C.N.R.S.
 
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     ENSERRER     
FEW XI serare
ENSERRER, verbe
[T-L : enserrer ; GD : enserrer ; GDC : enserrer ; AND : enserrer ; DÉCT : enserrer ; FEW XI, 500b : serare ; TLF : VII, 1186a : enserrer1]

A. -

"Enfermer"

 

1.

Enserrer qqn

 

a)

"Enfermer, emprisonner qqn" : LE JUGE. Or tost, Tristan, leens l'enserre [la prison], Si qu'elle n'ysse. (Mir. enf. ress., 1353, 40). Pour ce que Manassès erra, Nostres sires si l'enferra En Babiloine ou enserrez Fu, si loiez et enferrez, Que ci li sambloit uns enfers, Tant estoit liëz et en fers. (MACH., C. ami, 1357, 57). Quant li soudans sot la nouvelle Qu'Alixandre, sa cité belle, Estoit einsi prise et gastée, Il commanda, sans demourée, Que tous Crestiens en sa terre Fussent pris, et qu'on les enserre Et qu'il soient emprisonné, Mal traitié et fort rensonné. (MACH., P. Alex., p.1369, 115). Li roys commanda qu'on l'enserre, Et qu'on le mette estroitement Uns fers en ses piez, telement Et si pesans qu'il ne s'en vole, Car mettre le vuet en géole, Ou apenre un autre mestier, Dont cure n'avoit, ne mestier. (MACH., P. Alex., p.1369, 258). De par l'empereur, Ypolite, Vous baillons cest homme prison, Et dit qu'en la pire prison Qu'arez soit enserrez et mis. (Mir. st Lor., 1380, 184). Et quant Gieffroy sent le coup, qui fu durs et pesans, si le fery d'estoc de l'espee enmy le pitz, tellement qu'il lui bouta tout dedens jusques a la hendure. Et le jayant getta un moult horrible cry et chiet mort. Et quant ceulx qui furent enserrez en la treilleisse de fer le virent, si s'escrient a haulte voix en disant : Nobles homs, benoite soit l'eure que tu nasquis. Pour Dieu, oste nous de cy. (ARRAS, c.1392-1393, 267). Hebert Camus, procureur commiz par la Court à ladicte cause d'appel, dit qu'il n'a peu parler audit Gayant, ou Chastellet, car il est enfermé et enserré (BAYE, I, 1400-1410, 252). Ainsi fus la enserree, Et ja estoit nuit serree, Si huchay de la lumiere, Pour le dueil qui anuy m'iere Veoir s'en fusse delivre (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 9). ...luy voulut monstrer ung prisonnier qu'elle tenoit en ung tressecret lieu encloz et enserré. (C.N.N., c.1456-1467, 198).

 

-

[Dans un cont. métaph.] : Et si est de moult près gardée Et en moult fort lieu enserrée [var. enserres] Ceste joie, sans nul sejour, Car adès, de nuit et de jour, Gardée est de sis adversaires Qui tuit au donner sont contraires : Ce sont Dangier, Paour et Honte, Durté et Cruauté (...) et Doubtance de mespresure. (MACH., D. verg., a.1340, 36). Si ne vous doy autre merci requerre Fors tant qu'Amours mon cuer mais ne desserre, Qu'est enserrez En vo prison où il n'a clef ne serre... (MACH., Compl., 1340-1377, 261). Einsi me vueil porter en ceste guerre Et sagement dedens mon cuer enquerre Se j'en porray par Dous Penser acquerre Joie et deduit, Et par Espoir, que je tien clef et serre Qui Dous Penser en cuer d'amant enserre, En attendant Morpheüs qui tost erre Et vient de nuit. (MACH., F. am., c.1361, 176).

 

-

Empl. pronom. S'enserrer. "S'enfermer" : Si furent là jusques à mienuit. Et n'eut mies li rois conseil que il y demorast ne s'ensierast là dedens : si but un cop (...) Et puis s'en partirent. (FROISS., Chron. L., III, c.1375-1400, 185).

 

-

Part. passé en empl. subst. : ...C'est des prisons li delivrerres, C'est des pecheurs li vrais sauverres ; C'est cils qui les signes horribles Fait, et merveilles impossibles En ciel, en eaue, en mer, en terre ; Les pris et enserrez desserre, Qui Daniel a sauveté A dou lac aus lions geté. (MACH., C. ami, 1357, 46).

 

-

Au fig. Estre enserré. "Être à l'étroit"

 

.

Estre enserré de qqc. "Être à l'étroit en ce qui concerne qqc., manquer un peu de qqc." : Et dictes au roy que s'il estoit enserré de tapisserie, vaixelle d'or ou d'argent, nous en avons assez pour nous et pour luy, et si luy en fault (...) venez le nous tantost dire, et nous ferons arrester devant son palaix dix ou douze chariotz chargez que bien le forniront. (Jehan de Paris W., 1494-1495, 53).

 

b)

"Encercler, serrer de près" : "Ilz furent enclos et enserrez (...) de ceulx que nous appellons les communautez de nostre pays, par telle maniere que on frapoit et fieroit sus eulx de haches et de plommées sans eulx espargnier." (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 286).

 

c)

[À propos de lions déchaînés, lancés sur saint Ignace et qui le dévorent] : Dedans leurs ventres enserré Moult tost l'aront. (Mir. st Ign., 1366, 112).

 

2.

Enserrer un animal. "Tenir en serre, enfermer" : Item, et j'adjoinctz a la crosse Celle de la rue Saint Anthoine Ou ung billart de quoy on crosse, Et tous les jours plain pot de Seine Aux pigons qui sont en l'essoyne Enserrés soubz trappe voliere, Mon miroüer bel et ydoyne Et la grace de la geolliere. (VILLON, Lais R.H., c.1456-1457, 25).

 

3.

Enserrer qqc. "Enfermer qqc." : Ha ! mort, com par toy enserrez Est mon cuer en dure tristesce ! (Mir. Amis, c.1365, 65). ...et non pas ainsy estre en prison retenues [les richesses du monde] ne mucies en terre ou ailleurs enserrees (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 284). Il n'est chose tant agreable, Car la n'est pas joye enserree. (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 107). Mais s'elles se fussent tenues plus fieres et eussent tenus enclos et enserrés leurs merites et leurs guerredons dedens les secretes fermetez de leurs cuers qui de tant sont assaillis que c'est ung impossible aelles deffendre, jamais la chevallerie ne fust si tost departie de moy. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 146).

B. -

"Renfermer, contenir" : ...le souverein roy celestre Qui est dou ciel seigneur et mestre De l'air, de la mer, de la terre, Et de quanque la nue enserre... (MACH., C. ami, 1357, 31). Puet on penser chose plus digne Ne faire plus gracieus signe Com d'essaucier Dieu et sa gloire, Loer, servir, amer et croire, Et sa douce mere, en chantant, Qui de grace et de bien a tant Que le ciel et toute la terre Et quanque li mondes enserre, Grant, petit, moien et menu En sont gardé et soustenu ? (MACH., Prol., c.1377, 9). Dame de ciel, dame de terre, Dame qui tout clost et enserre Sus et jus, sans division... (LE PETIT, Champ d'or L., c.1388-1392, 136). Parfonde tristesse enserree, Comment soustenir te pouray ? (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 338). Aveugle d'obscure ignorance, Qui prens en ces dieux esperance Qui ne sont riens que pierre et bois, Et ton createur ne cognois Qui a formé et ciel et terre, Et aussi tout ce que encerre ; Qui par sa vertu et puissance Nous maintient, et par sa clemence Nous ministre imitacion Et donne benediccion (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 78).

C. -

Au fig. "Serrer fortement" : ...j'estoye ja tout hors d'alaine, Tant avoye le cueur enserré. (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 359). DOYEN. Douleur me poinct, soucy me serre, Chagrin m'assault si fait tristesse, Desplaisir cueur et corps m'enserre Par grant desconffort et destresse. (LA VIGNE, S.M., 1496, 558). On dit que pleurs viennent de cueur failly, je ne sçauroye certes, car mon cueur est trop enserré. (Beufves Hant. I., c.1499-1503, 41).

 

-

"Serrer d'angoisse" : Elle fut tant fort enserrée à la voix de son mary que a pou que son loyal cueur ne failloit (C.N.N., c.1456-1467, 25).
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

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