I. -

Empl. trans. "Acquérir, obtenir, entrer en possession de"

A. -

Qqn acqueste qqc./qqn

1.

Acquester qqc.

a)

[Une chose concr. : bien, richesse, terre...] : Princes, ne puet avoir tresors Au jour d'ui, ne terre acquester Aucuns, s'il n'est sires trop fors, Sanz veoir, oir, ne parler. (DESCH., Oeuvres Q., t.1, c.1370-1407, 187). Et celi qui de tous est le greigneur, le premier nez et engendréz des mors et prince des roys de terre, si afferme que ce n'est pas chose possible que servir a Dieu et a monnoie ; car "monnoie qui est aquestee et assamblee commende ou sert a chascun" [citation de Horace, Ép. I, 10, 47 : imperat aut servit collecta pecunia cuique] (FOUL., Policrat. B., III, 1372, 235). Je n'ay mie plenté d'avoir En cest dolent siecle acquesté, Ou j'ay ja par lonc temps esté. (LE FÈVRE, Respit Mort H., 1376-1380, 5). ...aprés s'en part Alixandres (...) et tousdiz acqueste Avant soy terre, sanz arreste. (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 54). SATHAN. Par ce moyen, en peu d'espace Acquester pourras de grans biens, Grant bruyct, et honneurs terriens, Maintenue comme une princesse. (Myst. jeune fille L., c.1413-1445 [c.1530], 14). Ne laissiez plus le dormir a grans sommes En vostre lit par nuyt obscure et brune Pour acquester ricesses a grans sommes (TAILLEV., Rég. fort. D., c.1445, 238). Ne possessez riches parures, Tresors ne dorees sainctures ; Malette en voye ne portez Ne deux vestemens n'acquestez, Verge ne chaussement en piéz [cf. Matth. X, 10]. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 160). LE PÉRE. Mes chers enfans, presupposez Que cest arbre j'ay conquesté, A l'aide Dieu, et aquesté ; A vous troys le vueil departir. (Myst. Viel test. R., t.4, c.1450, 343). Car, puisque vous estes meu d'aller à la court, ou vous y voullez aller pour acquester aucun don et trouver aucun gratiz, et puis avez entencion de retourner à la guerre, ou vous y voullez demourer de tous pointz. (BUEIL, I, 1461-1466, 45). N'avons nous pas du duc Guillaume Qui la feit festier en sa terre [la Vierge Marie], Dont il acquesta le royaulme Et tout le pays d'Angleterre ? (MART. D'AUV., Mat. Vierge L.H., c.1477-1483, 51).

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Empl. abs. "Acquérir des richesses, s'enrichir" : Alors Phelipe n'y fu mye, Car allé s'en fut par navie Concquester en divers païs, Tousjours d'aquester ententis. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 99). Aussi comme avarice pense de nuytz et de jours a acquester et amasser a tort et a droit, aussi charité et misericorde pensent a acomplir les sept oeuvres de misericorde. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 43). ...on voit evidanment que se ung compaignon est recepveur, ou se mesle en aucune maniere de finances, voire clerc des clercs d'un homme de finance, il acquestera et ediffiera. (JUV. URS., Verba, 1452, 282). Tel d'acquester moult se soucye Qui n'a ne enfant ne suyvant (ALECIS, Faintes monde P.P., c.1460, 94).

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[Avec un adv. de quantité] : Tant acquesta, tant amassa Que tous aultres d'avoir passa : Avoir ama et le tint tant Qu'aux fourches en fu baliant (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 31). Et en tous fais et en tous dis Les puissans doit aplanier Par souples mos et festier, Et leur porter grant révérence, Car on puet moult acquester en ce (JACQUES BRUYANT, Voie pauvreté richesse P., 1342, 27). Si est bien folz qui tant acqueste En faisant male extorcion Pour si petite porcion. (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 16).

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Ne pouvoir rien acquester. "N'avoir rien à gagner" : Adont Job luy baille des vers qui sont sur luy et Satham dit : Je vous en tiens pour excusé. Icy ne puis rien acquester ; Ailleurs m'en voiz sans arrester. (Pac. Job M., c.1448-1478, 357).

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DR. "Acquérir par un acte juridique" : ...lequel fiéz est de XV jours de terres arables et de III fauchées de préz, ou environ, assis en divers lieux, ou ban de Lume et parmi nagaires acquestéz à Willaume de Lume. (Trés. Reth. S.L., t.2, 1383, 294). Le mary peut bien acquester héritaiges du meuble commun de luy et de sa femme sans la y appeller ; et aussi sans son consentement peut il vendre et aliéner teulx acquestz, les chargier et encombrer, et les donner constant le mariage. (Cout. instit. Anjou Maine B.-B., t.1, 1411, 508). ...les gens du Sepulcre aquesterent à deux fois de maistre Bureau Bouchier LX livres de rente sur le moulin du Chauffour (FAUQ., II, 1421-1430, 362). Jugement (...) que dit coment ung home prenoit ban sus cens qu'il avoit acquaisteit a ung jonne homme, les quelz bans on li escondisont pour debte que cil que le cens avoit vandut debvoit (Jug. maître-échev. Metz S.M.S., t.1, a.1494, 1334], 106-107).

b)

[Une chose abstr. : un bien ou un profit d'ordre non matériel]

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[intellectuel] : ...s'uns vrais amis Qui tout son cuer en dame a mis Vuet autres amans frequenter Pour entr'eus science aquester, S'il faisoit einsi que je fis, Je croy que ce seroit profis (MACH., D. Aler., a.1349, 246).

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[moral] : Et prie Dieu de Paradiz Que pourfiter puissent mes diz A ceulx qui vouldront escouter, Et qu'ilz puissent meurs acquester Et a la gloire parvenir Qui durra toujours, sans faillir ! (CH. D'ORLÉANS, L. péché C., 1404, 550).

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[spirituel] : Per heritaige i'ai aqueisteit et acquis tes tesmoingnaiges a tou iour mais, quar il sont toute la ioie de mon cuer [Ps. CXIX, 111] (Psaut. lorr. A., 1365, 127). ...elle delaissa du tout sa mauvaise vie, et vesqui en si grant repentance qu'elle en acquesta paradis. (Nouvelles inéd. L., p.1452, 98). Se tu meurs comme bon catholique, tu aras le merite du royame des cieux, ou est tout le bien que l'en pourroit penser, dire ne ymaginer, et plus sans comparaison, a tousjours mais ; en toy est de l'acquester et de le perdre. (Nouvelles inéd. L., p.1452, 105). Consentez que je me desveste Et pour l'amour Dieu acquester Avoecques vous la here veste. (DU PRIER, Roy Adv. M., 1455, 370). ...et nous doint Dieu si bien nous contenir envers luy et envers elle aussy que nous puissions acquester le royaume de paradis. (MIÉLOT, Mir. N.D. L., 1456, 136). Se tu as couvoitié sapience garde les commandemens nostre seigneur le te doura pour laquelle cose moult est à garder obedience affin qu'on puist aquester sapience (Psaut. Ludolphe le Chartreux D., c.1495, 79). Plus grant bien ne veulx acquester Que de vivre en religion. (LA VIGNE, S.M., 1496, 406).

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[affectif] : Lors dist la dame : "Or sachies sans doutance : Autrui blamer en bien nului n'avance, Et poi a bien en celui, qui diffame Autrui lontaing pour l'amour de sa dame. Ne amour n'i doit aquester, Ains toute haïnne conquester." (Dame Lycorne G., c.1349-1350, 143). ...chascun se pourvoye D'avoir dame ; et ce n'est pas merveille, Car en verté, c'est joye nompareille Que l'en puisse de bouche racompter. Advise toy, doncques, si t'appareille Pour ce grant bien en ta vie acquester. (GARENC., Poésies N., 1389-1415, 65). Car qui loyaument Veulent acquester Bon guerdonnement, Maint mal endurer Leur fault, et souvent A rebours trouver tout leur pensement. (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 98).

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P. iron. : Et disoit le dict demandeur que ung sien frere et compaignon d'armes acquesta ja pieça d'une trés belle dame ung baiser toutes les sepmaines, dont il a longuement joui. (MART. D'AUV., Arrêts Am. R., c.1460-1466, 61).

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[soc.] : Li autre, qui miex miex, l'un a l'autre joustérent : Il tuérent chevax, escus escartelérent, Il voidiérent des rans et leurs lances brissiérent ; Chascun le fist si bien c'onneur i aquestérent. (Brun de la Mont. M., c.1350-1400, 75). ...Monseigneur de Gaucourt (...) a grandement travaillé son corps au service du roy ; tellement que, veu son vieil âge, qui est de quatre-vingts ans et plus, il acquesta ung grand honneur (CHART. J., Chron. Ch. VII, V., t.2, 1437-1464, 136). ...la quelle fut trés parfaittement bonne, chaste, charitable, sobre et sage, laquelle si bien se gouverna que bonne renommee et l'amour du peuple en acquesta. (Nouvelles inéd. L., p.1452, 49).

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[jur.] : ...le prince les doit maintenir et conserver en leurs previlleges, franchises et libertez que eulz ou leurs predecesseurs, par leurs services et bien fais, ont acquestez (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 20).

2.

Acquester qqn

a)

Acquester un ami/une amie. "Se lier d'amitié avec qqn" : Il a son temps gasté, Car il n'a c'un petit encore ci esté, Et si veut ja avoir une amie aquesté. (Brun de la Mont. M., c.1350-1400, 132). Nul ami n'y ai acqueste. Chascun m'i est enforeste, Moi adrecier ne scai a cui (GUILL. DIGULL., Pèler. âme S., c.1355-1358, 32).

b)

"Rechercher [un malfaiteur]" : Jugement (...) que dit qu'il ait tousjours a Owignei .VII. acquaistour pour acquaisteir lez malfacteur (Jug. maître-échev. Metz S.M.S., t.1, a.1494, 1337], 158).

B. -

Qqc. acqueste qqc.

1.

P. personnif. [Dans un cont. métaph.] "Prendre possession de, se saisir de" : Amours ravit Les cuers, et pas ne s'assouvit. C'est un oisel qui de cuer vit ; Oncques nul tel oisel ne vit. Maiz plus honneste Est il de tant comme il acqueste Pour sa proie et pour sa conqueste Le plus noble desus la beste, Quel part qu'il gise. (CHART., L. Dames, 1416, 267).

2.

"Conquérir, gagner sur" : Mais tant est que celle foy bestielle prospère, multiplique, aqueste et soubzmet l'estat de la crestienté [il s'agit ici de l'Islam qui s'installe dans des territoires jusqu'alors chrétiens] (Passage Terre Sainte Piloti D., 1441, 51).

II. -

Empl. pronom. à sens passif. "Être à gagner, à acquérir" : LA FEMME. En ouvrage où rien ne s'acqueste, C'est grant follie d'y quester ; Car de soy charger de tel queste, Je ne vaulx pas le requester. (Colin loue dép. Dieu T., c.1485, 148).