C.N.R.S.
 
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     AIGUILLONNER     
FEW XXIV *aculeo
AIGUILLONNER, verbe
[T-L : aguilloner ; GDC : aiguillonant/aiguilloner ; AND : aguiluner ; FEW XXIV, 124a : *aculeo ; TLF : II, 303a : aiguillonner]

I. -

Empl. trans.

A. -

Au propre

 

1.

"Piquer (un animal) avec l'aiguillon" : ...le cheval par batre et flageler et le beuf par force d'aguillonner durement tirent hors leurs voitures (CHART., Q. inv., 1422, 44). Les beufz (...) lui dirent : "O toy, mauvais villain, pour quoy nous aguillonnes tu ainsi durement...?" (...) le charreton les aguillonnoit et stimuloit de plus en plus (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 232). Car les autres bouviers entierement et tant qu'ilz povoyent, aguillonnoient les beufz pour plus tost courir et aller (LA VIGNE, V.N., p.1495, 302).

 

2.

"Piquer comme avec un aiguillon" : ...le basilicque convoitoit assaillir et mordre la tortue et l'entoxiquier, mais la tortue tiroit en son escaille et sa teste et ses piez tellement qu'il ne la pouoit atouchier. Et, depuis aprés, si boutoit la teste hors et en mordoit et aguillonnoit le basilicque de ses dens et de ses ongles. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 269). Ilz seront attendus, Avironnés, assiégés, assaillis, Aguillonnés, assommés, abatus, Anichilés, agressés, appalis, Acouvettés, affamés, assourdis, Decapités, decoppés, detailliés (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 72).

B. -

Au fig.

 

1.

Aiguillonner qqn

 

a)

"Stimuler qqn" : [Cest amour doulx et devot] me proffite a exciter et aguillonner mon ennuyeuse negligence et tepidité (Disc. amour divine, 1470, 247).

 

-

Aiguillonner + inf. : Sy fu moult dolant Olivier sur toutes riens, cuidant par son oultrecuidance, naissant de jeunesse, qui l'esguilloinnoit vaincre tout par lui la bataille (Garin Mongl. K., c.1460-1465, 77).

 

b)

"Harceler, accabler" : Aguillonnez sui de mes anemis Qui en mon cuer ont meintes peinnes mis. (MACH., Compl., 1340-1377, 251). ...sa femme l'aguillonnoit De nuit et par jour le poingnoit (DESCH., M.M., c.1385-1403, 32). Maiz une chose te vueil dire, Deprïer et amonnester : Que des aguillons molester Tu ne vueilles ceste espousee, Dont tu as l'autre aguillonnee (Gris., 1395, 94). ...il [le clergé] vit les parolles trop multiplier et approucher aux faiz et qu'il se senti point et aguillonné de la charge que chascun boutoit de soy pour verser sur lui (CHART., Q. inv., 1422, 44). D'oyr ainsi ce prescheur blasonner, Larder, picquer et trop esguillonner Noz mignonnes de Paris excellentes, Cela me feist quelque peu estonner (MAXIMIEN, Avocat dames Paris M.R., c.1485-1490, 15).

 

-

La chair aiguillonne / Estre aiguillonné de la chair. "Être harcelé par la tentation de la chair" : La char moult fort vous aguillonne (MARTIN LE FRANC, Champion dames II, D., 1440-1442, 205). ...une femme en Tuscane, de nouvel mariee, fut conviee avecques aultres femmes a aler a la Dedicacion de l'esglise saint Sebastien ; et, la nuyt qu'elle devoit aler la, l'endemain, elle fut aguillonnee de la char et ne se peut tenir de son mari. (BATALLIER, Lég. dorée D.-L., 1476, 234).

 

.

Aiguillonner une femme. "Susciter le désir chez une femme" : Pour ce doivent il estre chastes et honestes qu'il ne aguillounent point les femes par fait ne par signes (FERRON, Jeu eschaz mor. C., 1347, 175).

 

c)

"Agacer, provoquer (par des paroles)" : Il se tenoit avecques ses escuiers, desquelx il se alloit d'aucuns moquant de leurs amouretes, et les aultres alloit aguillonnant qui alloient guignant ces dames et ces damoiselles, de quoy partie em blasmoit et partie en louoit, comme celuy a qui il ne chaloit emplus de l'une que de l'autre (BEAUVAU, Troyle B., c.1455, 562). Et, en souppant, commencerent à parler de leurs victoires en la presence de leurs dames, tellement que l'une d'elles, c'est assavoir, la dame de cellui qui avoit rescoux son frere, le commença à exaulcer et haultement le loer (...) Et tellement parla et aguillonna l'autre dame par son langaige qu'elle se prinst à dire qu'elle disoit mal et qu'il n'en estoit riens, mais avoit le moins fait et plus villainement que l'autre, qui, par sa hardiesse, s'estoit bouté et meslé parmy les adversaires. Et tant parlerent qu'elles vindrent au desmentir. (BUEIL, I, 1461-1466, 126).

 

d)

"Tourmenter (par des inquiétudes qui harcèlent)" : ...[Entendement] se attendoit estre par elle [Foi] enluminé et getté hors dez doubtes qui le aguillonnoient (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 28).

 

2.

Aiguillonner qqc. "Stimuler" : La serosité du lait qui aguillonne la vertu expulsive des boyaux (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 226).

 

-

Aiguillonner qqc. à + inf. : Se vos desirs n'aguillonnez A vivre vertueusement (...), Certes vous faillez grandement (MARTIN LE FRANC, Champion dames III, D., 1440-1442, 70).

II. -

Part. prés. en empl. adj. Aiguillonnant. "Stimulant, excitant" : Sy lui commencerent a enflammer les vaines du cuer du desir qu'il avoit de parler a elle, mais tant estoit la voye mauvaise qu'il ne sçavoit comment parvenir a elle. Et pour l'aguillonnant ardeur qui lui embrasoit le cuer il mist pié a terre pour mieulx ramper amont la roche (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 734).

III. -

Part. passé en empl. adj. Aiguillonné

A. -

"Pourvu d'un aiguillon" : ...les hameçons plaiez [pour ploiez] et retors [recourbé] et aguillonnez sont plus fort fichiez et tiennent plus que les coutiaux drois (FOUL., Policrat. B., VII, 1372, 514).

B. -

CHASSE [Des fumées du cerf] "Terminé en pointe" : Aprés li vueill aprendre a conoistre et juger les fumees du cerf, quar aucunne foiz les getent en torche et aucunne foiz en plateaux, aucunnes foiz fourmees, aucunne fois aguillonnees, aucune foiz entees (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 151).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Pierre Cromer

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