I. -

Empl. trans.

A. -

Affiner qqc.

1.

"Mettre fin à qqc., mettre un terme à qqc., faire cesser qqc." : ...puis que li sires estoit en prison, s'il pooit prendre le ville, le chastiel et le contesse, il aroit tost sa guerre afinée. (FROISS., Chron. L., II, c.1375-1400, 142). ...Dieu priez (...) Que (...) Tellement leur querelle affine Et attrempe conme vray juge, Que chascune partie y juge Prouffit avoir. (Mir. ste Bauth., c.1376, 136). Or ay tost oubliée Ce qui est devi Et par mort affiné. (MACH., Lays, 1377, 474). Long temps fu ly roys Elinas en la montaigne, et tant que la mort, qui tout affine, le prist. Lors vint Presine et l'ensevely en une si noble tombe que nulz ne vit oncques si noble ne si riche. (ARRAS, c.1392-1393, 14). Au juste quel merveille rigle est ta doctrine ! Des pecheurs es miroir, de vie discipline, Aux traveillés repos qui tout labeur affine, Aux povres langoureux souveraine medecine. (Livre Rossignol. N., c.1400-1420, 63). ...oncquez ne traveillerent leurs subgez, anchois lez gouvernerent paisiblement et sagement tant que la mort, qui tout affine, les osta de ce monde. (Comte Artois S., c.1453-1467, 153). ...sy trouva [le roy d'Engleterre] par deliberation de conseil que le mieulx que ses hommes puissent faire est de trouver maniere d'affiner la guerre et traictier avoec les Francois, se ilz s'y veullent consentir. (Jehan d'Avennes F., c.1465-1468, 146). ...a force d'eaue n'est pas bon qu'on affine La nature de humaine terrestre (Cene dieux, c.1492, 120).

2.

"Mener qqc. à sa fin ; accomplir qqc." : Pour Dieu, ce chemin affinons Isnel le pas. (Mir. enf. ress., 1353, 52). Sathan, pense de cheminer Et de nostre cause affiner - Peril nous est en la demeure - Et vous presentez avant l'eure. (Myst. Adv. N.D. R., c.1360-1365, 57). Croi dont en la virtu trine, Un seul Dieu qui tout affine (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 235). Au quel parlement, il y eut pluiseurs trettiés et langages mis avant, et parlementèrent plus de quinze jours. Mais riens n'i fu acordé ne afiné (FROISS., Chron. L., II, c.1375-1400, 85). Prenés example au Dieu des dieux Qui povre et nudz de corps et d'ieux Vault naistre, mourir et finer Pour ceste vertu affiner. (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 48).

-

En partic. "Accomplir les écritures" : Jhesu Crist, Qui des propheties l'escript Tout acomplit et affina... (Mir. st Panth., 1364, 337).

3.

Affiner un compte. "Apurer, arrêter un compte" : ...appartient à lui [le duc de Bourgoingne] la paix du païs à garder et gouverner le pueple par la verge de justice et lui affiner tous les comptes par loyaulté (Cout. bourg. glosé P.M., c.1380-1400, 84). Item deux comptes, oys et afinez le premier jour de sept. mil CCCCXXXJ, de ses terres du Perche. (Invent. test. Surreau Foville F., 1435, 151). ...de oyr ou faire oyr les comptes que Jehan de Village et autres patrons des galées qui appartenoient audit Cuer, sont tenuz de rendre, et iceulx comptes clorre et affiner, et mectre le reliqua ès mains de nosdiz receveurs (Doc. 1453. In : Aff. Jacques Coeur M., 1453-1457, 16). ...les quatre comptes dudit Guinot, de quatre années escheues le derrenier jour de janvier derrenièrement passé, ont esté clouz, concluz et affinez (Aff. Jacques Coeur M., 1453-1457, 294). Et ausquelz gens de nosdits comptes à Angiers, présens et à venir, et leurs successeurs, nous avons donné et donnons par ces présentes faculté, puissance et auctorité d'oïr, clore et afiner les comptes de tous et chascuns les receveurs de nostre domaine dudit païs, maistres de noz eaulx et forests, segraiers, maistres des euvres et repparacions, receveurs des francs fiefz et nouveaulx acquestz, peiages, truages et autres entremises quelzconques (Roi René vie L., 1480, 385-386).

4.

"Définir, déterminer" : L'actente nous est grefve et dure Et si longue espace nous dure Que ne le sçarions affiner. (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 370).

-

"Affirmer, assurer" : Pecherres, pour certain t'afin Que tu avras mauvaise fin (JEAN DE LE MOTE, Voie d'enfer P., 1340, 142). Nuls n'osoit fours issir pour le cri qui affine Chis qui en isteront seront en grant corine. (JEAN D'OUTREM., Geste Liège B.B., t.2, a.1400, 738).

B. -

Affiner qqn

1.

"Venir à bout de qqn" : Il n'est si fin qui n'aist ung tour de pine ; Le seigneur est mengiet de l'officier Et l'officier de le gouge fort fine ; La gouge trouve ung paillart qui l'affine, Le gros paillard des poux se voit rongier Et les gros poux du lait singe mengier : Ainsy ne vault le monde ung bout de fringe. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 639). ...bien oultrageux, sur mon ame, [Cestuy] qui les affinera [les femmes]. (B. veoir, p.1480, 19). LE CRESTIEN. Oncques Pathelin affiner Ne peult son drappier si a point Que l'affineray [le juif], car a point Ay son or par pathelinaige. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 96).

2.

"Venir à bout de la maladie de qqn" : Mire devenray si sené Qu'il ne sera mal quel qu'il soit, Se de ma main cure reçoit, Que je ne garisse et affine (Mir. st Panth., 1364, 319).

3.

"En terminer avec qqn ; achever/tuer qqn" : D'ardant desir pris et atains, Tains sui, et ceste ardeurs m'afine. (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 187). ...tant qu'il aviengne Que par nature aage l'affine [le roy], Si que vie humaine en li fine (Mir. ste Bauth., c.1376, 108). Lors s'escrie le soudant : Avant, frant Sarrasins. Par Mahon, s'il nous eschappe, je n'auray jamais le cuer joyeux. Qui cestui pourroit avoir affiné, le remenant ne feroit que un pou a doubter. Lors fu Gieffroy assailliz de tous costez, et il se deffent hardi comme lyon, que mal soit du Sarrasin qui a coup l'oze attendre, mais lui gettent de loing lances et dars, et lui traient sang en pluseurs lieux. (ARRAS, c.1392-1393, 232). Paour horent [Rommains] d'estre affiné Par celle quantité de gent, Qui trop les aloit dommagent. (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 1). Mort chascun mort, mais Renommee fine Triumphe sus Mort, qui vivans affine Et presse au pied tous mordans dissolus (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 586).

II. -

Empl. intrans. ou pronom.

A. -

Qqc. s'affine

1.

"Arriver à son terme, prendre fin" : Metés ce chrestïen tout a vostre commant (...) Et n'ait que pain et eaue, et s'il peut vivre tant Que vostre guerre voit nullement affinant, Dont le pourrés destruire trop mieulx que maintenant (Tristan Nant. S., c.1350, 711).

-

"S'abattre qq. part (où le mouvement s'arrête)" : En la chair est entreis, si qu'ilh a fait saguine La tieste et lez cheveals et jusques en l'esquine ; Sus le chief de cheval ly espee s'affine, La tieste li trenchat comme fuelhe d'espine (JEAN D'OUTREM., Geste Liège B.B., t.4, a.1400, 641).

2.

"Se réaliser" : Fay que ton bon propos s'affine Seurement (Mir. marq. Gaudine, 1350, 159).

B. -

Qqn s'affine

1.

"Rendre ses comptes" : ...il c'est lessé deffaillir a certaine journée qui luy avoit esté assignée pour venir compter et soy afiner en ladicte Chambre de la recepte dudit guernier (Rouen temps Jeanne d'Arc L., 1424, 66).

2.

"S'acquitter (envers qqn)" : ...et avecques ce nous voulons et vous mandons que au dit Edouart vous suspendés ses gages qu'il prant à vie sur nostre dit tressor pour causse de son office, et que aucunne chosse vous ne luy an comptés ne paiés, tant du tamps passé comme à venir, jusques à ce qu'il ait compté et se soit afigné par devers vous de tous les fais dont il s'est antremis depuis le temps qu'il fu premierement ordené en l'office de monsseigneur et de nous... (Mand. Ch. V, D., 1372, 465).

3.

"Être au comble de ses souhaits" : Elle a de moy, qui bien vault soie, De laine chainturelle fine ; Et j'ay, dont plus mon coer s'affine, Chapelet qu'elle m'a donné, D'un vert englentier boutonné. (Pastor. B., c.1422-1425, 77).

4.

"Mourir" : Ainçois que le malade afine, Li dourra tele medecine Qu'il sera tost resuscité De grant maladie en santé. (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 5). Et vos cuers, pour qui je m'affine, Com dur affin, Desir a fin De mettre à fin Le mien las, qui d'amer ne fine. (MACH., Lays, 1377, 292). Voy que je m'affine Pour ma dame fine (MACH., Lays, 1377, 310).

-

"Se tuer" : Cescuns a bien tel hardement Qu'il ont entre yaus grant mautalent, De che que plus tos ne s'afinent. (FROISS., Méliad. L., t.1, 1373-1388, 163).

5.

S'affiner à qqc. de + inf. "S'attacher à ; se proposer comme but" : Mais vous savez que d'amer tous m'affine De cuer, de corps et de volenté fine. (MACH., L. dames, 1377, 73). Tout coeur a joye s'i affine, Prudence n'y vault ung festu Ne Conscience, s'elle est fine. (MARTIN LE FRANC, Champion dames I-II, P., 1440-1442, 42).

III. -

Part. passé en empl. adj.

A. -

[D'une chose] "(Qui est) terminé, mené à bonne fin" : Pris sui ; la chace est afinee. Amours par bonne destinee M'a vaincu, et c'est mes pourfis, Car or sui je de ce tous fis Que mius en vail et doi valoir. (ACART, Prise am. H., 1332, 54). Quant leur consaus fu affinez, Li juges s'est vers moy tournez (MACH., J. R. Nav., 1349, 281). Une cité moult renommee Y ot (...) Qui du regne jadis fu chief Grant et poissant, combien qu'a chief Soit a present et affiné. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 276). Ainsi se passa celle annee, Et quant auques fu affinee, Polinicés (...) Si dit (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 301).

-

[Avec valeur négative] : ...il [un pont] n'est ne puissant ne bon Mais tout molu et affiné (Myst. siège Orléans Ha., c.1480-1500, 151).

B. -

[D'une pers.]

1.

"(Qui est) tué, mort" : Et sont mes compaignons tous mors et affinés et moy prins en vostre voulenté. (Saladin C., c.1465-1468, 57).

2.

"(Qui est) identifié (?)" : Vous leur estes ung peu trop fermes. Sathan, compte nous en brefs termes Si ce Jhesus est affiné. (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 28).