C.N.R.S.
 
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     ASSOTER     
FEW XII 510a-b *sott-
ASSOTER, verbe
[T-L : assoter ; GDC : asoter ; AND : asoter ; FEW XII, 510a-b : *sott- ; TLF : III, 726b : assoter]

I. -

Empl. trans. Assoter qqn

A. -

"Rendre sot, fou" : Force est que [vous] vous deportés, Et qu'un petit vous supportés Vos sotz, quë avés assoctés A foloyer de tous costés. (Vig. Trib., c.1480, 227).

 

-

En partic. "Rendre follement amoureux" : ...ceste dame qui t'assote (MACH., Voir, 1364, 5709).

B. -

"Tromper, duper (prendre pour un sot)" : Je tien, fait il, que treve arons ou paix, Car au traittié sont venu pluseur saige. Thierri respont : Ilz perdent leur langaige, Car ilz ne font fors l'un l'autre assoter (DESCH., Oeuvres Q., t.3, c.1370-1407, 94). L'anemi m'a bien (...) Deceu voire et assoté (Mir. march. juif, c.1377, 202). Ha ! ennemis, que ne m'emportes, Qui ainssinques m'a assotée Qu(ar)[e] grosse d'enfant m'a laissiée ! (Jour Jug. R., c.1380-1400, 221). En ceste Facécie est donné à entendre que jamais homme n'est bien assoté que par femme et qu'il n'est rien que on ne puisse persuader à ung sot. (TARDIF, Facéties Pogge M., c.1490, 23).

II. -

Empl. intrans.

A. -

"Devenir sot, stupide" : Tenez vous sainttement en cloistre, La, mettez paine a vous congnoistre. N'en bougiez ; car le villoter Fait mains et maintes assoter. (Mir. ste Genev. S., c.1410-1420, 104). Je cuide que je assotirés N'estoit le soucy que je prens. (Est., p.1460, 24).

B. -

"Tomber en enfance, devenir gâteux" : Pour ce que trop ont fait les corps d'excés, (...) Les uns vuidier a fallu en partie, Autres serrer ; l'un meurt et l'autre assote (DESCH., Oeuvres Q., t.1, c.1370-1407, 207).

III. -

Empl. pronom.

A. -

S'assoter. "Se rendre sot, stupide" : Or aprez, je te fay demande Se femme, tant soit elle sotte, A homme demande ou commande Qu'en sotement amant ["qu'en aimant sottement"] s'assotte Et que son sens elle lui oste, En fin le pert, comme tu songes. (MARTIN LE FRANC, Champion dames I-II, P., 1440-1442, 225).

B. -

S'assoter de qqn. "Tomber amoureux de qqn (le verbe ne garde pas dans tous les ex. la valeur péj. qu'il a dans d'autres empl.)" : J'ay mis mon cuer par ma sotie Tressottement en une sotte Qui s'est de moy si essottie, Et de jour en jour si s'assotte, Et d'elle aussy tant m'assotte Que amer sottement me convient (Recueil galant. V.-B., c.1350-1400, 107). ...Virgile qui s'assote De la fille l'emperëour (MACH., F. am., c.1361, 208). Adonc iceulx mariez, comme sots, se assovent [var. se assotent] d'icelles meschans femmes qui scevent garder leur paix et iceulx honnorer et obeir a tous propos et faire leurs plaisirs. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 83). Tristifer mie ne s'assote De seule amie, car toudis En a, ce dist l'en, noef ou dix Ou plus, sy c'on n'en scet le conte. (Pastor. B., c.1422-1425, 49). L'en ne se doibt point assoter De femme, tant soit elle belle ; D'une en aultre soy transporter, Engendre plaisance nouvelle. (MARTIN LE FRANC, Champion dames III, F., 1440-1442, 65). A tout mon cas bien recongnoistre Je nay vescu sans reproche De moy cest assote ["s'est assoté"] mon maistre Comme est vng coquin de sa pouche Par quoy iay mys ces vins embroche (MART. D'AUV., La Dance des Femmes, éd. L. Götz, 1460-1508. In : Z. frz. Spr. Lit. 57, 1933, 328). On doit tenir femme pour sotte, Qui mary prent sans le congnoistre, Et qui de son servant s'assotte (Sav. Calb. T., c.1475-1500, 137).

C. -

S'assoter de qqc.

 

1.

"Se couvrir de ridicule (à cause de qqc.)" : Decheüs est par femme ; il s'en asotera. Aussi fu Aristotes, qu'en si grans sens régna (Bât. Bouillon C., c.1350, 197).

 

2.

"Se prendre d'un goût abrutissant pour qqc." : Le ventre, qui s'assotte De vin, chiet tantost en luxure Et en toute autre desmesure. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 76).

IV. -

Part. passé en empl. adj. ou subst.

A. -

Empl. adj.

 

1.

Assoté

 

a)

"Stupide, sot" : Et ly sergens lui crïent : "Glouton, car vous levés ! Trop avés, maugré bieu, les aultés desrobés. Je croy que temprement ceans plus ne venrés. - Amis, se lui dist Gilles, estes vous assotés ?..." (Tristan Nant. S., c.1350, 642). Princes, nulz homs ne doit estre bouté Es tenebres de folle opinion ; Qui Dieux ne craimt, il est plus qu'assoté : Tesmoing Troies, Thebes, Romme, Ylion. (DESCH., Oeuvres Q., t.1, c.1370-1407, 227). Et Charlot luy respont : "Wilhars co[r]nus et assoteiz, honis soyéz quant sy m'aveiz frappeit ! L'estour feray, sy aiéz mal greit !" (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 49). Homs, homs, vous estes assoté ! (Cycle myst. prem. mart. R., c.1430-1440, 104). [Mort] Alymentée, abhominable à voir, Agricultée, advortée, assotée, Aspre, arrestée, anticriste, adoptée (LA VIGNE, Compl. roy Bazoche M.R., 1501, 392).

 

b)

"Devenu bête, rendu sot, gâteux" : Quant uns homs a jeunes esté Et la vieillesce le sousprant, Lors, pour son ancienneté, Devient moins qu'en estat d'enfant. Et assoté, legierement Toudis parle, sanz vray propos (DESCH., Oeuvres Q., t.1, c.1370-1407, 203). "Conte," ce dist le rey, "vous estes asourdé . Demandé vous avoye dont cel enfant [fut] né, Et vous me respondez comment tout assoté." (Galien D.B., c.1400-1500, 14).

 

2.

(Estre) assoté de qqn/d'un animal

 

a)

"(Être) entiché de qqn, avoir des faiblesses pour qqn" : ...la royne a une levriere, comme vous savez, dont elle est beaucop assotée (C.N.N., c.1456-1467, 193). ...la dame (...) commença a demander de rechief : "Monsr, doncques, puis que vous dittes que vous n'en estes point assotté [de messire Prigent], pourquoy l'entretenez vous ? ..." (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 312).

 

b)

"(Être) follement épris de qqn (au point de se laisser exploiter ou berner)" : Et meultz me vauroit a estre sours qe ceo qe jeo tournasse si bone chose a male, et ceo qe me tant eideroit, de me faire tant ennuyre et damager ; et tout ceo si vient de Dame Peresce et de son amy Franche Volenté q'est d'elle si assotez q'il ne fait riens forsqe tout ceo q'elle comande a briefs paroles motz. (HENRI LANC., Seyntz medicines A., 1354, 58). ...et depuis la mauvaise garce s'est abandonnée à mon pere, lequel la maintient tout publiquement et en est tout assoté, et tant, qu'il en a despendu et gaté excessivement du sien. (Trés. Reth. S.L., t.2, 1388, 350-351). ...qui assoté de tel femme Seroit, perdre le corps et l'ame Pourroit (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 82).

 

-

Assoté sus qqn : Et en la fin les Londriens, quant ilz veirent que ce roy Edouard se mesusoit et estoit tous assotez sus messire Hue le Espensier, ilz y pourveirent, car ilz manderent secretement à la roynne Yzabel, que... (FROISS., Chron.[Livre IV] V., c.1400, 789).

 

c)

[Sans nuance péj.] "(Être) amoureux" : S'elle eust veu son amy vivant Estre d'aultre dame assoté, Et en derriere et en devant Elle eust bien son tourment porté. (MARTIN LE FRANC, Champion dames III, F., 1440-1442, 97).

 

d)

"(Être) dupé, berné par qqn" : Se elles te demandent de l'argent de ta bourse, dont ne le t'emblent ou tollent elles pas : ne leur baille mie se tu ne veulz ! Et se tu dis que tu en es assotez, si ne t'en assote mie ! (CHR. PIZ., Déb. R. Rose H., 1401-1402, 18). Or ai-je dit que le duc n'en estoit pas fortement assotté, et tout premier, pour ce qu'il avoit si longuement séjourné devers le roy, qui luy donnoit souppeçon ; secondement, pour ce qu'il estoit au duc de Milan, qui estoit son adversaire. (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 352).

 

3.

(Estre) assoté de qqc. "Raffoler de qqc." : ...je veil bien que tu saches que j'ay ung retour en ceste ville dont je suis beaucop assoté (C.N.N., c.1456-1467, 207). C'est ung viellart tout radobté Qui n'a plus ne sens ne memoire. De mengier n'est plus assoté ; Il n'amende sy non de boire. (Prov. rimes F.M., c.1485-1490, 63).

 

4.

Estre assoté. "Être sélectionné, favori" : Chascun bergier ou pastoureau gardant fouc d'oeilles doit avoir ung mouton debonnaire et assoté et auquel il donne de son pain, lequel mouton par mignotise et pour estre mieulx congneu entre les autres porte une sonnette ou petite clochette de laton a son col, pourquoy en Brie il est appellé le sonnaillier et en aucuns autres pays est nommé clocheman. (JEAN DE BRIE, Le Bon Berger C.W., 1379, 82).

B. -

Empl. subst.

 

1.

"Personne devenue sotte par amour" : Que voulez vous que plus vous die, Jeunes assotez amoureux ? Par Dieu, j'ay esté l'un de ceulx Qui ont eu vostre maladie ! (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 323).

 

2.

[En s'adressant à qqn ; terme affectueux] Mon (mes) assoté(e)(s). "Petit(e) sot(te), chéri(e)" : Mes assotez n'en parlez plus (Sots triumph., c.1475, 47). M'amye, Vous soyez la tresbien trouvee ! Long temps j'ay esté, dont m'ennuye ; Accollez moy, mon assotee ! (COQUILL., Oeuvres F., 1478-p.1494, 381). Allons, mon pareil, mon sochon, Mon joly cuer, mon dorelot, Mon chier amé, mon effanchon, Mon assoté et mon coullot. (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 120). M'amye et ma doulce assotee. (P. Jouh. D.R., a.1488, 21).

 

3.

L'assoté (de qqn). "Le favori" : LE MOUTON [au loup]. Besoing faict le vielle trotter. Ne m'est mestier d'autre estaïon, Je m'en sçay bien a qui froter, Sans m'apuyer a ton hayon ; Je suis l'assoté du tayon, Qui tout me donne et riens ne plaint. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 658). Siques se tu es seul mignon, Se tu es le droit assoté, Loé Dieu, gentil compagnon, Car tu es heureux a plenté. (MARTIN LE FRANC, Champion dames III, F., 1440-1442, 53).

V. aussi assotir
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Pierre Cromer

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