C.N.R.S.
 
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     ÂTRE1          ÂTRE2     
FEW VII ostrakon
ASTRE, subst. masc.
[T-L : aistre/astre ; GDC : astre1 ; FEW VII, 440a : ostrakon ; TLF : III, 805b : âtre1]

A. -

"Partie dallée de la cheminée sur laquelle on fait le feu" : Je ne vos sai(e) que presenteir, Fors que ce wastelet foret Et ce cautelet de doret, Qui fut cuys hiersoir en nostre estre. (All. foi C., c.1350-1400 [p.1478], 256). Et, se veulz faire comme saige, N'i met espices ne fourmaige. Ou four bien a point chaut le met, Qui de cendre ait l'astre bien net. Et, quant sera bien a point cuit, Il n'est si bon mengier, ce cuit. (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 455). Item pour IX sacs d'argille pour faire les contrecueurs et astres de la dicte queminée (Comptes Archev. Rouen J., 1399-1400, 48). ...un aistre de pierre qui est ou contre cueur, de morte pierre de dix pieds de long et six pieds de hault, pour mettre du feu de charbon à tourner les rotz (Trés. Reth. S.L., t.2, 1409-1410, 603). A maistre Clais, filz Guillaume, maçon (...) tant pour avoir refait l'aistre et contrecuer de la cuisine (Comptes Etat bourg. M.F., t.3, 1416-1418, 257). ...pour avoir maçonné ou viez muret des estuves, vers les fossez, un aystre de cinq piez de let et sur ce maçonné le arc tenant les pos de terre donnant la chaleur es estuves, et de sur ce avoir maçonné une cheminee portant la fumiere de la fournaise desdictes estuves (Comptes Etat bourg. M.F., t.3, 1418-1420, 613). ...avoir refait de neuf les quatre astre et quatre couvertures des quatre chemines qui sont en icelles deux maisons, tant les deux de l'estage de rez de chausse comme les deux autres de l'estaige d'au dessus, et, au dit rez, fait parties des planchiers des ouvrentes d'icelles (Comptes Paris V.L.D., t.1, 1449-1450, 671). Haro, les pastéz sont en l'estre ! Gardez le chat pour les souriz. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 165).

 

-

Brûler comme tison en l'astre. "Brûler facilement" : A Rome, ung de Viterbe, Pour ducas amasser, Seut d'eaue et de viste herbe Plusseurs bulles casser, Faire seconde lettre Ou la premiere fut, Mieux que tisson en l'estre, En fut brulé en fu. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 324).

 

-

(Estre) pesant comme un astre : Sievés le, il est pesant qu'ung aistre. Je suis legier comme une aronde. (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 176).

 

-

Prov.

 

.

Il n'y a rien de plus froid que l'astre. "Rien n'est plus froid que l'âtre (quand il ne sert pas à chauffer la maison)" : [Deschamps passe l'hiver dans le pays de Brie ; il y souffre de froid et s'adapte difficilement] Cure n'ay plus de pais vert A Brie le conte Robert, De Gournay ne de La Ferté. Ce n'est pais que pour esté ; Il n'y a rien plus froit que l'astre Excepté le mortier de plastre Ou on entre jusqu'aux genoux Toutefoiz que le temps est moulx (DESCH., Oeuvres R., t.8, c.1370-1407, 59).

 

.

[Dans un cont. métaph., la maison où se trouve l'âtre étant celle de l'âme] : ...se le monde heurte par pompes et vanitez, tantost noz li ouvrons et faisons de nostre ame comme une hale ou un marchié. Se la chier hurte par mauvaise charnalité, tantost noz li ouvrons et en faisons comme ung ort logis de pourciaux. Se l'ennemi huche par fraudes et mauvaises credulitez et sorceries, tantost nous li ouvrons et en faisons comme une fosse a larrons et ung logis des ydoles, et briefment le Saint Esperit ne trueve rien prest ; n'i a plus froit que l'atre. (GERS., Pent., p.1389, 81).

 

Rem. L'expr. signifie concrètement et de façon hyperbolique qu'un âtre froid paraît plus froid que n'importe quoi d'autre, quand il n'est pas utilisé pour réchauffer une pièce, cuire des aliments, accueillir les gens. L'expr. n'a pas encore le sens qu'elle semble avoir au XVIe s. : "On ne fait qu'une mauvaise cuisine (dans telle maison)". Cf. FEW VII, 440b.

B. -

P. méton.

 

1.

"Surface qui se trouve juste devant la cheminée" : Se ta femme crout ["croupit"] en maison Et garde le feu et les cendres, Elle en vault pis, tes noms est mendres ; D'oneur ne sçara tant ne quant, S'iert comme une chievre vacant Qui ne scet que brouter et paistre, Ou comme un chat qui est en l'aistre, Qui brulle son poil et qui l'art (DESCH., M.M., c.1385-1403, 108).

 

2.

"Pièce dans laquelle se trouve la cheminée ; lieu où on habite" : Aises est qui fame a qui dance Et qui ainsi se va esbatre Aux festes, au temple, au theatre. Tant que par leurs esbatemens Leur fault nourrir autruy enfens (...) Et ainsi te fault en ton astre Enfans estranges soustenir. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 137). ...les enfens brayent en l'aatre. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 92). Et il advient, comme on a veu Que tel part et laisse son estre Qui a son retour n'est receu, Et qu'en son lieu a aultre maistre. (GAGUIN, Passe temps oisiv. T., 1489, 420).

 

-

[À propos de l'enfer] : Et les pauvres folz plains d'orreur N'ont peur, ne crainte, ne terreur D'aler en l'infernal baratre, Endurer dedens ce vil atre Et souffrir peines et tormens Par durs cris et piteulx guemens. (RIVIÈRE, Nef folz D., 1497, 91).

 

3.

[Comme endroit protégé où l'on n'est pas contredit] : Trop mieulx ce sçauroit embatre Et esbatre, A quelque povre home batre Comme plastre, En luy rompant bras ou teste. Le fol, pire que ydolatre En son astre, Diroit qu'il en vauldroit quatre, Mais rabatre En sçoit assez qui n'est beste (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 76).

 

4.

Loc. [L'âtre y est symbole de sécurité, mais aussi de frilosité, de lâcheté pour les guerriers]

 

a)

Croupir en l'astre : Se je pensasse qu'il y eust Denger ou d'arc ou d'arbalestre, J'allasse croppir en nostre estre, Et en noz charbons estudier. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 537). Quant les archiers en leurs pompes haultaines Furent passez trois a trois, quatre a quatre, Pied a pied vindrent leurs nobles capitaynes Qui ne sont pas gens pour cropir en l'astre (LA VIGNE, V.N., p.1495, 214).

 

-

Laisser (des armes) croupir en l'astre. "Laisser inemployé ; faire preuve de mollesse, se laisser aller à la décadence" : S'au temps passé moult grant payne avez pris De decorer de France le pourpris, Pour ung neant sera tout abaissé, Et dira on : "Les Françoys ont laissé Leurs lances, dars, leurs arcs et estandars Cropir en l'astre comme povres canars..." (LA VIGNE, Ress. chrest. B., 1494, 139).

 

-

S'enfuir en astres : Et d'estre trop hardis, et trop entreprendans, En avient en le fin .J. dammaiges moult grans. Sé voit-on les couars vivre assez, et lonc tampz ; S'enfoèent les hardis ès atres, et ès champz. (Baud. Sebourc B., t.1, c.1350, 276).

 

-

Garder ses astres : A la bataille, a la bataille, Entre vous aultres gentillastres ; Non pas au roy tollir sa taille Et vous groppir gardant voz astres ! (CHART., D. Her., p.1415, 434).

 

b)

Demeurer en l'astre

 

-

"Avoir honte de sortir (après une défaite)" : Que bien souvente fois j'é veu Cil qui cuidoit estre le maistre A la fin se trouvoit deceu Et demouroit souvent en l'aistre (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 626).

 

-

[De l'honneur] "Rester caché, n'avoir pas l'occasion de se manifester" : Celuy qui cuide estre le maistre [au combat] On le voit souvent debouter Et demeure s'onneur en l'asitre [l. aistre]. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 302).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Pierre Cromer

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