Au fig.

A. -

Qqc. amielle qqn. "Rendre doux, clément" : Revenon a la bele Marie Qui a toutes gens est amie, Se amender vueulent leur vie ; Mes a dragons est ennemie. Li dragons ce sont li croté Qui par lui de nous sont osté, Qui se mucent en leur tainiere Quant il voient ceste panthere (...). C'est la panthere coronnee, De toute douceur amielee. Les vertus si sont la couleur, Pitiés si est la grant douceur, Qui furent et sont en Marie (Best. lap. Rosarius S., c.1330, 11).

B. -

Péj. Qqn [ou une chose personnifiée] amielle qqn de/par qqc. "Attirer, allécher, séduire" : Et le loudier pugnais Agriffallus Vous amyelle par ses engins gaillars. (LA VIGNE, S.M., 1496, 350).

-

Empl. abs. : Ha, Fortune, tu es la pire De toutes aultres, car donnes regne A aucun que tiens en ta regne, Lequel va tremblant de grant peur, Que ne luy engendrez douleur. Aussi es-tu bien fort a craindre, Car tu viens amieller et oindre, Soubz couleur de bonne raison, D'ung oignement de trahison. Donnas a aultruy de grans biens Qui luy as ousté et n'a riens. (RIVIÈRE, Nef folz D., 1497, 227).
 

Au fig. "Celui qui use de paroles mielleuses, de propos flatteurs" : MICET. Par noz dieux, ta mort me desplait, Aman ; mais, pour venir au point, Bien gourt me sera ce pourpoint. (...) Pour vous le voulloie despouiller Vrayment, mais ung tout seul denier Je n'en eusse pris sans doubtance, Car je croy, sur ma conscience, De cela que c'est tout a vous. GOURNAY. Hellas ! Micet, que tu es doulx ! Quel ouvrier ! Quel amielleur ! MICET. Je vous dy vray. (Myst. Viel test. R., t.6, c.1450, 175).
 

"Flatterie" : Soy vouloir sur autre excuser Est emmiellement trop doulx. (Exc., Science A.R., c.1465-1468, 60).
 

A. -

"Enduire de miel" : Une mont grant merveille vi Dont grandement fu esbahi. Saint Augustin vi qui estoit Haut aus carniaus et [se] sëoit, Et bien sembloit estre oiseleur Ou d'oiseles apasteleur. Aveques li avoit plusieurs Autres grans mestres et docteurs Qui aidoient a amorser Les oysaus et apasteler, Quar pour (les) pasteaus qu'il tenoient Et (la) semence qu'espandoient, Pour leurs enmieles morsiaus Et leurs diz doucereux et biaus Maint(es) gens oysiaus devenoient Et en haut puis (droit) s'en voloient. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 4). Viande enmiellee portoit Sur parchemin qu'elle tenoit (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 396).

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En partic. Emmieller (un cheval). "Enduire le pied d'un cheval d'un topique à base de miel" : Iceulx chevaulx sont desferrez et mis au bas, ilz sont enmielez, ilz ont foing trié et advoine triblee, et leur fait l'en en leur hostel plus de bien a leur retour que en nul autre lieu. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 103).

B. -

Au fig. part. passé en empl. adj.

1.

"D'une grande douceur" : Et qui puet estre plus mieleuse De la pucelle glorïeuse De cui nature est merveilleuse ? Trouvee n'est nul plus piteuse. Miel et douceur en sa pensee, Sa parole fu enmiellee, Son ventre estoit d'autres meilleur. (Best. lap. Rosarius S., c.1330, 73). ...O couronne precieuse, dyademe de nostre salut, tant est doulz et enmiele le rassadiement que tu donnes (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., II, 1404, 187). A voye haultaine et emmiellee, Parmy le flaiolet chantoit [Apollon] De la region estellee. Et moult de choses en contoit. (MARTIN LE FRANC, Champion dames III, F., 1440-1442, 146). ...ains le couvint lendemain matin partir et tirer vers la court pour paistre son amoureux ceur d'un seul regard de la dame ou d'une doulce parolle emmiellee. (Jehan d'Avennes F., c.1465-1468, 104).

2.

"D'une douceur trompeuse" : ...en presentant hardiement au roy proposicions enmiellees, equivoques et d'un grant proffit, ou aucune plaisance royalle bien fardee, en soy vantant courtoisement qu'il saura faire les merveilles. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 327). ...lequel remede j'ay propose pour descharger la royalle mageste, et par espicial ses officiers royaulx, d'un travail et d'u[ne] occasion emmieillie, par laquelle a la miellerie moint officier royal et collateral ont estre prins au miel et encraissiez leurs houseaux, au grant dommage et prejudice du bien publique et du peuple gallican. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 397). Telz a bien la langhe enmielee, Qui a le coer plain de fielee, Et oint par devant bien a point, Mais par derriere souvent point. (Pastor. B., c.1422-1425, 248). Ilz ont leur bouche emmiellee, Leurs langues de mesme emmiellee, Affin que bien les apparcoivez ; De parolles doulces et souefvez, Soubz couleur de bonne amitié, Faignant d'autruy avoir pitié... (RIVIÈRE, Nef folz D., 1497, 317).

3.

"Édulcoré" : [La France se plaint] Tant est que de mes adversaires Ne suy pas seulement foulee, Mais je voy que de mes haussaires Suys plus vilainement pestelee. Et pour une traitre goulee D'or ou d'argent morir me font. Toute leur guerre est emmielee, Avarice ainsy leur cueur font. (MARTIN LE FRANC, Champion dames I, D., 1440-1442, 131).
 

"Cataplasme à base de miel" : ...pour emmelleures et medecines pour les chevaulx (Doc. 1445. In : Léon Brièle, Collection de documents pour servir à l'histoire des hôpitaux de Paris, Paris, t. 3, 1883, 72). Une bonne enmyerleure ce fait ainxi. Prenes deux potz de vin blanc, une pinte de miel, une once de tormentine, une once de deauté (...) Et faictez tout cecy tres bien boullir ensemble a petit feu et cler. (GUILL. VILLIERS, Hipp. P.-D., a.1456, 148). ...Souvent recreu, faché, tenné, Lasche comme ung cheval estonné A qui fault une emmieslure. (COQUILL., Oeuvres F., 1478-p.1494, 246).
 

"Arbre de la classe des conifères, à feuilles caduques"

REM. Doc. 1336 (Dauphiné, dictum palatium est bene coopertum de optimis postibus de meleze bene clavellatis) ds GDC X, 137c.
 

A. -

"Miel" : Tant estes monde Qu'en Ynde n'a si precieuse jasme De vo douceur vaurroit mieus une drasme Que tout le miel et le sucre et le basme Qui est en monde. (MACH., Compl., 1340-1377, 261). Nous debvons ensievir les es qui vaguent, ilz prendent fleurs a eulx ydoines pour faire le miel (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 128). Et en medicine c'est legiere chose a savoir ce que il est dit du miel et du vin et de ellebore et de cauteres et de incisions. (ORESME, E.A., c.1370, 322). ...vous mesleriez poison angoisseuse avec miel pour vostre dampnement (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 169). Et toutes les instructions D'éviter lors confections Faictes o miel sont à entendre Que nul ne doit adonc les prendre Pour viandes aucunement, En médicine et autrement. (LA HAYE, P. peste, 1426, 117). Miel est de chaulde et sèche nature et mondefie bien, maiz il est inflatif et engendre soif. (LA HAYE, P. peste, 1426, 213). ...telle dame devroit estre despoillee toute nue dez la ceinture en amont et toute reze, puis oindre de miel, puis menee par la ville afin que les mouches li courissent et la picassent (LA SALE, J.S., 1456, 306). Et la doulceur est plus grande ou miel qu'elle n'est en ce qui est mielé. (Somme abr., c.1477-1481, 150). ...tumba de nuyt une rosée melifflue sur les espiz de blé, qui au goust avoit odeur de vray miel (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 120 r°).

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Miel rosat. "Préparation médicinale composée de miel et de pétales de roses rouges" : En tout sirop, ou potion, D'aucunes choses stiptiques Et mesmement aromatiques, Et selon raison les confire, Disposer, ordonner et cuire, O miel rosat à ce valable Ou avecques zucre semblable. (LA HAYE, P. peste, 1426, 117). Miel rosat décline à froidure par cause des roses que il reçoit en sa composition, et conforte et mondifie l'estomac. (LA HAYE, P. peste, 1426, 213).

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Mouche à miel. V. mouche "Abeille" : El(le) semble une cate pelouse Ou a une mousque a mïel. (Path. D., c.1456-1469, 130).

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Mouchette à miel : ...les mouchetes a miel (CHART., Q. inv., 1422, 65).

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Le miel et la cire. V. cire

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En avoir ou miel ou cire. V. cire

B. -

[Symbole de la douceur] : Quant on la cuide [Fortune] charitable Elle est avere, Dure, diverse, espouentable, Traïtre, poignant, decevable ; Et quant on la cuide amiable, Lors est amere. Car ja soit ce qu'amie appere, Douce com miel, vraie com mere, La pointure d'une vipere Qu'est incurable En riens a li ne se compere, Car elle traïroit son pere Et mettroit d'onneur en misere Desraisonnable. (MACH., R. Fort., c.1341, 34). LA DAME. (...) Vierge mere au doulx roy des rois, Dame de la terre et du ciel, Doulce en penser plus que nul miel (Mir. enf. ress., 1353, 75). ...mon esperit est doulx conme miel et mon heritage plus doulx que la raye de miel. (Mir. Pierre Changeur, c.1378, 229).

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"Douceur" : Or parlerons ça en arriere A son tour chascun et chascune, Mais, tout ainsi comme la lune Resplendist plus que les estoilles, De tant est plus hault vostre voiles, Vo parler, et vostre pratique Qui du bon miel de rethorique Passe de nous autres le sens (DESCH., M.M., c.1385-1403, 319). Je te prie ne venir a moy pourtant miel en la boche et fel au cuer (LA CÉPÈDE, Paris Vienne K., 1432, 174).

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RELIG. [À propos de la Vierge] : Vierge, du lait de ta mamelle Nous arouse et de ton doulx miel Nous adoulcis (Mir. pape, 1346, 396).

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Se laisser prendre au miel. "Écouter les flatteurs" : "Vous autres roys et grans princes", dist la royne, "avez une coustume, c'est assavoir que assez legierement vous vous laissiez prendre au miel, voyre par les veneurs courans moyenne la brochete ["chienne de chasse", symbole de la flatterie]..." (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 327).
 

Région. (Picardie)

A. -

"Maladie des céréales, en partic. du blé dont l'épi devient visqueux et prend une saveur sucrée, maladie attribuée à l’influence des brouillards" : Aurugo (...) : mielas des blés (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 38).

Rem. Doc. 1400-1500 (Valenciennes, miellas des bles [l. blés]) ds GD V, 325b. Cf. G. Roques, R. Ling. rom. 58, 1994, 587, pour l'aspect régional.

B. -

P. méton. "Brouillard ou petite pluie fine funeste aux céréales" : ...avec la rosee se mesle aulcunes fois broullias ou mielaz, qui moult empirent les herbes et les fueilles. (JEAN DE BRIE, Le Bon Berger C.W., 1379, 124).

Rem. FEW VI-1, 653a, n.24, sous mel, corrige l'étymologie nĭgĕlla ; v. aussi nieule1.

REM. Ne pas confondre la plante nommée "nielle" qui est nigella arvensis et dont les représentants sont classés s.v. nĭgĕlla (FEW VII, 127-128) et la maladie appellée "nielle des blés" qui représente lat. nĕbŭla (FEW VII, 70a). Comme, du fait de l’une de ces maladies des céréales, l’épi devient visqueux et prend une saveur sucrée, la maladie a été dénommée par un dérivé de la famille de miel. Cf. aussi W.O.Streng, Himmel und Wetter, Suomal. Tiedeakat., 1916, p. 11 et 18. (Remerciements à J.-P. Chauveau qui nous a aidée à démêler ces interférences étymologiques.)
 

"Sucré avec du miel" : Et la doulceur est plus grande ou miel qu'elle n'est en ce qui est mielé. (Somme abr., c.1477-1481, 150).
 

"Attitude de gentillesse, de douceur" : ...Pour ce, mes dames, ne croiez en leurs dictz [des séducteurs], Combien qu'ilz sont assez de Dieu maulditz Et qu'ilz resemblent au serpent infernal Qui fut la cause de nostre premier mal, Car dessoubz umbre d'ung doulx miellement Son ort venin cracha trop malement. (Chasse am. W., a.1509, 357).
 

Au propre. "Lieu aménagé pour les travaux de confection du miel "

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[Dans un cont. métaph.] "Collecte des impôts (?)" : ...lequel remede j'ay propose pour descharger la royalle mageste, et par espicial ses officiers royaulx, d'un travail et d'u[ne] occasion emmieillie, par laquelle a la miellerie moint officier royal et collateral ont estre prins au miel et encraissiez leurs houseaux, au grant dommage et prejudice du bien publique et du peuple gallican. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 397).
 

[Dim. de miel]

Rem. Attesté dans un nom propre, doc.1397, Dijon, ds GD V, 325b.