C.N.R.S.
 
Article complet 
StructureSans exempleCompletFormesExemples
FamilleTextesSourcesImpressionAide à la lecture
     AISER     
FEW XXIV adjacens
AISER, verbe
[T-L : aisier ; GD : aisier ; AND : eiser1 ; FEW XXIV, 147b-148a : adjacens]

I. -

Empl. trans.

A. -

Aiser qqn (ou un animal)

 

1.

"Donner à qqn (ou à un animal) ce qui est nécessaire pour son bien-être" : Conme mon seigneur droiturier Vous vueil a mon pouoir aisier En vostre hostel. (Mir. femme roy Port., c.1342, 157). O mon chier filz, quant je te voy, Le cueur me sautelle de joye Ne jamais ne me saoulleroye De ta tendre bouche baisier. Pour l'eure ne te puis aisier : Ce lieu nous est trop mal propice (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 78). Julicés manda adont tous ses hommes et s'acorda a eulx qu'ilz demourroient la endroit deux jours pour eulx bien reposer et leurs chevaulx aisier et visiter (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 356).

 

2.

En partic.

 

a)

"Restaurer, réchauffer" : Il y fuit toute neut san boire et san mengier ; Assez pot il de fain plorer et larmoier, Car la neut n'ot norice qui lou venist aisier, Fors soullement Jhesu qui tout ait a jugier (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 476). Des souppes faites de brun pain En l'eaue clere seulement Leur donnerent, et puis comment Ilz les aisierent par aprés Vous diray (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 402). Et apres ce, c'estassavoir au vespre, soient repuz habondamment comme devant et largement. Et se la saison le requiert, soient chauffez et aisiez. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 136). Et quant Madame et les dames et damoiselles de sa compaignie furent bien chauffees et aisees, Madame fist demander se les charios estoient prestz. (LA SALE, J.S., 1456, 247). Je suis très-battu de pluye et de mauvais temps et meurs de froit. Je vous prie que vous me aisez un petit, car il m'est bien besoin et ne fistes onques telle oeuvre. (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 258). ...en fin le mena a terre en sa maisonnette, la ou le chauffa et aysa a son petit pouoir, le revesty de ses propres drappelés (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 113). Que vous ne fusttes hier bien aisés ne fut pas ma faulte mais la faulte de la grosse teste [Esope], mais venez aujourduy et nous aurons autres viandes. (MACHO, Esope R., c.1480, 34).

 

b)

"Entourer de soins, de tendresse" : Et sachiez que Melusigne venoit tous les soirs visiter ses enfans, et les tenoit au feu, et les aisoit de tout son povoir ; et la veoient bien les nourices, qui mot n'osoient dire. Et admendoient et croissoient les deux enfans si fort que chascun s'en donnoit merveille. (ARRAS, c.1392-1393, 262).

B. -

Aiser le corps / les membres / le coeur

 

1.

Aiser le corps / les membres. "Restaurer, soulager qqn" : ...demanday Mon enfant avoir pour baignier, Et pour lui ses membres aisier. (Mir. enf. ress., 1353, 37). Pensés de vostre corps aisier Et de vostre cheval ossi, Car vos mestres n'a nul soussi De vous, selonc ce qu'il me mande ; Je ne puis pas a sa demande Respondre demain ne aprés. (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 83). Moult y a de ceulx qui ne quierent mais que mengier et boire, dormir et aisier les corps (Faits Romains M., c.1400-1500, 32). Sy pouvez assez croire et sçavoir que l'hostel n'estoit pas impourvu, mais fort garni de vins et de viandes et de ce qu'alors on put trouver, ni recouvrer pour corps d'homme aiser et repaistre. (Faits Lalaing K., c.1470, 121-122).

 

-

[Avec une idée péj.] "Procurer à qqn des plaisirs qui sont interdits ou qui avilissent" : Les chenoines sont unes gens Qui ont assés d'esbatement Ou monde pour lour corps aisier. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 53). Pour le corps aisier comme .1. chien, Jeta hors creinte et bonne honte, D'onneur, de raison ne tint conte (Mir. ste Genev. S., c.1410-1420, 97).

 

2.

Aiser le coeur. "Satisfaire le coeur, le soulager" : Et che (...) grandement mon coer aisoit, Quant je pooie en mon requoi Souhaidier (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 72).

C. -

Aiser qqn (ou un animal) de qqc.

 

1.

"Procurer qqc. à qqn (ou à un animal), le lui fournir" : Mais que venu soit mon vallet, M'amie, nous vous aiserons De tout ce qu'aisier vous pourrons (Mir. st J. Paulu, c.1372, 110). Dame, se voulons hebergier Ceens, nous pourrez vous aisier De vivre et de lis pour dis hommes (...) ? (Mir. roy Thierry, c.1374, 330). Et [les lévriers] doyvent estre gardez et aisiez de bonne litiere et de bonne eaue et autres choses, einsi comme j'ay dit des chienz couranz. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 194). Et lors commanda a ung damoiseau qui estoit devant luy, moult gentil homme, qu'il la servist et aisast de tout ce que mestier luy fust (Chev. papegau H., c.1400-1500, 2). Si les mena en sa cité de Bonde ou grandement les honora et aisa de tout ce que il pot (Bouciquaut L., 1406-1409, 93). Beaulx seigneurs, allez vous en à Karadouce et là faciez bonne chiere, vous et les compaignons, et les aisez de tout ce que ilz vouldront demander, car ilz l'ont bien gaingné. (Cleriadus Z., c.1440-1444, 328).

 

2.

"Donner à qqn l'usage de qqc., le lui prêter" : ...duquel fournel aussis ne devoit ledit Petit Jehan d'Arche aysier autre personne, quelque qu'elle fust, fors lui, ses gens et maignies et pour son hostel et pour pretin cuire tant seulement, sur peinne de soixante solz d'amende (Trés. Reth. L., t.3, 1422, 44).

 

3.

"Réconforter qqn par qqc." : Marie sui (...) Qui pour amenuiser t'amére Douleur et ton cuer apaisier, Te vueil de ma presence aisier. (Mir. Theod., 1357, 112).

D. -

Aiser qqn à + inf. "Aider qqn à, lui rendre plus facile de" : Et d'icelui costé, au coing de la lice, avoit ung montoir de IIII degrés, pour aidier et aisier à armer et à désarmer les venans de dehors. (LA MARCHE, Tournoi Gand P., p.1470, 67).

II. -

Empl. pronom.

A. -

S'aiser

 

1.

"Se reposer, retrouver ses forces, se donner de l'aise, se mettre dans une situation agréable" : ...Et vous deffens qu'en ce voyage Faisant de tant ne vous aisiez Qu'en une ville plus gesiez D'une nuit. (Mir. mère pape, c.1355, 371). Mais il s'aisoit en sa maison Si que mieus ne s'aisa mais hom. (MACH., C. ami, 1357, 105). Chier compains (...) Vueilliez m'acoler et baisier, Et puis vous en alez aisier ; Car (...) Pour vous iray faire le gage. (Mir. Amis, c.1365, 34). Si vous prie le connestable que vous voulsissiez (...) faire ouvrir vos citez pour eulx laissier ens venir aysier et raffreschir et recouvrer santé (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 105). ...il s'aisierent et desarmerent (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 199). ...pour euls reposer et aisier (FROISS., Chron. D., p.1400, 660). ...le seigneur du lieu les receut a grant honneur, et la se aisierent, car grant besoing en avoient (Bouciquaut L., 1406-1409, 127). Saillons tous hors et laissons Madame chauffer et soy un peu aisier a son privé (LA SALE, J.S., 1456, 247).

 

-

[Cont. métaph., d'une chose] : Et comme fine pierre et pure En l'or se resjouist et aise, Ainsy est dame par nature En amy leal a son aise. (MARTIN LE FRANC, Champion dames III, D., 1440-1442, 35).

 

2.

En partic. "Se restaurer, se désaltérer" : Et si n'avoient pas vitaille, Ne gouvernance à leur plaisir, Qu'il n'avoient temps ne loisir D'eaus aisier, ne de l'aler querre, Ou de l'avoir en mer n'en terre. (MACH., P. Alex., p.1369, 95). ...il s'aisierent de che que il orent (FROISS., Chron. D., p.1400, 890). Et quant ilz oïrent ce desroy, ilz habandonnerent leurs vyandes, combien qu'ilz eussent eu meillieur mestier de eulx aisier et reposer. (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 357). Mais si tost qu'ilz y arriverent, ilz mirent pié a terre, puis beurent a leur voulenté. Tandis qu'ilz se aisoient a celle fontaine, ilz perceurent de bien loing tout prumierement un chevalier armé et monté a souhait (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 263).

 

3.

[De deux amants] "Faire l'amour, se donner du plaisir" : Quant appointié ot tout l'affaire, Joyeusement s'entrebaiserent. Si se couchierent et aiserent A leur aise, je n'en doubt mie, Si com fait amant et amie. (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 42). Jamais barbe ne fut plaisant Ne bonne aussi, pour tous debas, A soy aisier ne hault ne bas. Aussi qui bien se veult aisier, Quant deulx culz se veulent baisier Et ensemble faire devoir, Nul des deulx ne doit barbe avoir. (Barbes brayes A., a.1450, 254).

 

-

S'aiser des corps : Et nud a nud pour mieulx des corps s'aisier, Les vy tous deux par ung trou de mortaise. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 117).

B. -

S'aiser à/de qqc.

 

1.

"Se servir de qqc." : Serpes, cousteaux sont moult bien en saison, Puis de panyers et de hoctes s'aise on (LA VIGNE, S.M., 1496, 333).

 

2.

"Profiter de qqc., trouver du plaisir à qqc." : Au moins congneusse je la main Qui tant m'a escript soir et main Doulz mos de demain en demain, Si les baisasse Et quoy que trop ne m'en aisasse N'en cuer du tout ne m'envoysasse (CHART., L. Dames, 1416, 251). ...et voyaget loing pour querir sa praye sans prendre garde s'elle estoit ville ou honnourable mais quant elle lui plaisoit s'en aisoit fort sans courtoisie. (Best. hérald. H.E., c.1435-1450, 478). A qui Dieu veult biens departir, Il est bien sot qui ne s'en ayse. Je vueil tant faire que je plaise A toutes gens : vela le point. (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 125).

 

3.

"Se régaler de qqc." : Or alons donc, si nous aisons En la taverne au meilleur vin. (Mir. st Guill., c.1347, 40).

 

4.

"Se donner du bon temps avec qqc." : Tenez ceste plaine aumosniere De monnoie et vous en aysiez, Que bien est raison qu'en soiez Tresbien paiee et largement (Gris., 1395, 51).

 

5.

"Se contenter de qqc." : ...[le duc] se logea dans La Ferté qui avoit esté bruslée nagaires, mais la muraille estoit remise saine et entière assez pour pouvoir porter garant encontre trait. Sy s'en aisa ledit duc au mieux qu'il pouvoit (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 249).

 

6.

"Se débarrasser de qqc. (pour être à l'aise)" : Mais premier se fist le Cueur aisier de ses armeures, car tout a pié qu'il aloit, si ne se voulut il jamais dessaisir de son haulbert et de sa coiffe de fer ne de sa bonne espee, de quoy Desir le volt armer au commencement de la queste, comme vous avez ouÿ. (RENÉ D'ANJOU, Cuer am. espris W., 1457, 118).

III. -

Empl. intrans. "Avoir une vie agréable" : Grandement feroit a prisier Esperance, qui fait aysier Tel, qui peu en a l'aisement (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 93).

IV. -

Part. prés. en empl. adj.

A. -

"Agréable, plaisant, commode" : Et si a des enfans aisans, Trés paisibles et appaisans (MACH., D. Aler., a.1349, 243). De celle part trop est plaisant Li chastiaulx et moult aisant [ ou lire aaisant ?] (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 110). Mais, cil, qui dompte toutevoye Le serpent, treuve celle voye (...) Tant delitable et si aysant (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 117). Mais le deduit amoureux ne se lesse ; Tant est plaisant Qu'il se maine par semblans en taisant, Non pas en bruit et en noise faisant. Qui eur y a, il n'est rien si aysant (CHART., D. Fort., 1412-1413, 177).

B. -

"Confortable" : Pour ce, je me vueil reposer Ad ce beau matinet plaisant Et mon corps noblement poser Sur ce beau lit mol et aisant (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 371).

V. -

Inf. subst. "Plaisir charnel" : ...il desire amer Et beaulx embrachiers et baisiers, Avecques les autres aysiers, Lesquelz je n'oz pour honte faire (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 10). ...de Titon, son mary, trop debile, Elle [Aurora] habandonne et laisse le cubile Pour recueillir en gratieux baisiers Son doulx aymant et faire les aisiers (SAINT-GELAIS, Séj. honn. J., c.1490-1495, 82).

V. aussi aisé
 

DMF 2020 - Synthèse Pierre Cromer

Fermer la fenêtre