C.N.R.S.
 
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     CERF     
FEW II-1 cervus
CERF, subst. masc.
[T-L : cerf ; GDC : cerf ; AND : cerf1 ; DÉCT : cerf ; FEW II-1, 613b : cervus ; TLF : V, 415b : cerf]

I. -

"Mammifère à tête garnie de bois, vivant en troupeaux dans les forêts, cerf"

A. -

Au propre

 

1.

[Pour désigner l'animal] : Se cerf ou dains avoir voulez, Voz chiens grans acoupler iray (Mir. femme roy Port., c.1342, 152). Les sers et les bestes sauvages Le sievoient [Orphée] par les boscages... (MACH., C. ami, 1357, 83). Semblablement, quant le lyon voit ou treuve .I. cerf ou une chievre sauvage, il ne se delicte pas en veoir les, fors pour ce que il espere mengier les. (ORESME, E.A., c.1370, 221). ...le roy dessoubz un arbre, sus un estang (...) attendoit le cerf que ly chien achassoient. (ARRAS, c.1392-1393, 75). ...il trouva grant foison de haultes forests non habitees, et en aucuns lieux, grant foison de sauvagine, comme cerfs, bisches, dains, chevreulx, porcs, et autres bestes sauvaiges (ARRAS, c.1392-1393, 76). Cerf est aussi beste toute commune, dont la char est grosse et mauvaise à digérer et engendre mauvaiz sang et humeur mélancolique. (LA HAYE, P. peste, 1426, 187). Et entretendiz qu'il disnoit vint a Damp Abbés un de ses braconniers qui dist avoir destourné un tresgrant cerf, acompaignié de X ou XIJ biches (LA SALE, J.S., 1456, 259). Mainctes bestes ay fait lasser, Quant je chassoye en Normandie ; Meinctes en pris en Picardie, Serz, sanglers, bisches, renars. Alheurs ay prins lyons et lyonpars Advecques mon chien Forte-gorge. (Pass. Auv., 1477, 141). Hardi(e)ment que tout on eslisse. Il n'y a beste, soit serf ou bisches Ou senglier, qui eschapper luy puisse Quant el(le) veult en nulle saison. (Sots mal., c.1480, 77).

 

2.

CHASSE

 

-

Corne de cerf : ...la corne De cerf qui pent en mi ta sale (MACH., Voir, 1364, 478).

 

-

Cuir de cerf : ...si lui demandez autant de place en ceste roche et en ce desrubant comment un cuir de cerf pourra enclourre (ARRAS, c.1392-1393, 31). ...et feussent mis ces X. solz en la bourse de cuir de cerf dessus la piece de bois qui soustient l'esguille du pommel (ARRAS, c.1392-1393, 296). Si verrez un homme porter Un cuir de cerf et grant et large. (COUDRETTE, Mélus. R., c.1401-1402, 132). ...cuyr de vaches, cuyr de buffles, de cerf, de biches (LA VIGNE, V.N., p.1495, 262).

 

-

Cuisse de cerf : ...et avoit mengé d'une cuisse de cerf toute crue par constrainte de faim (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 174).

 

-

Cerf de tant de cors : C'est un cerf de dix [et] huit corps [var. cors] (BRÉZÉ, Chasse T., c.1481-1490, 36).

 

-

[P. oppos. à jeune cerf] Grand cerf / vieux cerf. "Cerf qui porte au moins dix cors, qui a sept ans ou plus" : L'en puet jugier et connoistre grant cerf a cinc signes : le primier est par les traches, le secont par les fumees, le tiers par les freoirs, le quart par le lit, le quint au bois porter ; si te dirai comment tu congnoistras le joenne cerf de la biche et le viel du joenne. (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 17-18). Se si grant serf ne voit on guere. (BRÉZÉ, Chasse T., c.1481-1490, 29).

 

Rem. Nombreux ex. ds GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, cf. gloss. de l'éd. 313-314.

 

-

Cerf chassable sans refus. "Cerf qui a au moins quatre ans" : Et se tu vois que ainsi le bois soit mellé haut et large, c'est signe qu'il ait haute teste et large et que le cerf qui grant teste n'aroit ne pourroit ainsi le bois emporter. Et par cest signe pues tu emplir ton propos que il est cerf chassable sans refus (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 22).

 

-

[Des chiens] Accueillir le cerf. "Attaquer, lever le cerf" : ...pres de la nous trouverons Le cerf que chasser nous devons (...). Sur son lict je luy bailleray Les chiens, qui tous l'acueilliront (BRÉZÉ, Chasse T., c.1481-1490, 32).

 

-

Bailler le cerf aux chiens. "Découpler les chiens et les lancer sur le cerf"

 

Rem. LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 375.

 

-

Changer le cerf. "Prendre le change"

 

Rem. BRÉZÉ, Chasse T., c.1481-1490, 35.

 

-

Changer le cerf. "Prendre le change"

 

Rem. BRÉZÉ, Chasse T., c.1481-1490, 35 ; 38.

 

-

Lancer le cerf. "Attaquer, lever le cerf"

 

Rem. BRÉZÉ, Chasse T., c.1481-1490, 33.

 

-

Suraller le cerf. "Passer sur la voie du cerf sans se rabattre"

 

Rem. BRÉZÉ, Chasse T., c.1481-1490, 33.

 

-

Defaire le cerf. "Découper le cerf" : Et quant j'euz tout le cerf deffait, La teste je prins et le cueur (BRÉZÉ, Chasse T., c.1481-1490, 46).

 

-

Encorner le cerf. "Mettre le cerf sur le dos, les cornes le long du corps" : L'en encorne le cerf, c'est a dire que tu li meites les cornes au long du corps et le tourne envers, les quatre piés contremont (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 50).

 

-

[Dans des loc. désignant le chien]

 

.

Cerf baut mu. "Chien qui ne chasse que le cerf, ne tourne jamais au change et ne crie pas tant que le cerf fuit avec le change" (Éd.) : Autre maniere y a de chienz sages qui s'apellent cerfs baus muz. Cerfs s'apellent, pour ce qu'ilz ne chascent autre beste fors que le cerf. Baus s'apellent, pour ce qu'ilz sont baus et bons et sages pour le cerf. Muz s'apellent pour ce que, si un cerf vient ou change, ilz iront aprés, mes ilz ne diront mot tant comme il sera avec le change. Et, quant il sera hors dou change, adonc crieront ilz et chasceront et prendront le cerf bien et parfaitement et arreement parmi tout change. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 133).

 

.

Cerf baut restif. "Chien qui ne chasse que le cerf, ne tourne jamais au change et s'arrête quand le cerf pousse le change" (Éd.) : Autre maniere y a de chienz sages qui s'apelent cerfs baus restifz. Ces chienz ne chascent aussi autre beste fors que cerf, et pour ce s'apelent cerfz. Baus s'apelent, pour ce qu'ilz sont baus et bons et sages pour le cerf. Restifz s'apelent, pour ce que, se un cerf vient en mi le change, ilz s'aresteront et demourront touz coiz et atendront leur maistre. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 134).

 

-

Prov.

 

Rem. Aprés le cerf faut la biere Et aprés le sanglier le mire ; LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 525 (Le Roux : "Au cerf la bierre, au sanglier le barbier").

 

3.

[Dans des comparaisons] : Tu seroie[s] plus esbahis Que cers ramés, et estahis, Et s'aroies paour et hide, Se tu vëoies bien d'Ovide Les diverses mutations Faites en maintes regions. (MACH., Voir, 1364, 492).

 

-

Leger comme un cerf

 

Rem. Prov. H., 62 [C22].

 

-

Sauvage comme un cerf : Biaus amis chiers, Tu es sauvaiges que uns chiers. (Echecs amour. K., c.1370-1380, 170).

 

Rem. Prov. H., 62 [C23].

 

-

La teste levee comme cerf : ...se contiennent entre chevaliers et escuiers et tous hommes par beau maintien, dient leurs paroles simplement et coyement (...) et ne voisent la teste levee comme cers ramages (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 72-73).

B. -

P. méton.

 

1.

"Cuir de cerf" : ...une paire de gans de cerf à fauconnier, baillée à Maxe, le barbier dudit seigneur (Comptes argent. rois Fr. D.-A., I, 1352, 136). ...2 paire de grans gans de cerf pour monseigneur Philippe, pour porter faucons et aler en rivière (Comptes argent. rois Fr. D.-A., I, 1359-1360, 222).

 

2.

"Tête de cerf" : Item, vis à vis ladicte dame, au second pillier soubz le cerf qui est en la salle, fut son buffet proprement compasté à sept ou huict estaiges (LA VIGNE, Sacre Anne Bret. S., 1505, 299).

 

3.

[Pour désigner une représentation de l'animal]

 

-

[En cire] : ...ou milieu de ceste feuillie avoit ung petit planquier bien charpenté a maniere d'un jardinet, ouquel estoient pourtraites de chire toutes manieres de flours, ou milieu duquel avoit ung cerf tenant en son pié ung lis atourné de pluiseurs fleurs de celle espece, dont d'une chascune d'icelles decouroit eaue rosee, laquelle cheoit en ung bachin pour laver les mains, et de rechief portoit ce cerf entre ses deux cornes les armes blances du dit chevalier (Jehan d'Avennes F., c.1465-1468, 76).

 

-

[Comme bijou ou objet décoratif] : ...ung cerf de perles qui a les cornes d'esmail ynde et une sonnette au col. (Invent. mobilier Ch. V, L., 1380, 310). Lequel cerf avoit sur sa large rameure haultement posee une couronne d'or chargee de pierrerie riche et resplendissant, dont les fleurons estoient espanoïlz ça et la, lesquielz tenoient grant umbre a merveilles (RENÉ D'ANJOU, Cuer am. espris W., 1457, 124).

 

-

[Comme entremets] : ...ses dames et damoiselles entrerent en leur basteau, dedens lequel, par lesdiz bourgois de ladicte ville, lui fut presenté ung beau cerf fait de confiture, qui avoit les armes d'icelle royne pendues au col. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 178).

 

-

[Dans une enseigne d'auberge] : Et fu la chités partie pour logier les signeurs : le roi à Saint Martin (...) ; li dus de Bourgongne à le Teste d'Or ; le connestable au Cherf. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 71). ...ilz buvoient tous ensemble à un escot en une chambre par bas, à part, en l'ostel de la Corne de Serf, devant la boucherie de ladite ville. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 444).

 

.

[L'auberge elle-même] : Chascun se logea coyement et sans bruyt, et le noble archiduc se logea au Cerf (LA MARCHE, Mém., III, c.1470, 271).

II. -

Cerf volant

A. -

HÉRALD. "Représentation d'un cerf ailé, support des armes royales (introduit par Charles VI)" : ...en l'autre bacin a un osteau à plusieurs esmaulx (...) et ou milieu dudit osteau un cerf volant poinconné. (Ch. VI, D., t.2, 1421, 386). ...une autre selle de veluiau vermeil ouvrée de broderie à cerfs volans et à anneaux. (Ch. VI, D., t.2, 1422, 394). Le roy estoit armé de toutes piesses, sur ung biau coursier ; et avoit ung cheval couvert de velloux d'azur en coullour, semé de fleurs de lis d'or d'orfaverie. Et devant luy, son premier escuier d'escurie monté sur ung coursier couvert de fin blanchet couvert d'orfaverie semee de serfs vollans. (Entrées roy. G.L., 1451-1455, 73).

 

Rem. Pour JUV. URS. (J. Dufournet, Sénéfiance 7, 1979, 235), Charles VI a introduit le cerf dans sa devise à la suite d'une chasse, en 1381, dans la forêt de Senlis. Allusion à cet épisode : Cestui, entre autres, fist l'election du jour que le roy alla à la chasse, où il trouva le grant cerf, qui avoit le cercle de cuyvre doré ou col, ouquel cercle estoit escript en lectres latines : "Hoc me Cesar donavit". (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 144 r°).Pour FROISS., c'est à la suite d'un songe : Or vous voel jou recorder de un songe qui lui estoit avenu en celle saison, lui estant en la cité de Senlis, et sur quoi il s'ordonna de sa devise dou cerf vollant. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 256).

 

-

Cerf (pour cerf volant) : Cestui, entre autres, fist l'election du jour que le roy alla à la chasse, où il trouva le grant cerf, qui avoit le cercle de cuyvre doré ou col, ouquel cercle estoit escript en lectres latines : "Hoc me Cesar donavit". A quelle occasion les roys de France ont tousjours volentiers porté pour enseigne le cerf à dix rames et le liz semé sur champs (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 144 r°).

 

-

P. métaph. [Pour désigner Charles VI] : Le Vieil Pelerin doncques au derrain quartier de sa vie (...) a revele son songe et par escript presente au jeune Cerf Volant, dignement sacre et couronne des blanches fleurs dorees, et roy tout seul du royaume de France (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 101). Et dit Sebille en sa prophesie qu'il sera ung roy en France senefié par le serf volant qui aura son royaume destruit et lui fuitif. (Best. hérald. H.E., c.1435-1450, 489).

 

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"Le roi de France et les Français" : Il me souvint de l'Escut de Bpurgonne, Lequel Philippe et Charles, son enfant, Tindrent en hault estat tant triumphant Que bruit en fut jusques en Castellonne ; Et maintenant par le guerre qui hongne, Le cerf vollant y plante son escut (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 167).

 

-

[Dans un tableau vivant] : Ailleurs avoit ung tigre et ses petits qui se miroient en mirouers ; et au plus près de Nostre-Dame avoit ung cerf volant bien et somptueusement fait, lequel par mistère s'agenouilla devant le roy quand il passa par là pour aller à icelle église (CHART. J., Chron. Ch. VII, V., t.2, c.1437-1464, 169). ...en la ville, dedens laquelle y avoit pluseurs histoires de saints et de saintes en moult de lieux, qui juoient des personnages moult autentiquement. Et, entre les autres, y avoit auprès de Nostre-Dame, un cerf volant qui avoit une couronne en son col, et le tenoient deux pucelles à deux las de soye, et se agenouilla tout bas quant le Roy passa devant lui. (ESCOUCHY, Chron. B., t.1, c.1453-14, 233-234).

B. -

"Cerf-volant (jouet)"

 

Rem. GDC IX, 20b ; mais l'ex. de CHASTELL. n'a rien de convaincant ; il s'agit plus vraisemblablement du sens A ; le FEW (II-1, 614b) date ce sens de 1669.

C. -

"Lucane (espèce d'escarbot, lucanus cervus)" v. cerf-volant
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Robert Martin

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