 112). Les signes presens c'est douleur du front, aparence de tampes ardans, petite frenesie, turbation de pensee (GORDON, Prat., c.1450-1500, I, 5). Frenesis, c'est une apostume chaude engendree es pannicles du cervel (GORDON, Prat., c.1450-1500, II, 21). Se c'est de cole la douleur est intollerable qui maine aulcuneffois pres de frenesie avec pointure et mordicacion par veilles et sans repos et male souffrance du patient (GORDON, Prat., c.1450-1500, III, 10). Aulcuneffois elle est envoyee au cervel ; le signe c'est frenesie et alienacion ; aulcuneffois va es nerfz : le signe c'est spasme ; toutes ces delegacions sont tresmauvaises (GORDON, Prat., c.1450-1500, IV, 9). La cephalique evacue le sanc des parties du col jusques en amont, et pour ce vault la saignié de la cephalique es passions de la teste - comme en migraine, et en manie, en frenesie, es aultres maladies de matiere chaulde. (Rég. santé corps C., 1480, 167). Cestui, avecque la concordance de plusieurs, prenostica de la frenaisie qui courut l'an mil IIIIcIIIIxxII, dont plusieurs se precipiterent à Lion et ailleurs et de moult riches et jeunes, tant Florentins, Genevois et François. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 160 r°).

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[Manifestations de la maladie] : ...et telles personnes estans en frenesie dient communaument toutes choses qui leur viennent a la bouche et ont perdu vergongne et vray jugement des choses qui leur sont presentees. (MÉZIÈRES, Vertu sacr. mar. W., c.1384-1389, 236). ...lors telle personne par la permission divine chiet en frenesie, et li semble que tout ce qu'elle dit soit verité et que l'omme soit mué en cheval et la farine en biau ble. La dolour est en la teste et en la fantasie qui juge de blanc noir. (MÉZIÈRES, Vertu sacr. mar. W., c.1384-1389, 236). C'est comme l'enchanteur du dyable qui fait apparoir ce qui n'est pas, dit de blanc noir et de noir blanc, et tourne en folie et frenesie ceulx et celles qui le recoivent, quer il occist Verité (GERS., Annonc., a.1400, 234). Nous veons bien aussy en frenesie que le malade cuide veoir voler mouchetes souvent devant lui ou que il y ait pailletes ou festuz ou aucunes telles choses et y gette les mains aucunefois et les desire a prendre, si comme Ypocras dit en Prenostiques et Galien aussy. (EVR. CONTY, Harm. sphères H.P.-H., c.1400, 96-97). Il [Pathelin, qui contrefait le mourant] s'en va. Oncques tel tempeste Ne ouÿstes ne tel frenaisie. Il est encor en resverie : Il resve, il chantë, il fatroulle Tant de langaiges, et barbouille. Il ne vivra pas demye heure. (Path. D., c.1456-1469, 122). ...lequel [Marcial d'Auvergne], après qu'il ot esté marié trois sepmaines avecques une des filles de maistre Jaques Fournier, conseiller du roy en sadicte court de Parlement, perdi son entendement en telle maniere que, le jour Saint-Jehan Baptiste, environ IX heures de matin, une telle frenesie le print qu'il se getta par la fenestre de sa chambre en la rue, et se rompit une cuisse et froissa tout le corps, et fut en grant danger de mourir, et depuis persevera longuement en ladicte frenesie, et après se revint et fut guery. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 161).

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Entrer en frenesie. "Devenir fou" : ...an l'eure aparut por ce Que il antra an frenisie, Dont il n'isi puis an sa vie. (Renart contref. R.L., t.2, 1328-1342, 229). Comment le conte Willaume de Haynau entra en frenesye et perdy sens et memoire (LE BEL, Chron. V.D., t.1, 1358, 243). O, dur et tramblant espoir ! Cy me fault entrer en frenesie, car cest oyseau est messagier de mort ou de male adventure. Vecy trop mal venu ! J'ay mes veines toutes vuides de sang. (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 147). Quant il eut ce fait et il congnut qu'il avoit tué son frere et fait mourir sa dame, qu'il aymoit autant que soy meismes, il entra en si grant frenesie et desplaisir de cueur que il se desespera et se tua lui-meismes. (BUEIL, I, 1461-1466, 127). J'entray en ma grant frenaisie Et fis a Cayn par envie Occire son frere Abel (Myst. st Laur. S.W., 1499, 160).

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[À propos d'un animal] "Furie particulièrement violente" : ...et incontinant, souldainement commença ledit cheval à rentrer en sa frenesie ou challeur, et se print à ruer, saulter et prandre le mors aux dans, tellement que ledit suppliant ne le pot tenir (Doc. Poitou G., t.11, 1466, 60).

B. -

P. ext.

1.

"Agitation violente, état d'excitation" : Viers li ne m'ozeroie nullement amonstrer, Car en se frenezie me poroit ja tuer. (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 659). S'Abilans de Damas avoit nouvielle oïe Que vous fussiés enssy en telle frénésie, Il isteroit sur vous, banière desploiie (God. Bouillon R.B., t.3, c.1356, 300). Les melodies sunt morales qui disposent a bonnes meurs. Et celles sunt celles du meuf appellé doriste. Et celles sunt pratiques qui purgent d'aucune passion, si comme de ire ou de frenesie. (ORESME, Pol. Arist. M., c.1372-1374, 355). Je fui yer en tel frenesie Que je cuiday bien enragier, Pour une nonnete jolie Que je requeroie d'amer. Mais toudis, pour moy refuser, Me disoit d'une vois bassete : "Alez, à Dieu ; l'aumosne est faite". (MACH., App., 1377, 648). Si se bouta en une bien grande frenesie et parfonde melencolie, dont il ne valut pas mieulx [Il s'agit d'un marchand qui vient d'apprendre que sa femme le trompe. Le cont. semble l'opposer à melencolie, l'homme passant de l'excitation à l'abattement, deux états également préjudiciables pour lui]. (C.N.N., c.1456-1467, 319). Puys va et vient, tourne et retourne, Penssant, chaityf et trestout morne [l'amant délaissé], Se complaygnant fort de s'amye. Lors yl entrë en frenaysie, Je te promet, bien largement, Et te dy sy sainglantement Qu'il en devient fol en la fin (Lord. Tart Ab. L., a.1465, 165). ...Aucuns mutins mirent sus deux alarmes, Mais toutesfois en fin ce ne fut riens, Ce neantmoins que tous furent en armes Et cuyda l'on faire de grans vacarmes Par le moyens de quelque frenaisie, Souspeçonnee mauvaise fantasie Que sur Françoys eurent aucuns patrons (LA VIGNE, V.N., p.1495, 221).

2.

"Folie furieuse, attitude totalement déraisonnable" : Vecy une grant pugnaisie, Orde, deshonneste et infecte ; D'ou procede tel frenaisie Qu'on dit Jhesus estre prophete ? (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 481).