A. -

"Rond, cercle"

1.

[Comme figure] : Lors fist [le roi de Carthage] le cuir d'un torel prendre Et par terre le fist estendre, Et lignier par menues coroyes. L'un a l'autre apoindi et mist, Et puis aprez son cerne fist. [Le cercle ainsi tracé figure l'enceinte de la future ville] (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 91). Car je vi la tout en un cerne Viële, rubebe, guiterne, Leü, morache, michanon, Citole et le psalterion... (MACH., R. Fort., c.1341, 145). L'une est planiere souffisance, Puissance, immobilité, Reverence et jocundité. Annecxies [sont] de tel lien Que qui n'a les cincq, il n'a rien, Car ung est sans l'aultre impossible : C'est comme ung point indivisible Situé au milieu du cerne Qui tout esgallement concerne Le tour de la circunfferance.Moralité cincq pers. B., 1484, 45v (Moralité cincq pers. B., 1484, 45).

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En cerne : SATHAN. Je viens de circuïr la terre Et l'ay compassee tout an cerne Voir comme chascun se gouverne (Pac. Job M., c.1448-1478, 231).

2.

En partic. "Cercle tracé à l'aide d'une baguette par les praticiens de la magie (surtout pour invoquer les démons)" : ...Robers li Anglois et II moine alemant (...) machinoient en la mort du roy et de la royne (...) par invocacion du deable faire venir en un cerne qu'il firent es jardins de l'ostel de la contesse de Valoys. (Conf. Jug. Parlem. Paris L.L., 1340, 147). ...et le landemain, elle estant aus champs (...) recordant de la visitacion faite par elle audit de Ruilly, fist environ soy un cerne d'un baston que elle tenoit, se mist ou milieu d'icellui cerne, dist ces moz : In nomine Patris, et Filii, et Spiritus Sancti, et par plusieurs fois appella ledit Haussibut, afin qu'il venist parler à lui (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 293). ...et là fist .J. cerne avec pluriex caracteres et superstitions requises à faire telles invocationz de dyablez (COCHON, Chron. norm. B., c.1430, 225).

3.

[Comme espace qui entoure] : ...le mareschal (...) avoit fait entour lui a force de coups si grant cerne des mors et des abatus que nul ne l'osoit approcher pour le prendre (Bouciquaut L., 1406-1409, 113).

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"Halo (de la lune)" : En mon cueur ne puis trop penser Quel signifïance a en soy Ceste estoille que j'apperçoy Dessoubz le cerne de la lune. Ce n'est pas estoille commune, Car les autres, de commun cours, Luisent de nuyt et point de jours ; Et ceste a toute heure se monstre. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 73).

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"Cercle autour des yeux, cerne" : ...le cherne d'entour la prunele de l'eul (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 217).

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Au fig. : ...Quant bon besoing les induyt et prosterne Et qu'il affiert consister en leur cerne Gloire et honneur par effort immortel. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 138).

4.

[Comme parcours] "Parcours circulaire" : Après Nature commanda Aus quatre vens qu'elle manda Que chascuns fust aparilliez Pour tost courir, et abilliez, Et qu'il issent de leurs cavernes Et facent leurs mervilleus cernes, Si qu'il n'i ait resne tenue, En ciel, en terre, en mer, n'en nue, Qu'il ne soient a l'air contraire Et facent pis qu'il porront faire. (MACH., J. R. Nav., 1349, 147).

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Loc. fig. Faire son cerne et sa cherche qq. part. "Marquer sa présence qq. part (comme au centre d'un cercle)" : Or est Pluto enamourez, Mais la n'est gueres demourez, Eins va et vient et court et serche ; Partout fait son cerne et sa serche. (MACH., C. ami, 1357, 86).

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Faire leurs parts et leurs cernes. "Faire des assemblées et des cénacles (pour dire qqc.)" : Si n'y remaint ne fait ne couvenance Qui ne soit dit l'un a l'autre, et, trop plus Qu'ilz n'ont de bien, se vantent que reclus Sont devenus en la chambre leurs dames Dont sont amez, puis jurent corps et ames Comment du fait il leur est avenu Et que couché braz a braz y ont nu. Les compaignons ce dient es tavernes, Et les nobles font leurs parts et leurs sernes En ces grans cours de noz seigneurs les ducs, Ou chieux le roy (CHR. PIZ., Ep. dieu d'amours éd. M. Roy, Tome II, 1399, 5).

Rem. Traduction proposée par G. Roques (R. Ling. rom. 55, 1991, 280), qui ajoute "je préférerais voir dans parts (à lire parcs ? ) le mot parc tout en reconnaissant que part (cf. faire part) n'est pas impossible."

5.

[Comme cercle imaginaire]

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"Cercle imaginaire où l'on est enfermé, comme par magie" : Pour ce le souverain lien Esperitel, oy et retien, C'est la saincte exortacion, Que tu n'aies entencion De toy bouter dedenz ce cerne (DESCH., M.M., c.1385-1403, 41). ...Cil qui jangloit veult songier et soy taire, Et le songeart du joyeux contrefaire, Et si cuide chascun d'eulx le mieulx faire. Si les gouverne Et enyvre du vin de sa taverne Amours qui clos les tient dedens son cerne, N'ilz ne scevent huis, porte ne posterne Par ou saillir. (CHART., D. Fort., 1412-1413, 159). Les chevaliers respondirent : "Certes, sire, en n'en eust peu savoir de noustre estat, car nous estions en une fairie, boutez d'un grant geant, qui nous tenoit ainssi, qu'i estoit le plus grant et le plus fort que l'en sceust trouver. Et s'aucun fust venu la ou nous estions et il eust passé le cerne qui estoit fait, comme nous feismes, il estoit perdu comme nous !" (Charles de Hongrie C., c.1495-1498, 29).

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"Influence, emprise" : Je te pri, retien de m'escole Que la ou elle est, si bien sont, Et s'elle s'en part, il s'en vont, Et cui elle aide, il est aidiés, Cui elle laist, il est laissiez, Ce m'est avis ; car par son cerne Au jour d'ui chascuns se gouverne. (MACH., R. Fort., c.1341, 97). Mais ancor par plus fort raison Est plus prins et de grief servaige Par le lien du mariaige (...). C'est la saincte exortacion, Que tu n'aies entencion De toy bouter dedenz ce cerne. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 41).

B. -

P. méton. [Objet circulaire]

1.

"Tympan d'une église (?)" : En ceste meismes [contree] vi je en la Grant Mer une maniere de poisson a eschalle faite comme .I. lymaçon, qui estoit bien greigneur de tour que le cerne du portal de l'Eglise saint Anthoine de Pade ["le tympan ?"] (VIGNAY, Merv. Terre Outr. T., c.1331-1333, 41).

2.

"Voûte céleste" : Cils Dieus qui tout paist et gouverne Le centre dou ciel et le cerne... (MACH., C. ami, 1357, 48).

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"Orifice circulaire" : Geta qui regarde le cerne Et le pertuis de la caverne... (DESCH., Oeuvres R., t.8, c.1370-1407, 224).

3.

MOULINS "Ceinture du frein, planche courbe qui épouse la circonférence du rouet et qui permet d'arrêter celui-ci par pression" : ...pour le soyage du dit hommiel 2 voyes dou loncq pour faire le cherne du dit frain (Doc. 1400. In : Y. Coutant, Terminol. du moulin médiév. dans le comté de Flandre, 1994, 539).

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"Jante de la roue motrice" : ...pour 2 bendes mis au charne de le roe (Doc. 1411. In : Y. Coutant, Terminol. du moulin médiév. dans le comté de Flandre, 1994, 539).