Empl. trans.

A. -

[D'un animal] "Mettre dans sa gueule, prendre à pleine gueule" : Le serpentel aussi recercelé ou le dragon qui engoule sa queue segnefie les ans et la duracion de nostre vie humaine (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 68). Et les poissons dedens la mer Puet on veoir souvent armer Et fort hericier leurs arestes : C'est pour n'estre engoulé es testes Des grans poissons qui devourer Les veulent et eulx acourer (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 17). ...en chacune d'icelle chausses a ung cabillau qui angoulle une jambe (Comptes Lille L., t.2, 1427, 385).

B. -

P. ext. "Avaler, dévorer, engloutir" : Si la mort qui trestout engoulle, Tenoit ung homme par la goulle Et tous ses membres fussent mors (...) Esperance adez lui diroit Que il tresbien eschaperoit (Renart contref. R.L., t.2, 1328-1342, 174). [Dieu] Fist la mort issir de sa cage, Pleinne de forsen et de rage, Sans frein, sans bride, sans loien, Sans foy, sans amour, sans moien, Si trés fiere et si orguilleuse, Si gloute et si familleuse, Que ne se pooit saouler Pour riens que peüst engouler. (MACH., J. R. Nav., 1349, 149). Hee ! Sathanas, tresvil, tres(h)ors, Tu nous as mis tous au dehors De nostre grant prosperité ; Tu nous as bien le dox frotté, Trestou'chïé plux vil que boe ; Tu nous as bien faicte la baboe, Oncques nul ne te poux saouller, Tu cuidoie tout engoler. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 245). ...l'une [des divisions politiques] se nomme Ouc et l'autre Cabillau, dont le nom de l'un signifie un poisson qui a un grand engoulement et large, et l'autre signifie un engin de fer crochu et très-agu, par lequel il se prend et se estrangle. Et peut-estre qu'ils y ont aucun entendement de mistère en cecy, et est bien vraysemblable, comme si l'on voulsist dire que l'un contend à tout engouler, et l'autre à faire estrangler les engouleurs. (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 210). Mais toy certainement, tu es ung droit Cerberus, qui est portier d'enfer, car tu engoulles tout. (ROB. HERL., Déb. fauc. lévr. H., c.1470-1500, 31). Une foiz la mort tout engoulle ; Y nous convient tous la passer. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 406).

C. -

P. anal. [À propos d'une pièce de charpente] Engouler qqc. à qqc. "Introduire, enfoncer qqc. dans qqc." : ...audis renés sont engoulés les chevrons dudit et parties d'iceux des deux lairesses. (Trés. Reth. S.L., t.2, 1409-1410, 609).

-

[D'une pièce] Engouler qqc. "Bloquer qqc." : Item leur fault avoir un autre engin, qu'on appelle loup, auquel a ung fer courbé, qui très fortes dens a et agües, qui soit assiz de telle manière sur le mur qu'il vienne engouller le tref du mouton et le tiendra si fort qu'il ne pourra tirer n'avant n'arrière (BUEIL, II, 1461-1466, 52).

D. -

Part. passé en empl. adj. [D'un mets] Engoulé. "Préparé de façon agréable à avaler (de façon gouleyante) (?)" : Oiseaulx de riviere a la dodine, ris engoulé, bourees a la sausse chaude et anguilles renversees. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 175). [Autres occurrences de ris/riz engoulé, p.179, 182 et 248 ; cf. DEAF]