Empl. trans. "Vider (un lieu) de ses habitants" : Celle isle a toute deshabitée ung serpent qui y est et n'y laisse vivre nulle creature fors ceulx qui habittent en ladite chappelle (Voy. Jérus., c.1395, 7).

-

Part. passé en empl. adj. [D'un lieu] "Vide d'habitants" : Entre Paula et Corfo a une isle deshabitée que l'en appelle Cazopoly (Voy. Jérus., c.1395, 7). Jasfe fut jadis cité bonne et grande, mais a present elle est toute deshabitée (Voy. Jérus., c.1395, 12). ...et à ceste occasion se departent chascun jour du dit lieu de Baugé et s'en vont demourer autre part, et tele maniere que la dicte terre est presque deshabitée, et est en aventure de tous poins demourer depopulée, se les diz habitans n'y ont aucune fortification, où ilz puissent avoir leur retrait et refuge. (Doc. Poitou G., t.8, 1442, 133). Et dist saint Ysidre que en celle province sont XXIII ysles ; mais les XX sont deshabitees pour le tresgrant froit qu'il y fait. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 163). Et y a en icelle bouche une petite islette deshabitée qui part laditte bouche en deux, et est celle devers Alexandrie la plus grande et la plus parfonde comme j'ay sceu par informacion, car nul Cristien n'y ose aler (LANNOY, Voy. amb. P.H., p.1450, 110).
 

"Habitation" : L'aultre [envoi du Saint-Esprit] est invisible, par laquelle est envoié es cuers et pensement de l'ame pour sainctefier la creature. Et cest envoiement se fait afin que habiter et demourer en la creature raisonnable, mais le premier envoiement [par langues de feu] se fait pour demonstrer l'enhabitation des aultres [il faut comprendre "aux autres", "aliis" en latin]. (Somme abr., c.1477-1481, 118).

Rem. FEW : «enhabitacion f. "le fait d'habiter" (England 1484)».

V. aussi enhabiter
 

Empl. trans. "Habiter"

REM. Doc. 1362 (tous les barons, nobles et autres subgis et enhabitantz lesdites provinces), 1417 ds GD III, 185a.
 

A. -

[D'un lieu] "Où l'on peut habiter" : ...es lieux habitables et atrempez (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 288). Ptholomee dit que es extremités de la terre habitable sont genz sauvages et peut estre que telz genz sont ceulz dont il fait ici mencion, qui se boutent es perilz des guerres impetueusement, senz paour et senz deliberacion. (ORESME, E.A.C., c.1370, 208). ...ceste partie de la terre habitable est loings des conversions du solail, c'est a dire du chemin et des tours que le solail fait quant il est ou signe du Cancre (EVR. CONTY, Probl. Aristote, 1380, XXVI, 14, 210 r°). ...il n'a en ce monde habitable royaume, region, ne empire, que nous n'ayons visite (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 117-118). ...tant que Engleterre sera terre habitable (FROISS., Chron. D., p.1400, 42). Climat, c'est une portion de la terre habitable, et les philosophes devisent toute la terre habitable en sept climatz. (LA HAYE, P. peste, 1426, 182). Et encores plus avant par maniere d'esbatement, soit Jehan demourant avecques les gens qui demorent en Oriant a l'encommencement de la Terre habitable emprés la grant mer ou est la gade, c'est a dire l'enseigne, du roy Alixandre. Et que Martin soit demourant en Occident a la fin de la Terre habitable emprés la gade de Hercules, emviron le destroit de Maroc. Et adoncques entre Jehan et Martin y a la moitié du circuite de la Terre, et avront lez piés l'un contre l'autre. (FUSORIS, Traité cosmogr. G., 1432, 10). Se vous donra [Dieu] (...) Thronne es cieux sainctz pour l'ame confortable ; Illec serés, dessus terre habitable, Loing de mortel peril (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 346). Arnolphus vint après, grant astrologien, lequel escripvit moult compendieusement des lieux de la terre habitable, predist de la secte de Lion que l'on dit des Vauldes et de leur heresie (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 113 v°).

B. -

[D'une pers.] "Qui est tenu d'habiter, de demeurer en tel ou tel lieu" : Les hoirs Colart de la Folie, chastellain d'Omont, habitable an et jour, et Jehan de Villers, chastellain d'Omont, habitable an et jour (Trés. Reth. S.L., t.2, 1364, 166).
 

"À demeure"

REM. Ex. d'a. fr. et doc. 1337, 1339, 1375 (abitablement, habitablement), GUILL. DIGULL., ms. (habitablement) ds GD IV, 393c.
 

A. -

"Habitation"

-

"Demeure et ses dépendances" : Je ne prens exemple que en ce pais. Il y a (...) le recepveur de la prevosté de Laon, qui est le prevost mesmes, et Dieu scet se ou temps passé se le prevost a esté recepveur pour faire son plaisir et laisser les habitaiges du roy en desert et a non chaloir (JUV. URS., Nescio, 1445, 527).

Rem. F. Lot, R. Fawtier, Hist. des instit. fr. au Moy. Âge, t. 2, 1958, 141, indiquent qu'au XI^ème siècle, le prévôt « solde, avec sa recette, l'entretien des châteaux et des bâtiments ruraux du roi. »

-

En partic. "Cellule d'ermite" : A Dieu plaise que ce soit cil [l'ermitte] Que je voy la en lieu essil Devant son petit habitage ! Bien croy que ce soit l'ermitage Ou il maint du tout et demeure. (Mir. parr., 1356, 40).

B. -

P. ext. "Bien, propriété, possession" : Amesurez vostre coraige,Pensez ou royal heritaige [var. habitaige] du païs au Dieu de nature. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 131). Si est le meilleur que g'y voie De touz terriens heritages Guerpir, car de telz habitages A mainte ame male merite (Mir. parr., 1356, 8).
 

"Habitant" : [Le roi donne en fief à Henri de Lusignan le casal de Kiti (Chypre)]...o tous ses drois, razonns, huzages et aparthenances et cetera, et en vilains et vilanes o lor anfans mermiaus, tous ceaus qui ce trovent o jour de huy abitains o dit leuq (Livre remembr. Chypre R.P., 1468, 88). [Seul ex.]
 

"Lieu où l'on habite, demeure"

-

Faire habitance. "Habiter" : Aprés, yceulx leur remanderent Que (...) Loings de mer habitance feyssent (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 250).
 

"Celui qui demeure, qui séjourne habituellement dans un lieu, habitant" : A toutes generations, Pueples, langues et nations, A tous les habitans dou munde Soit grace et pais qui leur habunde ! (MACH., C. ami, 1357, 46). Et les habitans vers le pole antartique sont en un hemispere qui est desus et vers destre, et nous sommes en un hemispere qui est desous et vers senestre. (ORESME, C.M., c.1377, 346). ...au temps d'iceulx crimes par lui commis, il estoit mariez et habitant du royaume (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 392). En laquelle ville, celle nuit, il qui parle oy dire publiquement et tenir par les habitans d'icelle ville que ledit mons. l'evesque de Poitiers estoit fait nouvellement arcevesque de Sens (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 521). ...tout l'argent qu'ilz povoient avoir et exiger des habitans dudit pays, et par vertu desdites faulses lettres, ilz mettoient en un sac, lequel argent ilz portoient ensamble, et en ont eu plusieurs sommes, c'est assavoir : de ceulx de la ville de Nangis, VIIJ s. ; de la ville de Misery, XX s. ; des habitans de Champigny, XX s. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 68). ...en l'estable d'un homme habitant d'icelle ville [Saint-Mathurin], qu'il trouva ouverte, tempté de l'ennemi, mal print et embla les deux chevaux dont il a esté trouvez saisis (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 101). Je vous abandonne la forest pour prendre bois a charpenter, et, quant ly moyne y seront estably, je leur en donne pour leur ardoir, et tous leurs adherens et habitans. (ARRAS, c.1392-1393, 75). Mais quant ilz scorent que le roy estoit mort, si assemblerent leurs gens et se mistrent en mer a bien LX. mille payens, pour venir destruire toute l'isle de Chippre et les habitans. (ARRAS, c.1392-1393, 128). ...elle est amee Des habitans de cellui lieu (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 72). Cedit jour, a esté plaidée la cause des habitans de Bryve la Gaillarde contre messire Remon de Turenne. (BAYE, I, 1400-1410, 89). Et encores pour demonstrer estre ung Dieu et trois personnes, il est escript par le Psalmiste : "Dieu, nostre Dieu nous beneisse, Dieu nous beneie" et cet. Et toutevoies aprez s'ensieut : "Et criengnent", non pas "les criengnent", "tous les fins de la terre", c'est a dire tous les habitans en ce monde autant qu'il s'estend. (Somme abr., c.1477-1481, 124). ...au moïen de laquelle predicion [d'un tremblement de terre], longtemps devant les habitans laisserent leurs lieux et perquirent les lieux plains sans roche. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 112 r°). Maistre Jehan Thibault, natif d'Evreux en Normandie, habitant de Lion, docteur en medicine et bon astrologien, est aussi en grande estime au moïen de ses certaines prenosticacions (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 165 r°). Bourgois et autres de la ville habitans Le festïerent (LA VIGNE, V.N., p.1495, 156).
 

"Qui est habité" : ...lesquelz (...) Avoyent tous fait au roy leurs sermens De faire Napples contree inhabitante, Si d'adversaires la trouvoyent habitante (LA VIGNE, V.N., p.1495, 140).
 

"Celle qui demeure, qui séjourne habituellement dans un lieu, habitante" : Si en fu en pou d'eure telle la renommee que toutes les habitantes des forestz venoient a elle racompter leurs songes (Percef. Compl. R., c.1450 [c.1340], 435). [Ms. C, David Aubert]
 

"Celui qui réside habituellement dans un lieu déterminé" : RAISON à MOÏSE. (...) Jadiz en ce lieu ci endroit Le cornu d'enfer habitoit Et lonc temps par possession I avoit fait sa mansion, Mes pour ce que ce desplesoit A Grace Dieu qui fait avoit La maison pour son habiter, De ces cornes te fist armer, Et la verge baillier te fist, A ce que par toi s'en issist Li desloiaus habitateur Qui en vouloit estre seigneur ; Celui des cornes tu hurtas, Quant tu du lieu hors le boutas. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 23-24). Accola (...) : habitateur (Aalma R., c.1380, 8). Cultor (...) : cultiveur, areur, ahaneur de terres ou hanteur, habitateur ou honnereur (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 102). Aucun pourroit demander comment le juge fera le crime noctoire ; vous devez respondre que par l'evidence du fait, et s'il est habitateur d'iceluy lieu, ou s'il est infourmé par garans que ce soit fame publicque. (Cout. instit. Anjou Maine B.-B., t.2, 1437, 473). ADAM (à son fils) ...Va t'en et fais que l'entree De paradis te soit monstree Dont jadis fus habitateur (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 28). Plus ne seray habitateur En ce lieu ; je m'en partiray (Myst. Viel test. R., t.1, c.1450, 282). ...Par vostre fait seray hayneux Aux habitateurs de la terre Qui contempleront ceste guerre (Myst. Viel test. R., t.2, c.1450, 285). Et pour congnoistre qui furent les premiers habitateurs de l'isle de Gades (...) devons sçavoir que les Tyriens eurent par divin respons qu'ilz devoient envoyer une collonye (...) aux columpnes de Herculés pour y habiter. (Hist. prem. destruct. Troie R., c.1470-1480, 16). L'an .xl.^e Octovian fist nombrer les habitateurs de Rome, lesquelx il trouva en somme cent .xxxi.^m et .xxxvii. (Mer des hist., t.2, 1488, f° 70a [BnF/Gallica]).

-

En partic. "Celui qui habite dans un lieu où il n'est pas né, étranger" : Accola (...) cultor loci in quo non est natus, cultor alienus, advena : estrangier, habitateur du lieu dont il n'est pas (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 5).
 

I. -

"Fait d'habiter qq. part ; lieu où l'on habite"

A. -

"Fait d'habiter qq. part, séjour à demeure qq. part" : Les autres bestes communiquent ensemble en mengier et en habitacion. (ORESME, E.A.C., c.1370, 265). ...car l'eaue est environ la terre... Fors en la partie qui est descouverte pour l'abitacion des honmes et des bestes. (ORESME, C.M., c.1377, 394). ...en laquelle [maison] esconvient faire plusieurs reparacions necessaires pour l'habitacion d'icelle (Sent. Chât. Paris M., II, 1395, 94).

-

DR. "Droit de séjourner (en un lieu), droit de résidence" : ...et se autre chouse ne confessoit que dit est dessus, que l'en lui coppast une des oreilles, et feust bany à tousjours de la ville et habitacion de Paris, et de dix lieues à l'environ, sur peine de la hart. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 235). ...ledit appellant à sa cause d'appel proposer requeroit provision que pendent l'appel joist de l'abitation d'icelle ville de l'Isle, attendu que (...) lesdiz prevost et eschevins l'avoient banni à IIJ ans de ladicte ville, dont avoit appellé, par quoy pendent l'appel devoit joir d'icelle habitation (BAYE, I, 1400-1410, 262).

B. -

[Comme lieu]

1.

"Lieu où l'on habite, logis, demeure" : Mont me sembloit de grant atour Celle cite ens et entour. Les chemins et les alees D'or en estoient pavees, En haut assis son fondement Estoit et son maconnement De vives pierres fait estoit Et haut mur entour la clooit. Mont i avoit de mansions, De lieus et d'abitacions. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 2-3). De tous hommes fu deboutez Pour l'orgueil ou il fu boutez, Et parmi champs, parmi boscages Fu mis o les bestes sauvages. La fu son habitation Maint jour, et pour refection, Toutes les fois qu'il avoit fain, Aussi comme un buef mengoit fain. (MACH., C. ami, 1357, 30). Car bele habitacion est parement et aournement convenient a magnificence. (ORESME, E.A., c.1370, 246). Et c'est bien raisonnable que habitacion humaine soit ou plus noble lieu qui soit sus terre (ORESME, C.M., c.1377, 532). ...les apostres et les disciples avecque la benoite Vierge Marie estoient enfermez pour la paour des juifs dedens l'ostel ou avoit esté faite la cene du grant jeudi a mengier l'aignel de Pasques, ou mont de Sion ; la estoient en grant paour, en doubtes, en soucis dedens ceste habitacion (GERS., Pent., p.1389, 75). Et bastirent ou lieu et pays desert pluseurs fors, villes et habitacions firent, et fu le pays en assez brief temps assez peuplez. (ARRAS, c.1392-1393, 15). Sainte predicacion fait la voye, et lors nostre Seigneur vient en l'abitacion de nostre cuer (CHR. PIZ., Ep. Othea L., c.1400-1401, 177). Ne vouldrent mie dessus terre Leur habitacion acquerre, Et, pour ce, en la mer la fonderent (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 19). ...ce sembloit mieulx receptacles de bestes sauvaiges qu'il ne sembloit estre habitation de gens. (BUEIL, I, 1461-1466, 19).

-

En humaine habitation. "En ce monde" : VERITÉ. ...Sy vueil a ce point pervenir Que tel prince pourroit venir En humaine habitacion, Qui en prenroit compassion (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 46).

-

[À propos d'animaux] : Il n'a pas pris maisons royales Ni les imperiales salles Dont les roix terriens sont [l. font (?)] festes, Mais l'habitation de bestes A pris pour sa nativité [Allus. à la naissance du Christ dans une crèche]. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 44). Cestui predist sur aucune revolucion et grande conjunction que les bestes plus domestiques comme chevaulx, beufz, vaches, chievres, brebis et pourceaulx laysseroient leurs communes habitacions et fuyroient ès lieux sauvages, ce qui advint en ce temps et ne se povoit trouver remede les retenir. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 64 v°).

-

Avoir habitation : ...et la maison, c'est pour avoir habitacion, jouste ce qu'il fu dit de l'ordenance des fins ou premier chapitre du premier livre. (ORESME, E.A.C., c.1370, 333).

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Prendre habitation qq. part. "S'installer qq. part" : Une ville y avoit que Norart apell'on, Mais se fu Mont Auben pour celle establison Pour ce que trestout cil de celle nacion Qui vouloient ileuc prendre habitacion Avoient bois pour neent pour charpenter maison (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 284). Et endementiers Gieffroy regarda contremont les grans fallizes qui sont haultes et droictes, et voit les trois autres hermitaiges par dessus lui, et la chappelle Saint Michiel qui est le Ve hermitaige. Et puis regarde contreval, et se donne grant merveille comment oncques homs osa premierement la prendre habitacion. Et lui sembloit de l'eglise et de l'abbaye que ce ne soient que petites selles. (ARRAS, c.1392-1393, 278). En maintes regions, cascun à sa nature, Ont habitation prises sens usurpure (JEAN D'OUTREM., Geste Liège B.B., t.1, a.1400, 589). ...dou mont de Montmartre avala (...) Une enbusque de gens asés et à fuison, Et vinrent ès marès prendre abitation (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 520).

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Tenir son habitation qq. part : O haultain divin sapient, Qui tiens ton habitation En eternelle region, Je te supply, ne seuffre pas Que nostre compaignon Thomas Soit de ta grace separé Par forme d'incredulité (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 272).

-

[Dans le creux d'un grand arbre] : M'abitacion en feray Ne point d'autre maison n'aray (Mir. st J. Paulu, c.1372, 118).

-

[Dans un cont. allég.] : Tres hault Empereur, Charité, ton humble fille et devote, et nous autres, Vertuz, avons, non mie sans cause, grande et inestimable leesse quant, a la supplicacion de Misericorde, tu veulz et t'enclines descendre en terre racheter l'umain lignaige, et nous rendre par ce nostre habitacion de laquelle tant sommes hors bouteez (GERS., Concept., 1401, 394). "...et se en cest estat moroit, sans doute elle yroit en eternelle dampnacion. Avec ce elle seroit habitacion de tenebres, qui doit la lumiere porter." (GERS., Concept., 1401, 401).

2.

"Lieu habité, région habitée" : ...car la fin d'abitacion vers occident et l'autre fin vers orient sont bien prochaines (ORESME, C.M., c.1377, 576). Ainsi est facille croire que, après que lui et Eve yssirent vergés de Paradis terrestre, que icelle science il monstra puis en terre à ses enfans et successeurs qui vindrent après lui, par especial à Abel, Seth et autres qui descendirent de lui, car la premiere habitacion fut près Jherusalem, entre Hebron et Betheleem (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 11 v°). ...yssit de la cité et voulut habiter juxte une praerie le lez de l'eaue, loing de toute habitacion (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 40 v°).

3.

P. ext. "Construction (où a lieu une rencontre)" : ...le ponteau Saint-Denys, près Melun. Ouquel furent faites tentes et petits habitacles à chacun bout du pont pour les princes et seigneurs, et au milieu une petite habitacion de rames vers et feuellées, comme pour convenir et parlementer aux dits princes (CHART. J., Chron. Ch. VII, V., t.3, Fragm. hist., p.1436, 218-219).

4.

ASTR. (Synon. de maison) : ...Par XII signes et figures Qui sont de diverses natures, Selon leurs habitacïons Adviennent les mutacïons (LE FÈVRE, Vieille, trad. De vetula H., a.1376, 361).

II. -

[Domaine sexuel ; interférence possible avec abiter, FEW XV-1, 121a, ancien nordique bíta]

-

"Rapport sexuel, copulation" : Sur ceste matiere dient aucuns docteurs que Joseph creoit plus que que une vierge peult mieulx concepvoir sans habitacion d'om[m]e qu'il ne creoit que Mariev eust peu pecher (Vie J.-C. M.B., c.1429-1458, 14). Le mariage est initié et commencé par espousailles, expressé par le consentement des paroles, ratiffié par les paroles de present et parfait et consommé par copule charnele et habitation. (Sacr. mar., c.1477-1481, 44).

-

Habitation charnelle : Je te fais la segnifiance De Marie la jouvencelle, Joseph, que tu ne touches a elle Par charnelle habitacon (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 52). JOSEPH. Onc en ma vie n'euz avec elle Quelque habitation charnelle. (Myst. Viel test. R., t.1, c.1450, 340). Car il fault avant que affinité soit contraite qu'il y aist habitation charnele. (Sacr. mar., c.1477-1481, 76). ...il n'est riens de pire en tel cas ne pareillement en toutes maladies de nerfs que habitation charnelle avecques femmes (PREVOST, Cir. Guill. Salicet, 1492, II, 24).

-

Avoir habitation (charnelle) à. "Avoir une relation sexuelle avec" : ...s'il n'y avoit el pour li de mesproison C'a ung chien a eüt plaine habitacïon, De quoy elle ot .VII. kiens par la conjunctïon Se doit elle morir se vous faites raison (Chev. cygne P., c.1356, 59). ...luy estant en l'aage de XIII. à XIIII. ans, lors simple et ignorant, ung jour aux champs en gardant les bestes de Jehan Mathorry, son père, fut tempté par l'ennemy et enorté d'avoir habitacion charnelle à une jument appartenant à son dit père, et de fait se mit à l'essay et monta sur la dicte jument, en entencion d'acomplir le cas dessus dit (Doc. Poitou G., t.9, 1456, 424). ...icellui comte d'Erminacq avoit eu habitacion charnelle aveuc une sienne soeur germaine (ESCOUCHY, Chron. B., t.2, a.1465, 290).

III. -

"Coutume, système de gouvernement" : Elle est grande [la pesanteur de tes pays] en nature de la situation où ils sont. Elle est grande en la nature de l'habitaion qui y est. Elle est grande en la qualité et condition des habitans... (CHASTELL., Avert. duc Ch. K., 1467, 306).
 

I. -

"Fait d'habiter qq. part ; lieu où l'on habite (ou bien lieu où un animal demeure)" : N'y ot que ronches et espines (...) ; N'y avoit nul abitement (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 204). En l'ostel ou li caz n'a son habitement Li soris y revielle. (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 431). C'estoit une beghine de povre abitement Qui d'aumonne vivoit (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 505).

-

Au fig. : Et par ceste maniere sans doubte il est vray, le Saint Esperit est amour par lequel nous amons Dieu, car le Saint Esperit fait et euvre en nous ung habitement et maniere de charité. (...) Tiercement se prend charité formelement par maniere de estre et enherdre en nous. Et selon ceste maniere, charité est ung habitement de vertu en nous ou en nostre ame, par lequel nous amons Dieu et nostre proxme. (Somme abr., c.1477-1481, 117).

II. -

"Habit" : Cest femme est vestue d'un sot aornement ? Ne samble mie fame selon mon ensiant. Veés queille parure per Dieu omnipotant ! Oncque maix je ne vy plus sot abitement. (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 570).

III. -

"Fait de toucher, de s'approcher de qqc." : Adonc vint Claudouïn qui estoit filz Climent, De l'oysell fist grant joye et grant esbatement, Dedens une gïolle l'ont mis tout closement Et ly esmyent pain devant luy en present, Mais il n'en avoit cure, n'y fist habitement. (Flor. Octav. L., t.1, c.1356, 45).

IV. -

[Domaine sexuel ; interférence possible avec abiter, FEW XV-1, 121a, ancien nordique bíta] Habitement (de chair). "Rapport sexuel, copulation" : Laissiés, noble pucelle, le vostre pensement (...) : N'aïés de moi paour ; car par le sairement, Jammais n'arai à vous de char habitement, S n'est par mariage (Baud. Sebourc B., t.1, c.1350, 54). Puis que jë ay perdu le dansel de jouvent, Jamés j'aray mary ne de home abitement. (Tristan Nant. S., c.1350, 534). ...le pape lui ot commandé proprement Que n'eüst a nul jour a femme habitement, S'elle ne croit en Dieu ou tout ly mons apent (Tristan Nant. S., c.1350, 353). Et cecy n'eust pas esté, se la matrice ne fust esté ouverte aprés le premier habitement, donc aprés habiter les femmes desirent moult (GORDON, Prat., c.1450-1500, VII, 2).
 

I. -

[Idée de demeurer, de se trouver qq. part]

A. -

"Demeurer, séjourner de manière habituelle (qq. part)"

1.

Au propre : ...par tout le monde envoia Certeins messages, pour savoir Se pour argent ne pour avoir On peüst trouver creature Qui sceüst faire une closture Estant environ ce vergier Tele que jamais herbergier, Entrer, habiter, ne venir, Pour riens qui peüst avenir, Homme ne femme n'i peüssent Qui talent de fausser eüssent Envers Amours, ou qui faussé Y eüssent en temps passé. (MACH., D. Lyon, 1342, 220). La tout seul demeure et habite En hermitage. (Mir. st Guill., c.1347, 36). A demye lieue prés n'avoit homme habitant (Gir. Vienne D.B., c.1350-1400, 207). Josephus nous dist et raconte Que pour le pechié(s) et la honte De ceulz de Sodome et Gomorre Dieus les vault tous confondre en pourre. Par souffre ardant les confondi, Et la terre environ fondi, Si que puis n'i pot habiter Homme ne fame ne heriter ; N'onques n'en pot eschaper ame Fors Loth, ses enfans et sa fame. (MACH., Voir, 1364, 492). Car Dieus (...) A trois angles donné fourme ha Tele qu'il sembloient homme estre (...) Et les envoia a Abram, Qui puis fu nommés Abraham, Et les receupt dessoulz le chaisne Ou il habitoit, car de fraisne N'avoit ne maison ne palais, Ne de pierre, ne biaus ne lais. (MACH., Voir, 1364, 492). Mais homme et femme ne habitent pas ensemble tant seulement pour ceste cause (ORESME, E.A., c.1370, 444). ...il s'ensuit que la terre est dessamblable selon ses parties telement que en la partie qui est descouverte d'eaue n'est pas si grant pesanteur comme en l'autre pour ce, par aventure, que ce n'est pas terre pure, mais a en elle mixtion d'autres elemens. Et Dieu et nature ont ordené que elle soit descouverte afin que honmes et bestes y puissent habiter. (ORESME, C.M., c.1377, 568). ...il, acompaignié de Guillemin de Neelle, escuïer, un nommé Patrouillié et Huguelin de La Brosse, ont alé et venu en plusieurs villes dudit pays de Gastinoiz, esqueles ilz ont eu, de plusieurs personnes demourans et habitans en icelles villes, plusieurs et grans sommes de deniers (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 68). Et si y a poternes fors a merveilles. Et au lez, vers le hault bois, au dessus de la praierie, est la roche si haulte et si droitte que de ce lez nulle creature n'y pourroit habiter. (ARRAS, c.1392-1393, 46). Cellui deable [ce géant] se tenoit emprez une montaigne qui estoit nommee Brumblorenlio. Et sachiez qu'il avoit tout le pays destruit, et n'y osoit homme habiter a VIIJ. lieues, ou a X. lieues prez, car les gens l'avoient tout habandonné. (ARRAS, c.1392-1393, 249). En celle grant court devant dicte, Ou nul, s'il n'est riche, n'abite (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 111). ...la sale (...) Ou fortune maint et habite. (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 68). C'est la Lune, qui maintes foiz Par sa clarté tolt et destruit La grant obscurté de la Nuit, Au prouffit des bestes sauvages Qui habitent par les boscages. (LA HAYE, P. peste, 1426, 32). Premièrement il esconvient Eslire lieu convénient Selon le temps plaisant et sain, Assis en hault ou bas, ou plain, Pour demourer et habiter Qui veult le péril éviter. (LA HAYE, P. peste, 1426, 74). Lequel prist ceste condempnacion en sy tresgrant desplaisir et indignacion, qu'il fut grant temps qu'il ne voulloit habiter en ville ne entre gens (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 40). ...La basse region de l'air. Il la convient ensorceler, De venin charger tost et viste, Pour souiller, infere et macule[r] Tout vivant qui soubz elle habite. (Cene dieux, c.1492, 129). Cestui habita en Archadie et se treuve que ce fut le premier qui monstra aux Assyrians et aux Grez la science de astrologie (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 21 r°). En son temps fut doublement predite la destruction de la cité, laquelle estoit pour lors la plus riche et la plus forte du monde et où plus habitoient de sages et où plus avoit de livres de toutes sciences (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 44 r°). ...et fut par le tremblement de terre qui dura quatre mois, en maniere que les hommes ne osoient habiter ès villes, et le pappe Sixte et le clergié de Romme residoit ès prez. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 91 r°).

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"Séjourner" : ...Et qui souffri mettre son corps Ou sepulcre ou il habita Trois jours ; puis se resuscita (Mir. st Val., c.1367, 140). ...en une maison appellée l'ymage Nostre Dame, estant devant l'ostel dudit mareschal, et où lesdiz hommes avoient habité et conversé repostement par VIIJ ou XV jours (BAYE, I, 1400-1410, 206).

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P. métaph. : De tout ce qu'on doit bon clamer, Soit deça mer, soit dela mer, Avoit assés et a devis En vergier que ci vous devis. N'onques n'i plouvoit, ne ventoit, Qu'adès printemps y habitoit, Ne le soleil pour sa chalour N'amenrissoit point la coulour De l'erbe, qu'adès ne fust verte, De l'ombre des arbres couverte. (MACH., D. Lyon, 1342, 162).

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Habiter un lieu : Quant au tiers point, je pose que la terre fust perciee et que l'en veist par un grant treu tout d'outre en oultre siques de l'autre part la ou seroient les antipodes se la terre estoit partout habitee ; je di premierement, se l'en lessoit cheoir une pierre par ce treu, elle descendroit et passeroit oultre le centre en montant tout droit vers l'autre partie siques a un terme, et puis retourneroit siques oultre le centre par deça, et apres redescendroit arriere et passeroit le centre moins que devant et iroit et vendroit pluseurs fois en appetizant teles reflexions siques a tant que finablement elle reposeroit ou centre. (ORESME, C.M., c.1377, 572). ...et aussi toutes les maisons qui estoient dessus [sur le pont], qui estoient pluseurs et belles, et lesquelles habitoient moult de mainnagiers de pluseurs estas (BAYE, I, 1400-1410, 216). Ce village (...) estoit habité d'un moncelet de bons, rudes et simples paysans (C.N.N., c.1456-1467, 512).

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Inf. subst. "Demeure" : RAISON [à MOÏSE]. (...) Jadiz en ce lieu ci endroit Le cornu d'enfer habitoit Et lonc temps par possession I avoit fait sa mansion, Mes pour ce que ce desplesoit A Grace Dieu qui fait avoit La maison pour son habiter, De ces cornes te fist armer, Et la verge baillier te fist, A ce que par toi s'en issist Li desloiaus habitateur Qui en vouloit estre seigneur (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 23-24).

2.

Au fig. "Exister habituellement, se trouver qq. part, en qqn" : Mére d'amour, en qui habite Toute pitié, toute doulceur... (Mir. emp. Julien, 1351, 192). Tu qui donnes fausse sentence, Tu es issus de la semence De Chanaam, qui fu maudite Pour ce qu'en li tous maus habite. Tu n'iès pas de la bonne ligne De Juda qui droit regle et ligne Et qui fu de Dieu beneoite, Pour ce qu'elle estoit juste et droite. (MACH., C. ami, 1357, 14). Et ja soit ce que soie mis en mue, N'est pas toute m'esperence perdue, Mais vraiement, elle est moult descreüe Et s'est petite. Mais bonne amour de qui elle est venue, Quant li plaira, l'ara tost acreüe, Car tous les cuers en petit d'eure mue, Ou elle habite. Et se ma dame en mon mal se delite, Ou se Dangiers, qui me het et despite, Pour moy grever, li enorte ou endite Qu'elle me tue, Ou qu'a tous jours me soit grace entredite D'amours, qui maint amant de mort respite, Quant li plaira, sera tost desconfite, Prise et veincue. (MACH., F. am., c.1361, 159). Et combien qu'en li habita La mort, il se resuscita Par la vertu de sa nature Divine (Mir. Barl. Josaph., c.1363, 267). Si ne te quier ja mais faire depri N'Amours servir, obeir ne loer, Puis que raisons et mesure en oubli Sont, où tuit bien deüssent habiter. Et voist ainsi comme il porra aler, Qu'amours et toy et joie à Dieu commant. (MACH., L. dames, 1377, 224).

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"Être présent (dans l'âme du croyant)" : ...quant je (...) pense a la pascience De cest homme (...), Je tieng que Dieu de paradis En lui habite. (Mir. st Ign., 1366, 94). Doncques s'il advenoit - que ja ne face ! - que par aucun temps en sa concepcion ou aprés je fusse eslongnee et hors de ceste dame, pour cause du mauvais tirant Pechié originel, qui la maintenroit ? Car pour riens en luy habiter je ne pourroye. (GERS., Concept., 1401, 400). Pourquoy celle de nostre Dame ne pouoit engendrer telle saincte paour contre villain penser, a qui Dieu ne parla mie seulement mais dedans luy habita ? (GERS., Concept., 1401, 425). Et cest envoiement [du Saint-Esprit] se fait afin que habiter et demourer en la creature raisonnable, mais le premier envoiement se fait pour demonstrer l'enhabitation des aultres [il faut comprendre "aux autres", "aliis" en latin]. (Somme abr., c.1477-1481, 118).

B. -

Empl. pronom. S'habiter qq. part. "S'installer qq. part" : ...et la se habita et fist une maison dont ancores y parent partie des murs. (LA SALE, Sale D., 1451, 255).

C. -

Empl. trans. "Peupler" : Et après le departir d'elle, qui lui aida en son premier gouvernement a faire les forteresses et les villes et habiter le pays, il ot la serour d'un qui pour lors gouvernoit la conté de Poictiers, et en ot pluseurs enfans, de quoy vous estes ly uns. (ARRAS, c.1392-1393, 50). Sy lui souvint de la coustume que les anciens heurent quant ilz souloient habiter les citez ; car ilz assambloient les poeuples de divers lieux (LA SALE, Sale D., 1451, 188).

D. -

Part. passé en empl. adj.

1.

[D'un lieu] "Où il y a des habitants, qui est peuplé" : Et tant [Remondin] chevaucha qu'il entra en la terre de Poictou, la ou il trouva grant foison de haultes forests non habitees, et en aucuns lieux, grant foison de sauvagine, comme cerfs, bisches, dains, chevreulx, porcs, et autres bestes sauvaiges, et en moult d'autres lieux belles plaines, belles praieries et belles rivieres. Par foy, dist Remondin, c'est grant dommage que cest pays n'est habitez et peuplez, car moult y est grasse la contree. Et en pluseurs lieux treuve sur la marine moult de belles places non habitees, lesquelles, a son semblant, feussent moult prouffitables a habiter. (ARRAS, c.1392-1393, 76). ...et s'enfouyrent en mer en Roddes, lors non habitée, et là firent une ymage en l'onneur du Soleil, qui avoit LXX couldes de hault et cent autres simulacres. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 19 v°). En celui temps, quasi par toute la terre habitée, les haulx roys et grans hommes, tous communement se exerçoient en ceste tant notable science de astrologie, pour le grant fruit et utillité qui en venoit (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 32 r°). ...et fut donnée ousdits mariez la terre de Flandre et en fut faict conte et n'estoit lors le païs de Flandres habité et n'estoit que bois, desers et forestz. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 108 r°).

2.

[D'une pers.] "Domicilié, établi" : Que se aucuns des diz Receveurs estoient bons et suffisans et fussent bien habitez et mariez, ou pays de leur Recepte, que ils demeurent en leurs Offices (Ordonn. rois Fr. S., t.6, 1378, 382).

II. -

"Atteindre qqc., toucher qqn/qqc. ; arriver qq. part"

A. -

Habiter qqn. "Toucher qqn" : Altrefoys ne me vouluz croyre, Respondit sainct Pre a Thomas, Pour ce que tu n'y estoys pas, Que Jhesus fust resuscité Si tu ne l'eusses abité (Serm. tous les fous K., c.1500, 274).

B. -

Habiter à qqc./qq. part. "Atteindre qqc., arriver qq. part"

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"Atteindre qqc." : ...la lune est haulte ; nul n'y peult habiter. (Serm. tous les fous K., c.1500, 274).

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"Arriver qq. part" : ...Alons briefment nagant Devers cheste cité que je voi chi-devant ; Si sarons où nous sommes, chi à val, habitant. (Baud. Sebourc B., t.2, c.1350, 46). Advint com[m]e ilz cheminoient douceme[n]t que l'enfant Ih[es]us leur monstra les mo[n]taignes et le pais d'Egipte, ouquel pais ilz habiterent davant trois jours. (Vie J.-C. M.B., c.1429-1458, 29).

III. -

[Domaine sexuel ; interférence possible avec abiter, FEW XV-1, 121a, ancien nordique bíta] "Avoir un rapport sexuel, copuler" : ..De coulours et d'aournemens, De goust, de souefs flairemens Et de tout ce qui puet delecter Par cohit et par habiter Le mascle avecques la femelle (LE FÈVRE, Vieille, trad. De vetula H., a.1376, 369). Habiter au bordel et sans vergongne fait steriliter hommes honnestes (GORDON, Prat., c.1450-1500, VII, 1). Et cecy n'eust pas esté, se la matrice ne fust esté ouverte aprés le premier habitement, donc aprés habiter les femmes desirent moult (GORDON, Prat., c.1450-1500, VII, 2). Entre tous les aultres empeschemens impossibilité de habiter charnelement obtient tres grant lieu, car de sa nature et de la constitution de l'eglise il empesche mariage (Sacr. mar., c.1477-1481, 76). Impossibilité de habiter est quant l'un et l'aultre ensemble ne peuent habiter pour aucun deffault patent. Ilz sont pluseurs especes comme naturele impuissance, comme frigidité en l'homme, artacion et indisposition en la femme, deffaulte de eage en l'enfant. (Sacr. mar., c.1477-1481, 76). ...car le froit ne puet congnoistre femme, ne aussi a mouvement en femme, ne voulenté de habiter (Sacr. mar., c.1477-1481, 78). ...et universalement toutes chairs volatiles ayant long col, long bec, vivent en eaue, et les chairs des passeras qui sont de vehemente chaleur et augmente fort le desir de habiter. (Rég. santé corps C., 1480, 71). Et doit l'omme ce abstenir de habiter a cause qu'il est exsiccatif, et aussi abstenir de bagnier pour une mesme cause, et eviter le saignier tant qu'il est possible (Rég. santé corps C., 1480, 172).

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Habiter (charnellement) à / avec qqn : Oncques Millez ne pot a son corps habitter. (Flor. Rome W., c.1330-1400, 220). Fols est qui l'un a l'autre habite Sans l'entencion dessus dite[l'intention d'engendrer] (JACQUES BRUYANT, Voie pauvreté richesse P., 1342, 15). ...chrestïen vaillant Ne doivent abiter de leur char tant ne quant A femme sarrasine (Tristan Nant. S., c.1350, 512). ...je sçay bien qu'a moy ne seriés abitant, Se baptesme n'avoye (Tristan Nant. S., c.1350, 618). Se ly contez Fedriz me volloit créanter C'au cors de la roïne ne vosist abiter Jusqu'à tant que ly prestrez le feroit espouser, Tost aroie consail de ce fait acorder (Hugues Capet L., c.1358, 201). Car conme faux et sanz raison D'une moye suer se vanta Qu'a li charnelment habita (Mir. Oton, c.1370, 376). ...Cesar, quant il estoit encore jeune, vit en son dormant que il habitoit charnelment a sa mere (FOUL., Policrat. B., II, 1372, 153). L'en m'a fait du roy mencion Qu'il est d'une complexion Qu'il n'est femme, s'a elle habite, Qui n'ait du corps tant de labite Qu'a peines se puist puis aidier. (Mir. Berthe, c.1373, 164). Habiter avec creature Feminine nourrist luxure, La force baille et la maniere Du feu emprandre et la matiere (DESCH., M.M., c.1385-1403, 199). Et disoient que lors estoit venu ung jenne homme, lequel ilz avoient veu charnellement habiter a elle. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 50). Et dient que nul sarrazin n'ose entrer en leur horatoire puis qu'il a habité a femme charnellement, qu'il ne soit avant lavés et estuvés, car leur loy le commande a ainsi faire. (Voy. Jérus., c.1395, 60).

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Habiter une femme : Ains femme n'abitay depuis ma désevrée (Chev. cygne R., c.1356, 139).

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[D'une femme] Estre habitee/se faire habiter : Et se maternité ensieut le mariage, il fault distinguer se ta femme depuis qu'elle aura de toy esté charnelement habitee, aura receu le filz d'aultrui. (Sacr. mar., c.1477-1481, 56). Si ouvrit le brevet, auquel estoit escript au langage du pays : Asca mibarasca, cest-à-dire : ne te fais point habiter et tu ne engrossiras point (TARDIF, Facéties Pogge M., c.1490, 262).
 

"Habitante"

REM. Ex. d'a. fr. et doc. 1482 (Montbéliard, habitant ou habiteresse) ds GD IV, 394c.
 

"Celui qui habite qq. part, habitant" : Il ordena que il tremetroit habiteurs romains en villez de Signe et de Circee, afin de l'empire romain croytre et dilatier, afin que les diz habiter fussent a deffense et a garde de la cité de Rome (BERS., I, 1, c.1354-1359, 56.3, 93). Jacob habiteur de maison Est l'espirituel pensée Repeue de douce rousée Par larmes de contriction, Venenz en delectacion De contempler choses divines (DESCH., M.M., c.1385-1403, 222). Habiteur : habitator (Gloss. gallico-lat. M.M., c.1425-1450, 228). Conforte toy en ce, et pense que le bruit de tes ennemys n'est pas pardurable, quant souvent, aprez tous les effors de oultrage humain, de violens usurpateurs d'autruy regnes sont confundus et aneantis, et la terre au paraler remaint aux anciens habiteurs (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 141). Habitator (...) : habiteur (LE TALLEUR, Vocab. E.M., c.1490, 145).

Rem. Ex. d'a.fr. et GOULAIN 1374 ds GD IV, 394b-c. Hist. prem. destruct. Troie R., c.1470-1480, 104/29. COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 271.

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Habiteur estroit. "Celui qui est logé à l'étroit" : ...voeul blasmer la grant convoitise et orgoeul de ce monde par laquelle de present celui se repute habiteur estroit duquel sa maison n'est plus grande que les champs de Cincinatus (LA SALE, Sale D., 1451, 223).

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[À propos d'un animal] : Le laurus donques, du matin, est habiteur des fleuves et, par jour, des terres. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 236).
 

"Qu'on ne peut habiter, où l'on ne peut se tenir à demeure" : ...terre deserte et inhabitable (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 7). Item, il semble que Dieu et nature ne veulent pas tele monarchie ; mes semble que il aient ordené terre que pluseurs soient souverains princes parce que pluseurs regions sunt divisees ou separees par mers ou par grans fleuves ou palus, par forests, par desers, par montaignes, par lieuz inaccessibles ou inhabitables pourquoi les uns ne pevent converser avec les autres de tele conversation comme requise est entre gens d'un royalme ou d'une policie. (ORESME, Pol. Arist. M., c.1372-1374, 291). Et pour ce entendre, il convient supposer que la terre n'est pas habitable tout environ ou tout en circuite en alant ou en procedant d'orient en occident ou au contraire, mes vers orient est un terme outre lequel elle est inhabitable et aussi un autre vers occident (ORESME, C.M., c.1377, 330). Item, Averroïz dist que par ce que dist Aristote appert que il avoit opinion que gens habitassent ou quartier d'entre orient et le pole antartique, mais cel païs est inhabitable, si comme il sera declaré vers la fin de cest secont livre. (ORESME, C.M., c.1377, 346). ...et se tenoient en la marche de Carduel, entre roces et montagnes, et pais inhabitable (FROISS., Chron. D., p.1400, 135). ...De Jehan le Fevre, de Brulle, artilleur, (...) De la 16e maison, signée XVI, neant pour ce que durant le dit temps de ce compte elle a esté vague et vuide et inhabitable (Comptes Paris V.L.D., t.1, 1424-1425, 39).

Rem. Consol. Boèce C., c.1350, gloss. ; Percef. I, R., t.1, c.1450 [c.1340], 377/26...

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"Dans un état qui ne permet plus l'habitation" : ...ycelle meson et appartenances estoient devenues wides, vagues, ruineuses et inhabitables et en tel point que les diz religieus ne autre pour eus n'i povoient ne n'avoient peu trouver par lonc temps que prendre ne que gaigier pour leur dit crois de cens ou de rente (Chartes Abb. St-Magl. T.F., t.3, 1338, 77). ...sur le fait des maisons ruyneuses et inhabitables de la dite ville de Paris (Chartes Abb. St-Magl. T.F., t.3, 1354, 196). ...yceulx lieux estoient devenuz wiz, vaguez, ruineux et inhabitablez (Chartes Abb. St-Magl. T.F., t.3, 1387, 581). ...il fut contraint de soy bouter en une vieille masure inhabitable, pour faire ouverture au clistere qui demandoit la clef des champs. (C.N.N., c.1456-1467, 469).
 

"De manière inhabitable" : Inhabitabiliter (...) : inhabitablement, sans habiter (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 239). Inhabitabiliter (...) : inhabitablement (LE TALLEUR, Vocab. E.M., c.1490, 171).
 

"Propriété de ce qui est inhabitable" : Inhabitabilitas (...) : inhabitabletés (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 239). Inhabitabilitas (...) : inhabitableté (LE TALLEUR, Vocab. E.M., c.1490, 171).
 

"Habitant" : ...et que ferions publier par tous nos païs, tant de Flandres que autres, bonne et ferme paix et toute sceurté, pour les inhabitans en nostre dite ville de Gand, et pour ceulx qui les ont servy en armes, en fait de guerre avecques eulx, tenans à present leur party. (Doc. 1453. In : ESCOUCHY, Chron. B., t.2, a.1465, 108). ...aiant pité et compacion de nostre dite ville de Gand, et de nostre peuple habitant en icelle, de nostre certaine science, auctorité et plaine puissance, ausdiz de nostre ville de Gand, inhabitans en icelle, tant hoofmans, conseilliers, que autres, de quelque estat ou condicion qu'ilz soient, qui les ont servy en armes et fait guerre avecques eulx, tenans à present leur party, comme dit est, contre nous et nos subjez obeissans (Doc. 1453. In : ESCOUCHY, Chron. B., t.2, a.1465, 109). ...et fit faire le serment à tous les inhabitans ensemble (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 314). [Aussi t.3, 302 ; t.5, 320]
 

"Vide d'habitants, désert" : Il conduysoit lors Suÿsses, Alemans, Lancequenetz qui ont cueurs vehemens A l'exercice de guerre exordiante Comme il appert, lesquelz en leurs rommans Avoyent tous fait au roy leurs sermens De faire Napples contree inhabitante, Si d'adversaires la trouvoyent habitante (LA VIGNE, V.N., p.1495, 140).
 

[À propos d'un lieu] "Fait de pas être habité" : ...tellement que leurs hostelz et manoirs, en la plus grant partie, par inhabitacion sont choiz et destruiz (ESCOUCHY, Chron. B., t.3, Pièces justif., 1449, 369). ...souloient valoir... chascun an environ XVI livres par., de present ne vault que LX solz par. a l'occasion de l'inhabitacion de ladite ville pour les guerres et la mortalité qui ont estez par cy devant (Trés. Reth. L., t.3, 1449, 263).
 

[D'un endroit] "Qui n'est pas habité" : ...et les maisons (...) estoient devenues non garnies, inhabitees (Chartes Abb. St-Magl. T.F., t.3, 1366, 320). ...affin que la dicte ysle ne soit depopulée et demeure inhabitée, aus diz supplians avons octroyé et octroyons de grace especial, par ces presentes, que doresenavant les diz habitans de la dicte ysle de Noirmoustier soient et demeurent quictes de contribuer aux aides imposées ou à imposer en nostre royaume pour le fait de la guerre (Doc. Poitou G., t.6, 1392, 91). A present est toute deffaite, Inhabitee et en exil [Babylone] (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 281). ...en faisant ladicte visitacion, ayeons, comme dit est, les villes devant dictes trouvé inhabitées et sy que toutes desnuées de peuple et les aucunes du tout en tout inhabitée, en telle maniere que sont venues en bois et buissons, les maisons, granges et habitacions encheues en ruyne et desolacion (Trés. Reth. L., t.3, 1449, 276). ...voz domiciles et voz maisons seroient inhabitées (BUEIL, II, 1461-1466, 166). ...c'est assavoir du temps du pappe Clement VIe, où les vifz ne povoient souffire pour ensevelir les mors et tellement que plusieurs villes et villaiges furent inhabités par longtemps. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 137 r°).

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"Où il n'y a personne" : Or convendra il les champs demourer desers, inhabitez et habandonnez aux bestes sauvaiges (CHART., Q. inv., 1422, 21). ...lez champs inhabitez feront les cités familleuses (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 13).
 

[D'un endroit] "Qui est habité" : ...desirons icelle notre ville, qui est entrée de noz pais de pardeça et assise en la frontière des Angloiz, noz anciens ennemis, estre et demourer bien peuplée et inhabitée (Hist. dr. munic. E., t.3, 1447, 480).
 

"Habiter (un lieu)" : Bien doit estre fructueuse et delectable la terre qui fu arousee et mouillee del precieux sanc Nostre Seigneur Jhesucrist et qui de ses benois piez fu ambulee et avec ses disciples inhabitee (Vers. liég. Livr. Mandeville T.R., c.1375-1390, 2). ...desirons icelle notre ville, qui est entrée de noz pais de pardeça et assise en la frontière des Angloiz, noz anciens ennemis, estre et demourer bien peuplée et inhabitée (Hist. dr. munic. E., t.3, 1447, 480). Cestuy Britan se tenoit avoir esté extrait du lignage Brutus, qui premier poeupla et inhabita la Grant Bretaigne, et de luy prist premier nom. (Percef. II, R., t.1, c.1450 [c.1340], 272).
 

"Déserter" : ...ainczois yroint ailleurs vivre et demourer, et dès à present veullent frostir et inhabiter led. fié pour la charge que lesd. receveurs leur ont fait (Actes Jean V Bret. B., t.4, 1435, 125).

V. aussi inhabité1
 

"Inhabité, désert" : Si n' osa demourer ou pays, mais print toute sa finance et s'en vint sur haultes montaignes marchissans aux reffuges du Rosne et de pluseurs autres gros fleuves, et estoit le pays non habitez. (ARRAS, c.1392-1393, 15). Et tant [Remondin] chevaucha qu'il entra en la terre de Poictou, la ou il trouva grant foison de haultes forests non habitees, et en aucuns lieux, grant foison de sauvagine, comme cerfs, bisches, dains, chevreulx, porcs, et autres bestes sauvaiges, et en moult d'autres lieux belles plaines, belles praieries et belles rivieres. Par foy, dist Remondin, c'est grant dommage que cest pays n'est habitez et peuplez, car moult y est grasse la contree. Et en pluseurs lieux treuve sur la marine moult de belles places non habitees, lesquelles, a son semblant, feussent moult prouffitables a habiter. (ARRAS, c.1392-1393, 76).
 

"Habiter"

REM. SIMON DE HESDIN (éd. 1485) ds GD VI, 428b.
 

"Habiter de nouveau"

REM. Doc. 1410 ds GDC X, 526b.