A. -

"Augmenter le prix, augmenter de prix ; p. ext. augmenter"

1.

Au propre

-

Empl. trans. "Augmenter le prix de, rendre plus cher" : Item, qu'il pourvoie aux marchandises et manouvrances que l'en encherit exessivement, soubz umbre de la mutacion de la monnoie (FAUQ., II, 1421-1430, 109). ...en defendant aux seigneurs d'icelles maisons, sur certaines peines à appliquer à nous, qu'ilz ne les louent dores en avant à or, et ne les encherissent oultre le dit pris raisonnable (Doc. Poitou G., t.7, 1425, 422).

-

Empl. intrans. "Augmenter de prix, devenir plus cher" : ...Souvent mengoit mauvaise char, Car la geline est enchierie (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 172). ...pour les guerres sont maint bon vivre enchiery, Mais qui a de l'argent, partout est bien chevi. (CUVELIER, Chans. Guescl. F., c.1380-1385, 380). ...toutes denrées (...) encherissent tresfort de jour en jour (FAUQ., III, 1431-1435, 166). ...car oncques vivres n'y [à Paris] enchierirent, mais y amenderent, et n'y eust personne (...) qui ne trouvast ses neccessités par emprunt ou aultrement (JUV. URS., Loquar, 1440, 357). LE DRAPPIER. Ha ! vous ne sçavés Comment le drap est encheri ! Trestout le bestail est peri Cest yver par la grant froidure. (Path. D., c.1456-1469, 70). ...car lesdiz Bourguignons, Bretons, Calabriens, Bourbonnois, Picars et autres ainsi estans devant Paris que dit est, que on estimoit à bien Cm chevaulx, après l'appoinctement fait, et ceulx de Paris, qui estoient trois foiz plus, furent tous fournis et nourris des biens de ladicte ville par moult grant espace de temps et sans riens encherir, et après leur partement y fut encores beaucop meilleur marchié que devant n'avoit esté. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 124). Riens ne encherist que le pain, d'un denier seulement sur pain. (COMM., I, 1489-1491, 58).

-

En partic. "Augmenter le prix de qqc. par enchère" : ...la dixme de Naintré, qui par ung nommé Ligneteau a esté mise ceste annee a VI xx livres, et encherie par Ricardon de X livres... (Reg. Poitiers F., t.2, 1460, 125).

-

Part. passé en empl. adj. au fig. "Rendu trop cher, rendu inaccessible" : Li doulz parler, plein de toute douçour, Li tres dous ris et li regart joli, Par qui mes cuers soloit estre en baudour Par promesse de joie et de merci De ma dame, me sont si enchiery Que je ne say mais dont joie me veingne, Qu'Amours ne veut et ma dame ne deingne. (MACH., L. dames, 1377, 141). Merci vous pri, ma douce dame chiere, Qu'a moy ne soit par vous joie enchierie. (MACH., Rond., 1377, 570).

2.

P. ext. "Augmenter"

-

Encherir en danger de sa personne. "Aggraver son cas, augmenter ses risques" : Après le serement par luy fait de dire vérité, a dit que véritablement en ses autres confessions précédentes faictes par devant nous il ne a osé dire ne depposer vérité doubtant enchérir en aucun dangier de sa personne, en me requérant avoir pitié de luy. (Aff. Jacques Coeur M., 1453-1457, 176).

-

Part. passé en empl. subst. [À propos d'une chose concr.] Encherie. "Ce qui est mis en plus, accroissement" : ...auprès de la dicte maison une chambre (...) avec le comble de XIII a XIIII piez de lé ou environ [avec] toutes les encheriez qui y appartiennent (Comptes Archev. Rouen J., 1438-1439, 188).

B. -

"Tenir cher, chérir, aimer" : Dont, se ma dame a plaisance et desir De moy laissier pour un autre enchierir, Ce fait Amour, Nom pas ma dame, en qui tout a valour ; Car elle fait son devoir et s'onnour D'obeïr a son souverein signour. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 85). Et quant les dames en ooient Le bien dire, et si l'i trouvoient, Plus les en devoient par droit Encherir selonc leur endroit. (MACH., D. Lyon, 1342, 209). N'ot plus belle de lui jusques en Aumarie, Li roy l'ammoit forment, mont l'avoit encherie (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 252). ...la tourteruelle est comparé à Florie, C'uns aultres chevaliers l'ara sy enciérie, Que l'escouffles venra en faire départie. (God. Bouillon R.B., t.3, c.1356, 263). Belle et bonne, sans folour, D'onnour Vous ha Diex si enrichi Que vous estes de valour La flour ; Pour ce vous ay encheri. (MACH., Ch. bal., 1377, 596). Nompourquant je me defri Seulette et gemi Souvent à face esplourée, Quant lontainne sui de li Qu'ay tant enchiery Que sans li riens ne m'agrée. (MACH., Ch. bal., 1377, 631). Et certes, dame honnourée, S'il estoit einsi, Mes las cuers sans demourée Partiroit par mi, Qui tant encheri Vous a qu'en mal desirée Ne serez de mi. (MACH., L. dames, 1377, 31). Si n'en puis mais, se je m'en plaing et dueil ; Car ailleurs voy donner et departir Les tres dous biens que de li avoir sueil, Et à grant tort les me voy retollir Et moy guerpir pour un autre encherir. (MACH., L. dames, 1377, 69). ...onques [Narcisse] entendre le depri Ne deingna d'Echo, qui pour li Reçut mort amere et obscure. Mais bonne Amour d'amour seüre Fist qu'il ama et encheri Son ombre et li pria merci, Tant qu'en priant mori d'ardure. (MACH., Motés, 1377, 496).

-

Encherir qqn sur tout/sur tous autres : ...loyal ami esleü, De leur dame amé et cheri Et sus tous autres encheri. (MACH., D. Lyon, 1342, 212). Merci vous pri, ma douce dame chiere, Qu'à moy ne soit par vous joie enchierie, Pour ce que l'ay moult comparée chiere, - Merci vous pri, ma douce dame chiere - Et s'Amours vuet que l'aie à lie chiere, Pour ce que j'ay vous seur tout enchierie. (MACH., Rond., 1377, 570).

V. aussi encherissant