I. -

Empl. trans.

A. -

Au propre

1.

Acheminer qqn

a)

"Mettre en chemin, faire partir" : Tantost le sire de Rocqueton despartit à tous ceulx qui devoient faire les escoutes, le payz où ilz devoient aller, et leur bailla guides pour ce faire. Et luy voulloit estre guide de Guyon de Perrouse, pour parler à lui et l'instruire au mieulx qu'il pourroit. Et le mena es lieux qu'il pensoit estre les plus dangereux. Il achemina tous les autres ; et lui sembloit bien que c'estoit gens assez instruitz à ce qu'ilz auroient affaire, et pour ce ne leur dit riens. Mais prist son chemin avecques Guyon et s'en allerent aux escoutes. (BUEIL, I, 1461-1466, 203).

b)

"Conduire, accompagner" : Escoutez moy parler a plain : Que vous soiez acheminé Par le duc grec, lequel mandé M'a la nouvelle, et ly ditez Qu'il faice querir les hermites (DU PRIER, Roy Adv. M., 1455, 265).

c)

[D'une réalité abstr.] "Amener" : Monseigneur, dire je vous ose La cause quil nous achemine : Une estoille quil enlumine Tout le monde de sa lumiere, Nous monstre par verité clere Que le Roy des roys cy est néz. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 84). RAULET. Des bon nuyt, hay ! RAOUL MACHUE. Dieu gard Raulet Mon frere, avec ma seur Lubine ! Mon Dieu, et qui ["qu'est-ce qui"] vous achemine ? C'est grand nouveaulté de vous veoir. (Maistre Mim. T., c.1480-1490, 238).

2.

Acheminer un cheval. "Mener, diriger" : Guyons ly bons prevost, cuy proeche enlumine, Où voit ly roys franchois son cheval achemine (JEAN D'OUTREM., Geste Liège B.B., t.2, a.1400, 608). Et Gaufrois li gentis, qui fut de franche orine, Partout où voit Charlon son cheval acemine (JEAN D'OUTREM., Geste Liège B.B., t.2, a.1400, 635).

B. -

Au fig.

1.

"Diriger" : De trestous ceuls que je formay et fis Estoit la fleur et la droicte eslicture, Qui en po d'ans a plus de faiz fenis Et qui mieulx a cerchié toute aventure, Et par qui acheminée Estoit d'armes la tresdouce contrée, Qui pour sa mort en grant dolour redunde (DESCH., Oeuvres Q., t.2, c.1370-1407, 30). Celui par qui fusmes acheminéz, Savoir pouez qu'il a esté tuéz En la meslee ; Mais le compte avecques son armee, Sa bataille a esté bien desarmee (DU PRIER, Roy Adv. M., 1455, 121).

2.

"Mettre sur la bonne voie" : Amours les ignorans aprent, Amours les sages enlumine, Amours les oultrageux reprent, Amours les errans achemine (MARTIN LE FRANC, Champion dames I-II, P., 1440-1442, 121).

II. -

Empl. pronom. "Se mettre en chemin" : Et quant je l'os bien atachie, Par le vergier, sans compaingnie, Moult liés de cuer m'acheminay Et tout droit pris mon chemin ay A une sente po batue, Pleinne d'erbe poingnant et drue (MACH., D. Lyon, 1342, 165). De Paris est yssus et il s'achemina (Ren. Gennes D.B., c.1350-1400, 93). Li nobles roys s'achemina, Et de chevauchier ne fina Parmi la ville, tant qu'il vint A une porte où plus de vint Estoient ocis à l'entrée. (MACH., P. Alex., p.1369, 91). Lors prent congié de son pere et de sa mere et s'achemine, lui XJe de chevaliers, et s'en va vers Guerrande, ou lieu ou il pense plus tost trouver le jayant Gardon. (ARRAS, c.1392-1393, 240). Temps est que chascun s'achemine : Nous avons grant voyaige a faire. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 99). Ainsi partist et s'achemina le duc Baudouyn et sa compaignie. (BUEIL, I, 1461-1466, 212). Pour les Bourguignons, les conduysoit le conte de Sainct Pol ; pour les ducs de Berry et de Bretaigne, Oudet des Rye, depuis conte de Commynges, et le mareschal de Loheac, comme il me semble ; et ainsi se achemynèrent. (COMM., I, 1489-1491, 49).

-

S'acheminer à + inf. : Tantost vindrent les nouvelles au conte de Parvanchières comment le duc Baudouyn s'acheminoit à s'en aller. (BUEIL, I, 1461-1466, 212).

-

S'acheminer qq. part : Einsi fis mon chant et finay Et au guichet m'acheminay Par le chemin qui fu tout vert (MACH., R. Fort., c.1341, 111). Droit la nous fault acheminer Et savoir s'y pourrons gaingner Or ou monnoye. (Mir. ev. arced., c.1341, 127). Ainsi s'achemina les grans chemins ferrez (Hern. Beaul. D.B., c.1350-1400, 62). Sur son cheval monta ly enffes sans termine, Parmy l'ost dez paiens vers Paris s'achemine. (Flor. Octav. L., t.1, c.1356, 120). Il s'en parti, et le laissa toute vaghe, et n'eut mies conseil dou tenir ; si s'en achemina vers Vennes. (FROISS., Chron. L., III, c.1375-1400, 28). Lors regarde devant lui, et voit une grosse tour quarree, bien guerlandee et carnelee. Il s'achemine celle part, et ala tant qu'il y vint, et trouva la porte toute arriere ouverte et le pont abatu. (ARRAS, c.1392-1393, 266). Quant on voit blans religieux aler ou chevauchier par les champs, nul ne se doit acheminer celle part pour le lait temps qui par coustume leur survient. (Ev. Quen., I, c.1466-1474, 109).

-

Faire acheminer : Le roy a fait ses otz tantost acheminer Et a fait sez navirez par my la mer singler (Cip. Vignevaux W., p.1400, 40). Le roy dit qu'il s'est trop tenu De venir l'enfant visiter, Se nous a fait acheminer Pour le voir, je le vous affy (DU PRIER, Roy Adv. M., 1455, 331).

III. -

Estre acheminé. "Être en chemin" : A mal eur sommes né, Quant cy sommes acheminé. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 143). Enffens, a la Dieu volunté Il convient estre acheminé Pour faire le commandement De la tres sainte trinité (DU PRIER, Roy Adv. M., 1455, 65). Ma fille, puis c'on a porté Le corps a sa sepuleture, Je vouray estre acheminé Vers Inde (DU PRIER, Roy Adv. M., 1455, 118). Je suis desja acheminé Pour y aller (DU PRIER, Roy Adv. M., 1455, 352).