Empl. trans.

A. -

Au propre

1.

Empoisonner qqc. "Jeter des substances venimeuses dans qqc. (l'eau, la nourriture...)" : Pour les yaux qu'il anpousonnerent... (Renart contref.,, 1ère réd. R.L., t.2, c.1319-1322, 207). ...Judée la honnie, La mauvaise, la desloial, Qui bien het et aimme tout mal, Qui tant donna d'or et d'argent Et promist a crestienne gent, Que puis, rivieres et fonteinnes Qui estoient cleres et seinnes En pluseurs lieus empoisonnerent, Dont pluseurs leurs vies finerent ; Car trestuit cil qui en usoient Assez soudeinnement moroient. (MACH., J. R. Nav., 1349, 145). Regnaut de Poilly (...) accusé de ce que l'en dit contre lui, que il est cause, consentant et principal, de empoisonner les eaues des puis, fontennes et autres lieux, parmy le royaume de France, examiné sur ce (...) confesse que il est coulpable et consentant dudit fait (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 436). ...ledit Martin (...) confessa audit prevost que il avoit empoisonnez quarante puis, dont le puis au sire de Mezvillier est l'un (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 451).

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Part. passé en empl. adj. "Infecté de poison" : Et la pire en toute manière, Est air infect empoisonné Pour ce qu'il est mixtionné Avec fumées venimeuses Et par autre fait vicieuses En leurs qualitez et nature (LA HAYE, P. peste, 1426, 47).

2.

Empoisonner qqn

a)

"Donner du poison à qqn, pour le faire mourir" : En mon cuer un fait proposay Que de vous gehir propos ay, Et fu de vous empoisonner Et elle (Mir. Berthe, c.1373, 219). Et la propre nuit que la maladie le prist, il avoit souppet en grant reviel avoecques damoisselles de la ville, pour quoi li aucun voellent dire et maintenir que il fu là enpuisonnés. (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 190). ...icellui hermite lui dist à part qu'il, et deux autres hermites en sa compaignie, estoient venuz naguieres à Paris pour vouloir enpoysonner le roy et mons. de Touraine, en la compaignie du chevalier qui estoit prisonnier au Louvre. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 311). ...li contes de Qent voloit enpuisonner le roi et faire morir (...) pour venir a la couronne d'Engleterre. (FROISS., Chron. D., p.1400, 183). ...au mire avoit commandé Qu'il l'empoisonnast (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 46). A home qui est enpoiseneis, medicinnez vraie : R. une herbe que on apelle simphoinnie, si en prendeis le pois d'on denier, si le destrenpreis d'orinne de feme, se li doneis a boire, si vomira tot le mal et le venin hors, et puis III plantes de cerfueilh et boive d'asne ou de chevre. (Méd. nam. H., c.1400-1500, 196). Pas ne serés enpoisonné. Laiséz moy mangier et bien vivre ; Jusques je soie saoul et yvre, Decy [l. De cy] mes ne me lieuveray. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 134). Il le faudroit empouesonner Et luy donner en traïson En son menger quelque poueson, Qui tout le cueur luy creveroit. (Myst. Viel test. R., t.2, c.1450, 294). Oudit moys d'octobre, advint à Tours que ung nommé Jehan Bon, natif du pays de Galles, qui avoit belle pension du roy, et qui l'avoit marié à une femme de Mante, qui avoit bien du sien, conspira par l'ennortement du duc de Bourgongne, comme il confessa, d'empoisonner et mettre à mort monsr le daulphin, ainsné filz du roy. (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 31). SATURNE. Faire le nous convient ainsi Affin que sans qua ne sans cy Empoisonne tout homme et femme. (Cene dieux, c.1492, 126). Il fut excellent arbolaire ; l'en a escript en ebrieu qu'il jugea la mort Antipater, qui tant avoit regné après qu'il ot empoisonné Alexandre. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 66 v°). ...auquel ledit duc avoit fait de si grans biens, sans l'avoir envers luy merité, et Jehan de la Roche, escuyer de cuysine de mondit seigneur de Guienne, qui estoit compaignon de ce malefice avecques l'abbé, comme meurtriers et faulx incidiateurs qui par poisons avoient empoisonné le très debonnaire et jeune prince monseigneur le duc de Guienne (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 285). ...le duc avoit esté empoisonné et maleficié par l'exprès commandement de celluy qui naturellement estoit tenu de l'aymer. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 285).

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Inf. subst. : Je dis devant le roy (...) Que le sien filz morut par vostre empoisonner, Et Ciperis cuidant a la mort condempner. (Cip. Vignevaux W., p.1400, 115).

b)

"Faire boire le philtre à qqn" : Cy devise comment Gerars, aprés ce qu'il fu empoizonné, fu ferus de l'amour Aiglentine (Gérard de Nevers M., c.1451-1464, 212).

B. -

Au fig. "Nourrir le mal dans (l'âme, le coeur...)" : C'est [le mensonge] ung venim qui tue et empoisonne l'arme (JUV. URS., Verba, 1452, 217).

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S'empoisonner le coeur : ...et lors murmure l'un secretement a l'autre et s'empoisonnent les cuers et serchent les voyes d'aultre seigneur avoir. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 13).